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3,29

sur 71 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
**,*

Antoine a 43 ans, il est directeur général dans une belle agence de publicité. Il aime ce qu'il fait, à Paris, cette ville dans laquelle il se rend au bureau à vélo. A la maison aussi, tout est à son bonheur : sa femme, son pilier depuis 20 ans, et leur deux enfants. Mais sa vie n'est pas aussi lisse. Véritable prédateur sexuel, il aime les femmes, les dominer, qu'elles lui appartiennent... Les forcer aussi, parfois. Et ces petits jeux malsains vont causer sa chute...

Christophe Perruchas n'a pas choisi la simplicité pour son premier roman. Mettre ses lecteurs dans la peau de cet homme est plutôt inconfortable et dérangeant. Évoluer dans cet univers dangereux et sombre n'est pas des plus plaisant...

Mais l'auteur a sacrément du talent ! Parce qu'on ne lâche pas le livre, on s'attend au pire mais on s'étonne tout de même de cette chute.
Le roman est court. L'auteur ne s'épuise pas à nous décortiquer l'âme et la pathologie d'Antoine. Pas de jugement, quelques détails salaces histoire qu'on le déteste vraiment...

Et puis ces courts intermèdes. Ceux qui montrent l'autre facette de ce prédateur, de ce père et mari aimant... Loin d'atténuer notre dégoût, ce portrait est encore plus glaçant. Car Antoine, finalement, peut être n'importe qui...

Merci aux 68 premières fois de m'avoir fait découvrir cette lecture vers laquelle, c'est sûr, je ne serais jamais allée seule...
Lien : https://lire-et-vous.fr/2021..
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L'idée d'être dans la tête d'un prédateur sexuel était plutôt intéressante, mais certains passages du livre m'ont dérangée. C'est donc l'histoire de Antoine, la quarantaine, une femme qu'il aime et deux beaux enfants. Il travaille dans une agence de pub.
Il est heureux en famille et le montre sur les réseaux sociaux. Les likes et les coeurs affluent sur sa page, mais Antoine aime un peu trop les femmes et se fait des films dès qu'il en rencontre une.
Dans une boîte de pub, tout le monde observe et tout se sait. Antoine, cadre responsable a signé une charte anti-harcèlement. C'est l'aire # me too et bientôt, il sera pris dans l'engrenage suite à une plainte déposée, ce qui entraînera d'autres dénonciations.
Antoine va-t-il s'en sortir ?
L'auteur a travaillé dans le milieu de la pub et cela se ressent dans son roman que l'on peut également comparé à 99 f de Beidbeger. Un roman qui ne peut laisser indifférent, le sujet qu'il aborde est bien d'actualité.
Merci aux 68 Premières fois et aux Éditions La Brune le Rouergue de m'avoir permis de découvrir ce livre
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#MeToo #balancetonporc dans la com... #Livreànepasoffriràbellemamansansunelecturepréalable...

Pour ce premier roman, Christophe Perruchas nous dépeint un univers où il a longtemps travaillé, celui de la communication et de la publicité.

Il met en scène un personnage, Antoine, un type âgé de 43 ans qui est un maître dans le milieu, mais pas seulement pour sa réussite professionnelle... Outre une façade d'un homme sympathique mais à l'humour un peu lourd, un père aimant et un mari attentionné, Antoine est une sorte de pervers sexuel qui ne voit le sexe féminin que comme une chair fraiche à consommer et à jeter après utilisation.

L'histoire se passe justement en 2017, je vous laisse imaginer la suite...et la chute...

Cet ouvrage m'a rendue assez perplexe et j'ai eu beaucoup de mal à accrocher. Pourtant Christophe Perruchas a réalisé un travail assez poussé pour nous faire entrer dans la tête de son personnage qui a une imagination plus que débridée. Je félicite le choix de la couverture que je trouve magnifique et qui parle d'elle-même. Celle-ci illustre parfaitement la relation de domination et de manipulation de notre personnage sur la gente féminine...

Ps: J'ai apprécié la petite note au début de l'ouvrage expliquant l'utilisation du gingembre dans la cuisine japonaise traditionnelle.

