Les Esquimaux jouissaient du respect des hommes de science et de l'amitié de certains d'entre eux, mais les matelots et les officiers les traitaient comme des domestiques, ou pire.
Le soir, les membres de l'équipe scientifique se rassemblaient au salon et se racontaient des histoires effrayantes de navires prisonniers des glaces dans la même région. Un grand nombre avaient dérivé avec la banquise avant d'être emportés on ne savait où et on n'avait plus jamais entendu parler d'eux.
On organisa aussi des tournois de bridge dans le fumoir, et pour varier les distractions, on débarrassa une partie du pont pour y installer un ring de boxe.
L'un des hommes de Lane découvrit alors quelque chose dont la vue fit reculer ses compagnons, horrifiés: les fémurs croisés d'un être humain. Un peu plus loin, ils trouvèrent une omoplate. Les hommes continuèrent à creuser et exhumèrent une tente à la toile déchirée et salie, un sac de couchage en peau de renne dont les replis cachaient d'autres ossements humains, notamment une main complète qui gardait encore l'ongle du pouce et à laquelle il ne manquait que la chair pour sembler vivante.
Ceux qui le connurent le décrivent comme un homme hanté par ce qu'il vécut dans l'Arctique en 1913 et 1914. Il disait lui-même:" Ni les horreurs du front occidental, ni les ruines d'Arras, ni l'enfer d'Ypres, ni toute la boue des Flandres menant à Passchendale ne peuvent effacer le souvenir de cette année dans l'Arctique."