Ils savaient leurs parents incapables de croire aux choses un peu trop abracadabrantes. Ce triste état de certitude s’appelait être adulte…
De fait, en examinant la protégée de Gabin, Éloïse ne put que constater que la créature sortait de l'ordinaire : son corps rond ainsi que ses pattes longues et fines arboraient une stupéfiante couleur argentée. Une araignée de conte de fées, songea la jeune funambule.
– Je n'en ai jamais vu de pareille ! souffla-t-elle, admirative.
– Nous non plus, rétorqua Lucas.
Il pâlit un peu en poursuivant :
– Elle tisse des toiles argentées comme elle. Je crois... qu'elle est unique. On a eu beau chercher, on n'a pas réussi à déterminer à quelle espèce elle appartenait.
À peine la pancarte dépassée, l’atmosphère avait changé. La mélancolie pouvait se palper dans l’air. Sous les nuages menaçants qui la dominaient et le vent glacial qui la balayait, l’on devinait aisément que le bonheur s’était depuis longtemps enfui de Prudenge.
Jamais elle n'avait raté une représentation : elle ne vivait que pour cheminer sur son câble, toujours plus haut, toujours plus près du sommet du chapiteau, jusqu'au jour où elle toucherait le ciel du doigt et marcherait sur les nuages.
Le ciel anthracite s'étendait en une immense toile au-dessus des toits de Prudenge. Prise dans ses filets gris, la ville s'éveillait.