#68premièresfois
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Je ne suis pas sûr d'avoir aimé ce livre, si dérangeant, salves de branchitudes qui décrit à la première personne la descente aux enfers d'un quatra parisien, DG dans une grosse agence de pub.
Flow/flot de pensées syncopées , la lecture de ces huit tranches de vie séparées par ces désormais célèbres sept gingembres, est exigeante.
C'est à dire qu'on s'attend à une version 4.0 de Bret Easton Ellis mais , au final, ça tombe quand même un peu à plat.
Il faut avoir une solide culture générale et être ultra connecté ( Instagram, What's app, Snapchat , Discorde etc..) pour apprécier vraiment. On y croise Mark Zucherberg, on y boit du Coteaux du Larzac ( assemblage raffiné), on y prend de l'Olanzapine.
Du coup ce n'est plus si dérangeant que ça, c'est presque convenu, voir un peu ennuyeux.
L'épisode de Patmos résumerait le livre et se suffirait à lui-même...
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Antoine, sémillant quadragénaire, occupe un poste de directeur dans une agence de pub en vue. C'est un homme de son époque, emploi branché dans une boite de pub, fil d'actualité des réseaux sociaux qu'il sait utiliser à son avantage, Like et hashtags, il manie les technologies comme un pro et sait en tirer profit.

Dans sa relation avec les femmes il ose tout, harcèlement, drague, blagues vaseuses, réflexions désobligeantes, regards appuyés, rien ne lui fait peur puisqu'il s'arroge tous les droits. À l'heure de #metoo, ce genre ce comportement pourrait paraître obsolète, mais pour ce manager toxique, c'est normal. Les femmes sont des objets dont il apprécie les formes, la saveur, l'odeur. Il le leur dit, le leur écrit, et par ses regards concupiscents, leur montre clairement ses objectif sans aucune retenue. Jusqu'au jour où l'une d'entre elle se rebelle.

À ce parcours toxique viennent s'intercaler sept épisodes plus personnels. Des moments de sa vie de couple partagés sur les réseaux à bon escient pour s'attirer les bonnes grâces du cercle des proches et de tous ces faux amis qui viennent le voir évoluer derrière l'écran. Parade amoureuse, fierté de mâle qui exhibe son bonheur pour asseoir sa réputation.

Et pourtant, où se trouve la réalité de sa vie, puisque le roman débute avec un homme qui s'interroge sur sa vie d'avant, la normale, l'acceptée, sur sa futilité et son utilité, depuis sa chambre de l'hôpital psychiatrique sainte Anne, là où l'on tente de soigner les malades mentaux.

Un roman déroutant et intéressant tant par son écriture soignée, son rythme ni linéaire ni classique, que par les nombreuses questions qu'il soulève. il nous fait entrer dans les pensées de celui par qui le scandale arrive. Ce personnage principal que l'on a envie de détester. Ce mâle imbu de sa personne, à la personnalité difficile à décrypter, harceleur mais également mari aimant et père attentif. Ce collègue qui a largement dépassé les limites de la correction, prédateur sexuel ou ce fou qui se demande comment il en est arrivé là.
ma chronique complète est en ligne sur le blog Domi C Lire https://domiclire.wordpress.com/2021/08/05/sept-gingembres-christophe-perruchas/

Lien : https://domiclire.wordpress...
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Dans ce premier roman Christophe Perruchas se place dans la tête d'Antoine, cadre supérieur dans une agence de publicité et prédateur sexuel. A 43 ans il se sent vieux, le pauvre chéri qui a tout réussi jusqu'à présent. C'est un de ces hommes à l'humour lourd qui harcèle sans états d'âme toutes celles qu'il approche. Les difficultés économiques ne font qu'exacerber ses mauvais penchants. Les femmes sur sa route ne sont que des petits extras interchangeables et sans conséquences. Mais voilà, nous sommes à l'époque de MeToo et ce pervers narcissique n'a pas compris qu'il était temps de mettre un frein à ses habitudes de mâle dominant.
Le récit fait alterner des moments de vie décrits froidement, avec des coq-à l'âne saugrenus, comme le passage sur le lapin. C'est un constat clinique et cependant un peu fouillis, haché, que nous livre l'auteur. Il ne donne aucune circonstance atténuante à l'homme, par ailleurs bon père et mari correct. L'auteur étant lui-même un publiciste, il décrit un milieu qu'il connaît bien. Son personnage est représentatif de ces requins aux dents longues qui sont prêts à tout pour assouvir leur soif de pouvoir.
Ce roman est dérangeant. Je n'ai, bien évidemment, aucune mansuétude pour ce pervers à l'ego surdimensionné aussi aurais-je aimé que l'auteur soit plus incisif. Et puis j'ai trouvé la fin trop facile. Se réfugier en HP est une solution bien arrangeante, sans doute pense-t-il qu'à son réveil il pourra reprendre le courant de sa vie. La petite pilule rose qui va l'endormir ne réglera pas le problème de toutes les femmes qu'il a humiliées.
Sélection 2021 des 68 Premières Fois
Lien : https://ffloladilettante.wor..
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« Songe aux prédateurs. Les plus efficaces ne sont pas nécessairement ceux qui se jettent sur leur proie pour la capturer de force. Ils la traquent, l'appâtent et parfois la séduisent. » - Un stagiaire presque parfait, Shane Kuhn

« Je m'appelle Antoine, je vis depuis quelques semaines au milieu du 14e arrondissement de Paris, dans cet endroit que j'ai toujours regardé avec fascination avant d'avoir à y dormir. L'hôpital Sainte-Anne ne comporte plus aujourd'hui que deux pavillons dédiés à l'accueil permanent. »

Ce « je » qui nous parle avait tout : il portait beau la quarantaine, avait un job à responsabilité dans une agence de pub, une épouse aimante, deux enfants adorables. de l'argent et le pouvoir qui va avec.
Ce « je » a tout perdu. Dure a été la chute. Pourquoi ? Comment ?

