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Citations sur Bientôt minuit (12)

Retomber en enfance avant de mourir, encollé dans les souvenirs, peut-être est-ce la seule façon qu’a trouvée le cerveau humain de s’apaiser, chacun passe de l’autre côté avec une once de douceur, on garde le meilleur, l’ingénuité de la vie au creux des mains, oiseau fragile, magique, sublime, moiré, on traverse et on ne sent presque rien, oui, ça doit être ça.
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Elle avait raconté à sa petite sœur que les oiseaux n’habitaient pas vraiment leur monde. Eh ben où ils habitent, alors ? Ils se tiennent à la frontière de deux mondes, tu comprends ? Une aile chez nous, une autre dans une dimension où le temps n’est pas le même : plus rapide, plus condensé, ils fusent, pouf ! J’te crois pas, tu racontes que des carabistouilles ! Puisque je te le dis ! Je t’emmène si tu veux, c’est au fond du jardin ! Nan ! Maman ! Emma elle veut m’emporter dans une autre dimenxion !
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Le lit mortifère est une brise qui caresse les cheveux, discrète, par petits à-coups doucereux, surtout quand la chaleur moite fait transpirer. On finit par l’oublier et alors elle harponne, entraîne vers le fond, là-bas, dans le noir que les bruits extérieurs n’atteignent pas. Le lit est une région de l’enfer déguisée en jouvencelle aguicheuse. Dans ses bras, Lucien se perd, il a peur de ne plus retrouver son chemin vers la réalité.
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- T'as oublié ton sonotone ou quoi ? Est-ce-que-tu-fais-sous-toi ? articule-t-elle en haussant le ton. Tu pisses ? Tu chies dans ton lit ?
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Sa vie est un rouleau de scotch vide.
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Il a dix-neuf ans, il est majeur. Il est en bas des marches, pourvu qu’il grimpe doucement, pourvu que le monde ne soit pas trop vicieux avec lui. La dernière fois qu’elle l’a vu, c’était il y a un an, il est venu avec des jacinthes, je sais pas quelle couleur elles sont, c’est grave ? Il préparait ses partiels. Il a le nez compact de Christophe, son implantation de cheveux basse qui mange le front, la forme de ses sourcils, droits et tombants, le regard triste malgré les pupilles qui crépitent. Un seul fils, un seul petit-fils, une petite-fille, une belle-fille, la famille d’Emma ne s’incarne même pas sur les doigts d’une main. Mieux que rien.
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L’habitude remonte à l’enfance. Une porte ouverte, même entrebâillée, et son âme risquerait de prendre la poudre d’escampette. En revanche, elle dort la fenêtre ouverte, sinon elle étouffe. Dehors, il fait trop chaud, venteux, glacé, pluvieux, aride. Jamais son âme n’aura envie de s’y perdre. Implacable illogisme, elle en rit, les superstitions supportent toutes les entourloupes au bon sens.
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Pas de regret, le regret rend amer, elle a pris la meilleure décision, la seule possible, elle a sa vie, les filles, Nicolas, ça a été difficile ces dernières années, les dettes, cette connasse de banquière qui lui parle comme si elle avait quatre ans, vos découverts sont importants, madame, il va falloir vous ressaisir, c’est par les cheveux que je voudrais te saisir, avec tes petits airs, ils ont remonté la pente, mais vendre la maison paternelle est son salut. Son père sur les bras, au quotidien, son père qui perd la boule, fera sous lui bientôt, elle l’aime, mais n’a pas le courage.
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Elle a huit ans, peut-être neuf. Une myriade de mèches brunes s’échappent de sa couette et dansent sous les rafales. Elle a poussé son vélo au sommet de la colline du Singe bleu. Il n’y a jamais eu de singe bleu sur la colline, mais Lucien en aime le nom, la consonance moite, fougères, lianes, mousse, entrelacements, le voyage en deux mots, le lointain qui caresse, la langue qui divague. La butte domine le lac artificiel où ils se promènent en famille, le dimanche. Jeanne et Daphnée sont grandes déjà, parties peut-être, occupées en tout cas. Valérie est rouge de l’effort, elle se cramponne au guidon. Il crie :
— Vas-y !
Elle attend.
— Vas-y, chérie !
Elle monte sur le vélo.
— Vas-y, Valérie !
Elle attend encore, et puis d’un coup, se jette en avant. Ses petits pieds ratent d’abord les pédales, moulinent deux secondes dans le vide, trouvent le métal, se posent dessus, le vélo plonge, Valérie s’accroche, tout tressaute, ses cheveux, la couette qui rebondit et ses joues dodues agitées de tremblements.
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Il est du devoir d’Emma d’informer son prolixe interlocuteur qu’« au jour d’aujourd’hui » n’appartient pas à la langue française, mais le vendeur a déjà enchaîné, emporté par sa logorrhée comme un cavalier par sa monture, la voix aux antipodes de la placidité sensuelle de Lucien, le timbre posé qui la faisait trépider toute entière.
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