rien à leur dire rien à leur dire rien.
Louise dormait, paisible, un peu pâle, ma fille, ma petite, la même que j'avais regardée partir de la fenêtre ce matin pour se rendre à l'école. J'avais beau me raisonner, je n'arrivais pas à y croire. Yannick se tenait derrière moi, lointain, silencieux. On n'osait pas se regarder. Je me suis remise à pleurer, doucement. Yannick m'a prise dans ses bras. Je suis sortie de la chambre à contrecoeur.
Je suis seule dans cette chambre où tu n'es pas. Seule dans mon corps,seule dans ma tête, et pourtant nous sommes deux.Tu dors sans doute un peu plus loin, ailleurs, je ne le sais pas, je ne sais pas encore que tu existes, je suis fatiguée, ma tête est lourde. J'ai peur.
Comme si c'était trop dur d'admettre que la vie n'est qu'affaire de hasard.
Ils exigeaient des justifications, des vraies, des tangibles, des explications limpides sur ces mois d'attente où je n'avais rien attendu. Je devais malgré tout en savoir quelque chose, malgré tout, j'avais du sentir, percevoir, deviner et je l'avais caché, enfoui, dissimulé, sans le vouloir, certes, mais il y avait forcément eu des signes que j'avais étouffés, des signes de cette vie qui grandissait en moi, car enfin sinon... J'avais des comptes à rendre, des mots à fournir parce que tout de même...
C'est le premier livre destiné aux ados qui a ma connaissance traite du déni de grossesse où tout du moins le premier que je lis. C'est un beau livre ou le sujet est traité avec beaucoup de délicatesse, il aurait cependant mérité d'être un peu plus approndi et j'ai trouvé que l'héroïne était bien seule pour affronter sa situation, ce livre a néanmoins le mérite d'exister.
Je sais que tu as voulu la vie, ça me donne la force de continuer la mienne.
Il fallait que je disparaisse pour le laisser grandir. J'ai l'impression que, parce que je suis loin, quelque chose est devenu possible. En attendant ce jour où il voudra bien me rencontrer. Et s'il ne le veut pas, ce sera bien aussi.
A quoi ça sert la vérité si la vérité fait si mal ?
Rien ne reste aujourd'hui de l'innocence qu'on arborait ce matin-là. Comme si nous avions brusquement arraché nos masques d'enfants sages, ce n'était plus un jeu, la vie en vrai nous a sauté au visage, on est devenus grands, capables de faire des choix, des bons et des mauvais, d'être courageux, lâches, lucides ou hypocrites, insolents ou soumis, des hommes honnêtes ou des monstres.
Ou tout ça à la fois.