Pour son 1er roman, Christophe Perruchas a décidé d'aborder de manière inattendue un thème très en vogue dans la littérature contemporaine : le harcèlement sexuel dans le milieu de l'entreprise. L'originalité vient du point focal : l'auteur place le lecteur dans la tête du prédateur. Cette position aussi ingénieuse que désagréable laisse augurer une lecture éprouvante d'un inconfort total. C'est là le véritable intérêt de ce roman, par ailleurs sans suspens aucun, puisque les premières pages annoncent la fin.

« Comment on franchit la limite ?
Dans ma vie d'avant, il n'y a pas si longtemps encore, je me suis parfois demandé pourquoi je n'étais pas où je suis maintenant, dans la salle de ce restaurant gris d'hôpital, gris, lui aussi, plutôt qu'au bureau, discussions anodines de machine à café, entouré de D.G.A. à la petite trentaine, en costumes bien coupés, sourires blancs, dents effilées, chauves-souris décharnées, nuances d'Hugo Boss. »

Sa vie d'avant, celle du dehors, celle d'avant la vie du dedans.
« Dedans », « Dehors » sont les seuls titres des chapitres qui vont alterner tout au long de ce court roman mené tambour battant par un flux d'écriture et de pensées inendiguable.
« Dedans », l'hôpital Sainte-Anne, un monde qu'il a découvert en rendant visite au frère de son meilleur ami. Un monde ouaté, où l'on peut (s')oublier, se laisser glisser, n'être plus qu'un parmi d'autres, un anonyme qui n'a plus de compte à rendre à quiconque.
« Dehors », le monde de l'agence de pub, celui de la compétitivité et de la compétition, un monde concurrentiel où tous s'observent, se j(a)ugent. Dans ce monde sans merci, Antoine évolue à son aise.

« Je suis embarqué dans cette guerre, économique, de tous les instants, je me bats pour des intérêts qui me dépassent, je ne me bats même pas pour moi, mais pour des gros types, chemises à manches courtes, qui s'encrassent les artères avec des barbecues et de la bière lite. Des retraités, paraît-il. de Wenatchee ou d'ailleurs. »

Fort de sa position, il lui est arrivé d'avoir des mots salaces et des gestes déplacés envers des femmes dont en fin observateur il a entr'aperçu les failles, et qu'il ne voit qu'en objet. En trophée ? Toujours aux aguets, les pensées scabreuses qui occupent constamment son esprit (au bar, au travail, dans le train…) ont souvent précédé l'acte.
Consenti ?

« Il est encore tôt, les bureaux sont presque déserts, je passe devant celui de Laura, je la salue d'une voix enjouée. Elle me rejoint quelques secondes plus tard. Contre la porte, mes paumes sur ses joues, furtivement, je lui prends la lèvre inférieure. Elle se laisse faire en fermant les yeux. »

La zone grise est un sujet délicat que Sept gingembres effleure maladroitement, puisqu'à aucun moment l'auteur ne laisse supposer que ces femmes ne sont pas consentantes. C'est là, précisément là, que Christophe Perruchas m'a perdue. Je n'ai éprouvé aucune empathie pour cet homme - c'est évident -, mais guère plus pour les victimes - ce qui l'est moins. Mais comment le pourrais-je quand je lis un passage tel que celui qui suit ?

« Je lui rembourse toujours la chambre, gentleman. La première fois où j'ai posé les 100 euros sur la table – on ne fait jamais de carte bleue, clandestins, c'est un peu ridicule, oui – elle m'a dit que ça lui faisait drôle de les voir là les billets, coincés sous le vilain sous-main en cuir grêlé ; qu'elle avait l'impression de se vendre. Je me souviens lui avoir demandé, en souriant, si c'était une sensation désagréable, pas vraiment, parce que ça n'est pas le cas, c'est même, je ne sais pas, un peu excitant de recevoir de l'argent pour ça. »

