A mesure que je respire, le silence atténue l'explosion d'étoiles dont les retombées crépitent encore dans ma tête.
Ma cheville est scellée, pied et jambe à angle droit.
Je la coltine comme un poids, à la verticale, elle bascule dans la pierraille et la griffe des buissons.
La nuit est opaque.
p 17
Ma liberté neuve m'emprisonne et me paralyse.
(p.60)
…lui
moi…
Pour la première fois, je n’ai pas envie de connaitre la fin, ni même la suite de cette aventure.
Cette minute est vraie et vivante, je l’étire en éternité…
Je crois qu'à l'hôpital, on aime assez exhiber ce qu'on a de plus laid : c'est à qui aura la plus effroyable couture, avec le plus grand nombre de points de suture, le plâtre le plus volumineux, l'extension la plus pesante.
Merci Julien d'avoir su me faire si mal.
Je suis comme ces femmes
dont je méprisais
le pouvoir mendiant,
les attachements
et les servilités forcenées.
Maintenant, c'est moi
qui renifle tes liquettes.
(p.205)
Oh Julien… je t’aime.
Moi, j’aime que ma mère…
Je renifle Paris, je me planque en son cœur, je suis revenue.
Je reviens avec des décombres de moi-même, pour recommencer à vivre et à me battre.
Je rampe. Mes coudes deviennent terreux, je saigne de la boue, les épines me percent au hasard des buissons, j’ai mal mais il faut continuer à avancer.
Je me doutais bien de ce que j'allais entendre, mais je ne savais pas
que la réalité des mots était si douloureuse, surprenante,
comme un coup de flingue, assommante, imprévisible :
tant que les femmes, ou la femme rôdaient autour de Julien
comme des ombres sans nom et sans consistance,
le rire de ma foi et de ma jeunesse en avait eu raison,
elles passaient à travers moi sans me faire trop mal :
baise-les, Julien, t'as raison, baise-les toutes.
Mais je n'ai pas l'armature d'un confesseur,
je n'ai pas à comprendre ni à pardonner, je n'ai qu'à essayer
de canaliser cette haine, cette férocité qui sont nées, qui bouillonnent
et débordent à présent par mes yeux,
me donnant envie de hurler, de tordre, de torturer.
(p.200)
La route est pure et âpre comme un désert.
Plus tard, peut-être, calmement,
nous aborderons les sentiers magiques.
(p.123)