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Citations sur Le devoir de violence (29)

souvent il est vrai, l'âme veut rêver l'écho sans passé du bonheur. Mais, jeté dans le monde, l'on ne peut s'empêcher de songer que Saïf, pleuré trois millions de fois, renaît sans cesse à l'Histoire, sous les cendres chaudes de plus de trente Républiques africaines...
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Ils ne se disaient rien et restaient l’un en face de l’autre, la tête baissée, le regard indécis, comme perdus en une difficile méditation, sentant du nouveau dans l’air, respirant de l’invisible- avertissement mystérieux qui les prévint de leurs intentions secrètes, les paralysait dans une sorte d’ardeur frémissante, de soulèvement-, en cette brusque tension qui court au bout des doigts, surexcite à les exaspérer toutes les facultés de sensation physique, jusqu’à cet innommable besoin de commettre des sottises.
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Une femme adultère, dans ces conditions, encourait des sanctions impitoyables: elle était pour le moins mise nue, exposée en pleine cour royale, et, chargée d'un carcan aux chevilles, subissait- en vertu du droit coutumier- un lavement vaginal avec une décoction d'eau pimentée- où nageaient, ouallahi ! des fourmis. Dans certains cas (si la fautive se trouvait en état de grossesse, avortait et mettait au monde un enfant mort-né) un autre supplice, institué par Saif maintenait la femme cuisses ouvertes au-dessus d'un feu de bois, qui lui roussissait les poils du sexe.
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Le lendemain, Saif devait marier Tambira et Kassoumi. Mais, s'étant réservé le droit de cuissage pour le premier mariage de ses serviteurs, il fit valoir "que la mariée devait être vierge." Ce qui n'était pas le cas [...] la matrone fait asseoir Tambira, jambes écartées, sur un gros mortier que l'on avait roulé jusque dans sa chambre. Et, tandis que la première vieille maintient la femme immobile, la seconde, à l'aide d'un couteau plutôt sale - pratique l'ablation du clitoris, incise puis avive les deux lèvres, les rapproche et les maintient dans cette position en les agrafant avec des épines. Ménageant sous cette "couture'' un petit orifice (pour les besoins naturels), elle y introduit un bâtonnet évidé, enduit de beurre noir, attache enfin, l'opération terminée, par un triangle de morceaux de canne de mil, le bas-ventre de la femme. Du genou à la hanche. Jusqu'à complète guérison, interdiction de tout mouvement [...] Enfin, nombre d'hommes, vivant en concubinage avec le sexe faible, se trouvèrent heureux d'avoir à conquérir, à l'occasion du mariage, un plaisir nouveau, sadique, fait de volupté et de souffrance, quand ils défloraient, sexe picoté d'épines, flancs éclaboussés de sang, leur maîtresse, elle-même ravie, et morte plus qu'à moitié de plaisir et de peur. (p.87)
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Ceux qui pensaient le connaître voyaient en lui un idéaliste, illuminé, l’espace d’un éclair, par quelque immense idée sous le coup de laquelle il restait comme ébloui, souvent trop longtemps. Il ne parvenait pas, disait-on, à dominer son idée, y croyait fermement, passionnément, mais, dès lors, toute son existence ne devenait plus qu’une lente agonie sous la pierre qui l’avait à demi écrasé. Révolté ? Cynique ? Ignoble ? Mythe vivant d’une colère ambulante à la merci de sa légende névrosée ? Sorcier raté ? Non. Pas exclusivement. On lui trouva un autre qualificatif : celui de criminel en retraite.
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Nous avons toute la vie pour être malheureux, ironisa-t-il. Car, dit le conte, le Destin avait rendez-vous avec Dieu sur la Terre d'amour. En chemin, il voit sur un champ défriché, des hommes se battre. En vain, il les réconcilie. Puis, exaspéré : "Il n'est pas, leur dit-il, de justice sans amour ni d'injustice sans nécessité." Et au nom de la nécessité, le Destin massacra les hommes, puis, brandissant le flambeau de la raison laissé aux sur-vivants - qu'il bénit - va, vole et arrive au rendez-vous. En retard. Dieu était absent. Le flambeau, aux mains des hommes, derrière lui, éteint. Dieu avait choisi. Le Destin aussi. L'homme de même ; tu comprends ?
