Citations sur Échec et rap (12)
Elle relut le rapport de Vlad. Ce dernier disposant d'une mémoire phénoménale, elle ne craignait pas que des oublis ou des erreurs existent dans la relation de leur entretien avec le couple voisin de Legal [la victime du meurtre], mais elle tenait à en connaître le contenu par cœur.
Ainsi, elle ne consulterait pas ses notes pendant la réunion et surtout, si le proc' téléphonait, elle répondrait sans hésiter à ses questions.
Lurçat méprisait les gendames, jugés a priori incapables de diriger une enquête criminelle, il méprisait Sponge et toutes les petites villes jugées comme des trous infects peu propres à servir sa carrière, et pour faire bon poids, il méprisait aussi les femmes qui occupaient, selon ses propres termes, des postes "d'homme".
Lili, femme gendarme dirigeant la brigade d'un "trou infect", cumulait donc les handicaps, mais elle n'avait pas l'intention de supporter la morgue de Jean-Baptiste Lurçat.
- Lili, venez voir, répéta Vlad, puis il recommença, retrouvant le tutoiement naturel qu'il employait lorsqu'ils n'étaient que les deux.
- Lili, viens voir ce que j'ai trouvé.
L'adjudant-chef Lili Rigosi se retourna.
Elle s'aperçut que Vlad se tenait accroupi auprès du cadavre.
La main droite de la victime, jusque-là fermée et posée sur le ventre, s'était ouverte en tombant le long du corps.
Elle contenait un objet. Lili s'approcha. Une pièce d'un jeu d'échecs. Un fou.
Lili jeta la lettre dans la boîte en haussant les épaules. Pas de signature, sinon un dessin représentant une pièce d'échecs, une reine (...)
Lili consulta sa montre. 23h30. Elle devait absolument dormir, maintenant.
Le téléphone sonna. Lili tressaillit. Le téléphone, aux alentours de minuit, indiquait un pépin.
Elle décrocha.
- Chef, claironna la voix de Marc Balu, le permanencier de cette nuit-là, il faut que vous descendiez. On a un os. Un assassinat rue Molière. Vlad vous attend pour les constats.
(...) Deux gendarmes de la brigade barraient l'accès à l'immeuble, six étages plus bas.
(...) L'immeuble, réveillé, grondait de rumeurs extravagantes.
Un assassinat. Non, plusieurs. Une prise d'otage. Un attentat.
Une canicule épouvantable régnait depuis trois jours.
Elle préfigurait les futures catastrophes climatiques, déclaraient certains scientifiques, avec des regards ricanants qui disaient "depuis le temps qu'on tire en vain la sonnette d'alarme !"
D'autres, moins pessimistes, constataient que la même canicule avait asséché les rivières et les lacs, dix ans auparavant, sans que l'espèce humaine n'ait disparu pour autant.
Lili en savait assez sur la misère du monde pour se révolter une fois de plus : c'était souvent les mêmes qui trinquaient, ceux que la vie n'avait pas épargnés et à qui la mort flanquait parfois une ultime gifle. (p.21)
Elle contourna Vlad afin de retourner dans l'appartement.
Son adjoint évitait de poser les yeux sur les taches de sang.
Son visage récupérait à peine un semblant de couleur. La poitrine de Lili se contracta. Vlad ne serait jamais un bon flic. La violence et la mort lui faisaient horreur. La tristesse du regard de Vlad indiquait qu'il ne s'habituerait jamais à l'inhumanité de certains hommes.
Ma vengeance est accomplie, mais je ne la supporte pas davantage que je n'ai supporté ce qu'ils m'ont fait subir. Je suis détruit à jamais. (p.157)
J'attendrai aussi longtemps qu'il faudra. Tu ne seras pas toujours trois, alors quand tu seras un tout seul... (p.115)
Chacun, à la brigade, avait eu droit aux théories éducatives de Thénot qui n'avait pas d'enfants, n'en voulait pas, mais disposait d'un arsenal complet permettant de bien les élever. (p.52)
Si Olivier Thénot prenait la parole, ils y passeraient la journée, et pour des nèfles, car ses capacités d'analyse valaient celles d'une pintade. (p.49)