il ne pouvait réussir un tel coup sans avoir en mains son propre fusil, c’est pourquoi la valise qui contenait son arme avait suivi tout ce circuit depuis l’Irak jusqu’à Paris, via les réseaux de Khalid Alzadi
Seuls ceux qui avaient quelque chose à cacher avaient peur, peur de craquer, de ne pas être à la hauteur.
Mais en politique, rien de tel que les actes pour juger. Les mots avaient le pouvoir de perdre de leur substance, au détour des opportunités et des rivalités.
C’est donc naturellement qu’elle avait décidé de consacrer son temps et son énergie aux autres, et en particulier à ceux qui, comme le sans-papiers qui l’avait sauvée cette nuit-là, n’avaient plus rien. Elle se sentait redevable. Elle voulait expier sa faute, celle d’être riche, d’être née au bon endroit, d’avoir tout et de ne désirer finalement rien.
Elle n’aimait pas les mondanités, et se sentait toujours étrangère à ces soirées où l’on se devait de rencontrer le plus de gens possible, pouvant ensuite servir de tremplins de carrière. « Pas mon truc ! » se dit-elle en essayant de trouver un endroit tranquille.
Nombreux étaient les sans-papiers à participer aux chantiers dans la capitale. Les chefs de travaux faisaient le point et chaque matin, sélectionnaient la main-d’œuvre non déclarée dont ils auraient besoin pour la journée. Pas de contrat, pas de discussion. Quarante euros pour une journée de travail de douze heures. À prendre ou à laisser. À peine de quoi survivre, car tous les trois envoyaient la moitié de leur paye au pays pour aider leur famille. Une vie sans bruit, dans laquelle il fallait rester invisibles, prisonniers d’un monde qu’ils avaient imaginé meilleur de ce côté-ci de la Méditerranée.