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Où est-il, le « bragouillon », le « strigouillât », le« schniffamouck » ? Il va la danser, cette fois, la « salampouff », le « vachardouillaud », le « sacribouillacastafouinouillard ! »
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De par toutes les provinces, les résistants noirs razzient des captifs noirs, et paient de cette monnaie, aux marchands, chevaux, poudre, armes, augmentant ainsi, par hordes, les colonnes incessantes du nombre des esclaves, tandis que, de leur côté, les Blancs gagnent du terrain. Tout est pris, saccagé, volé - et les captifs, au nombre de huit mille environ, sont rassemblés en un troupeau dont le colonel commence la distribution. Il écrivait lui-même sur un calepin, puis y renonçait, clamant: " Partagez-vous cela !" Et chaque Blanc obtint plus de dix femmes noires à son choix. Retour au quartier général en étapes de quarante kilomètres avec les captifs. Enfants, malades ou invalides: tués à coups de crosse et de baïonnette. Et leurs cadavres, laissés au bord de la route. Une femme est trouvée accroupie. Elle est enceinte. On la pousse, on la bouscule à coups de genoux. Elle accouche debout en marchant. A peine coupé le cordon et jeté, d'un coup de pied, hors de la route, l'enfant, l'on avance, sans s'inquiéter de la mère hagarde qui boitille, délire, titube, vagissant, puis tombant, cent mètres plus loin, écrasée par la foule. (p.57)
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C'était un an et trois mois plus tard -13 juillet 1910. Arrivés depuis cinq jours au Nakem, trois étrangers, une famille d'allemands: Fritz Shrobénius, sa femme Hildegaard, leur fille Sonia [...] ces explorateurs-touristes étaient ethnologues et voulaient acheter trois tonnes de vieux bois à prix d'or, amassant masques nègres à profusion [...] Gesticulant à tout propos, il (Shrobénius ndlr) étalait son "amitié" pour l'Afrique et son savoir orageux avec une assurance de bachelier repêché. Il considérait que la vie africaine était art pur, symbolisme effroyablement religieux, civilisation jadis grandiose- hélas victime des vicissitudes de l'homme blanc [...] Il exploita la sentimentalité négrillarde par trop heureuse de s'entendre dire par un Blanc que 'l'Afrique était ventre du monde et berceau de civilisation.'' La négraille offrit par tonnes, conséquemment et gratis, masques et trésors artistiques aux acolytes de la "schrobénhisologie." Ah... Seigneur, une larme pour la mentalité si célébrement bon enfant de la négraille ! Seigneur... par pitié ! [...] De même, ethnologue rusé, avec la collection achetée à Saif et celles que ses disciples avaient ramenées gratuitement du Nakem, il vendit plus de mille trois cents pièces aux tiroirs caisses suivants: musée de l'homme à Paris, musées de Londres, de Bâle, de Munich, de Hambourg, de New-York, louant des centaines d'autres pièces pour divers droits: de reproduction, d'exposition, etc.
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Ils étaient l’un près de l’autre, le regard autour des souvenirs, la bouche tendue : et ils tétaient avec lenteur entre leurs lèvres palpitantes, le silence. Le bras de Kassoumi fit le tour de la taille de Tambira, l’enserrant d’une pression douce. Elle prit, sans colère, cette main, l’éloignait sans cesse à mesure qu’il la rapprochait, n’éprouvant du reste aucun embarras de cette caresse, comme si c’eût été une chose naturelle qu’elle repoussait aussi naturellement. Elle écoutait l’oiseau, perdue dans une extase. Envahie de désirs infinis de bonheur, de tendresses soudaines qui l’irradiaient – révélations de poésie insoupçonnée – elle frémit d’un tel amollissement des nerfs et du cœur qu’elle pressa fort la main de l’homme, qui, à présent, la serrait contre lui ; elle ne le repoussait plus, n’y songeant pas.

Ils restèrent quelque temps ainsi. La femme se taisait, pénétrée de sensations très douces. La tête de Kassoumi reposait sur son épaule ; brusquement il lui baisa les lèvres. Elle eut une révolte furieuse, et, pour l’éviter, se jeta sur le dos. Il la culbuta. Mais elle rabattit vite son habit sur sa cuisse, voulut fuir. Il s’affala sur elle, la couvrant de tout son corps, griffé, tambouriné, harcelé par le cuir des seins et la poitrine orageuse de la femme. Il poursuivit longtemps cette bouche qui le fuyait, puis, la joignant, y noua la sienne. Alors, affolée, elle le caressa, lui rendit, lui labourant les reins, son baiser ; et, flancs gonflés, tout envahie d’un délicieux sentiment de défaite, sa résistance, elle la sentit, comme écrasée par un poids trop lourd, tomber…
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