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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
La faim blanche est un récit d'Aki Ollikainen sur l'hiver 1867 en Finlande. 
Un hiver terrible, glacé, froid, et noir où sévit une famine dramatique : depuis plusieurs saisons les greniers se vident car les récoltes sont insuffisantes et les conditions météorologiques défavorables n'arrangent rien (été pluvieux).
Le gouvernement du Grand Duché de Finlande observe mais laisse la situation s' enlisée, les importations sont bloquées ...
Un cortège interminable de paysans affamés, faméliques, affluent sur les routes en direction de régions plus clémentes amenant avec eux le typhus, le scorbut...

L'auteur, Aki Ollikainen, nous fait vivre de l'intérieur l'insoutenable dérive physique et morale de cette population acculée à une errance interminable sur les chemins enneigées et ténébreux de cet hiver interminable.
Nous suivons dans ce périple hivernal une famille dont le seul choix est celui de partir car il y a des bouches à nourrir : Marja, l'épouse de Juhani, s'y résigne car elle espère un avenir meilleur pour sa fillette Mataleena, et son dernier né Juho.
Mais ce périple hivernal et surhumain grâce à la plume poétique de l'auteur et son talent se transforme en une odyssée blanche au milieu d'étendues glacées où l'espoir est encore tangible.

Je suis sortie glacée et émerveillée par les tours de passe-passe de l'auteur.
Littéralement soufflée par l'univers onirique qu'il a réussi a créé dans un tel contexte !
La personnification de la faim en chat noir, griffant et griffu, lacérant les estomacs vides, la mort, elle, serpent visqueux à l'oeil doré, attendant tapi dans un recoin, l'instant fatidique pour assuré sa morsure létale.
Les visions, les rêves et cauchemars de Marja dus à l'épuisement physique sont aussi réels que les embûches et les épreuves rencontrées dans sa traversée abyssale.
Et puis il y a aussi ces deux mondes qui se côtoient, s'affleurent et parfois se rencontrent : celui du petit peuple, celui de Marja et celui des bourgeois, des notables qui se cachent derrière la fumée de leur pipe en porcelaine et la buée qu'ils dégagent sur les carreaux de leurs fenêtres.
Une odyssée blanche qui se transforme miraculeusement en conte lumineux avec l'arrivée de l'été.

« Le flanc de la barque a cédé. Elle n'a pas survécu à l'hiver. Les planches n'ont pas résisté au poids de la neige. le garrot à oeil d'or file hors de son trou et survole l'esquif défoncé. le bruit du battement de ses ailes se déploie au-dessus du lac, jusqu'à ce que le vent le dissolve dans un parfait silence. Soudain, résonne le cri nuptial d'un plongeon arctique solitaire. »

Belle performance pour ce premier roman de Aki Ollikainen publié en France en 2016 (2012 en Finlande) qui nous immerge dans l'espérance de jours meilleurs et la détresse de tout un peuple au bord de l'agonie, terrassé par la faim blanche, une des plus grandes famines qu'il ait connu : « les années de grande faim » de 1866 à 1869.
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C'est fort, .... fort triste mais beau!
Finlande du Nord, les années de famines ont poussé Marja à abandonner son mari mourant seul dans la métairie et elle tente avec ses deux enfants de rejoindre, au coeur de l'hiver, la ville des Tsars qu'elle n'atteindra jamais vivante malgré la charité d'aussi pauvres qu'elle.

Ollikainen nous immerge dans les hallucinations de ces spectres affamés, le chat griffant l'estomac, l'étoile 'oeil du serpent' qui attend que le corps gèle...

'Le pont est une langue avide, prête à faire basculer le marcheur dans le gosier de l'hiver pour satisfaire sa faim infinie, insatiable.'

Encore un point positif des livres audio, on peut en continuer la lecture même au milieu des larmes;-)
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Je ne suis pas passée loin du coup de coeur. La Faim blanche a été en tous cas un coup à l'estomac. Un récit dur, très dur même par moments. La beauté scintillante aux contours oniriques d'une gemme taillée dans le vif, dans laquelle l'âme humaine se reflèterait, peut-être.

Finlande, octobre 1867. L'hiver vient et une terrible famine s'abat sur le pays. Je savais déjà que ce milieu du dix-neuvième siècle avait été effroyable pour l'Irlande, pour la Suède aussi (je conseille la lecture de la magnifique Saga des émigrants du suédois Vilhem Moberg, à ce sujet). Mais la Finlande a également payé un bien lourd tribut à ce fléau.

Dans ce premier roman d'Aki Ollikainen, on va suivre les pas de Marja, obligée de quitter leur métairie de Korpela et de prendre la route avec ses deux jeunes enfants, Mataleena et Juho. Pas à pas dans la neige avec la faim, la peur et l'épuisement physique et moral au ventre ; de porte en porte, ouverte sur un bout de pain à la farine coupée d'écorce d'arbre, ou fermée avec agressivité au nez des mendiants ; de village en village, parfois dans un coin de traineau tiré par un cheval, souvent au milieu des congères. D'embûches en épreuves, Marja est portée par un espoir, celui de permettre à ses enfants de rejoindre Saint Pétersbourg, la ville du tsar où sûrement on ne connait pas la faim. « Son rire trace un chemin dans le désespoir gris. Au bout ne se trouve pas la mort blanche, mais le vert tendre du printemps pétersbourgeois. »

Le grand talent de l'auteur est d'alterner des chapitres sur Marja, Mataleena, Juho, la vie, la survie dans les campagnes, avec d'autres, plus courts, où parle « le sénateur », l'homme politique de la ville, le médecin. Ces apartés rythment le récit et lui donnent une profondeur frappante, rappelant à chaque fois au lecteur qu'il n'est pas dans un conte de Grimm, mais bien dans la vraie vie. Rappelant aussi que la faim n'est pas la même pour tous, et à quels débordements mènent une telle pénurie : brigandage, ferveur religieuse, folie ; à une prise de conscience des riches, même parfois. L'être humain, capable du pire comme du meilleur.

Un style très fort, sec mais souvent lyrique. Un roman marquant, très bien construit, où les visions et les cauchemars ont autant de corps que la réalité physique. Une grande tendresse sous-jacente, malgré tout. Une petite lumière à laquelle s'accrocher quand l'histoire est trop dure. Pour tout cela, c'est une lecture que je conseille.

« Quel mal t'avait-il fait, cet homme-là ? Je te crèverai les yeux, Satan, car c'est la seule façon pour que tu voies notre malheur ! »
Lien : https://lettresdirlandeetdai..
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