Comment sincèrement s'étonner qu'Antoine lance

« C'est devenu tacite, Laura est ma pute, on n'en parle plus jamais, je vois ça comme une façon de lui donner l'augmentation que le groupe lui refuse... Paradoxalement ça la libère, elle fait bien mieux la pute que les comptes-rendus de réunions. »

Oui, j'en conviens, c'est odieux, cru, dégoûtant, avilissant, et Antoine, prédateur incapable du moindre repentir, mérite d'être poursuivi quand l'une d'elles porte plainte. Tout comme il mérite d'être lâché dans la foulée par le président et pourtant ami, Frédéric Demazis soucieux de conserver un semblant d'intégrité à l'agence dont « le double motto Dare and Benevolence [...] est affiché en grandes lettres bleues, sur le blanc du mur ». Non, Antoine n'était pas seulement « lourd », il est bien pire que cela, et j'attendais d'autres barreaux que ceux de Sainte-Anne pour tout vous dire ! Pour autant, il m'est difficile de compatir au sort d'une Laura par exemple, autrefois si prompte à le relancer en lui envoyant des « miss you » par SMS et qui maintenant s'offusque :

« Et puis ça a commencé à devenir dégueulasse, je veux dire vraiment dégueulasse, ta politique des petits pas, de moins en moins là, tu me parlais mal en réunion, tu m'humiliais devant les autres. Et puis un SMS, j'étais ton jokari, plus tu tapais fort, plus je revenais vite. »

Pardon, mais suis-je la seule à trouver que c'était « dégueulasse » bien avant cela ? Suis-je trop bégueule ?

Si réussite il y a, elle est à chercher dans le parti pris narratif, l'écriture tranchante et elliptique, et la construction astucieuse de ce roman. le lecteur n'oublie jamais, pas une seule seconde, qu'il est dans la tête d'un homme abject qui, à aucun moment, ne se soucie de ce que les femmes peuvent ressentir. Il prend, il s'amuse, il jette en toute impunité. C'est dérangeant et glaçant, parce que sans filtre.
Les sept gingembres du titre sont d'habiles interludes qui trouvent leur place naturelle dans le récit.

« Dans la cuisine japonaise traditionnelle (Nihon ryōri) le gingembre est ce qui sépare les plats de poisson cru, ce qui permet au palais de retrouver une certaine virginité entre deux saveurs.
De réinitialiser, reset, l'ensemble du circuit rétronasal. »

De là à « retrouver une certaine virginité » entre deux chapitres nauséabonds, mieux vaut ne pas y compter ! On y découvre toutefois l'autre facette d'Antoine, père et mari attentionné. Sur les réseaux sociaux, il met en scène sa réussite professionnelle et son bonheur familial comme il le ferait pour le produit d'un de ses clients. le lecteur attentif notera toutefois que la longueur de ses publications, qui montrent un idéal savamment retouché pour faire moisson de like, emoji, coeurs et autres #, diminue au fur et à mesure que l'on s'achemine vers la fin du roman et que se scelle le sort d'Antoine : 3 pages, 1 page et demie, 1 page, une demi-page, 2 paragraphes, 1 paragraphe, quelques lignes... comme pour prédire sa faillite personnelle alors qu'il ne peut plus donner le change, que ses amis prennent leurs distances et que s'amorce la dégringolade. Inéluctable.

De cette lecture, je ressors perplexe, pour ne pas dire déçue. Quand j'en arrive à lever les yeux au ciel sur un sujet tel que celui-ci, c'est que quelque chose cloche, n'est-ce pas ?
Certes, Christophe Perruchas connaît très bien le milieu dont il parle, puisqu'il en vient. Il en connaît la langue et les codes. Il a un style particulier : son écriture est affûtée et son texte offre quelques trouvailles d'expressions tout à fait savoureuses. le lecteur est emporté dans le flux et respirer lui devient difficile. C'est oppressant et c'est très, très bien fait. En donnant la parole à cet homme haïssable qui prend de plein fouet la déflagration quand l'une de ses victimes appuie sur « #metoo le bouton nucléaire », l'auteur sort du point aveugle, lui préférant un angle nouveau qui manquait jusqu'à présent en littérature. du moins à ma connaissance.
Cependant, la frontière flottante que l'auteur dessine, comme à regret, presque avec réticence, entre victime et coupable m'a interdit de m'attacher à un quelconque personnage, et c'est peut-être ce qui m'a, somme toute, le plus contrariée avec Sept gingembres, dans l'air du temps certes, mais qui ne creuse pas assez son sujet.

1er roman, lu pour la session 2021 des #68premieresfois
Lien : https://www.calliope-petrich..
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Antoine, quadragénaire, marié, deux enfants, cadre dirigeant dans une grosse boîte de Pub, nous trimballe avec lui, à la façon d'une go pro, sur son vélo, au bureau, au café, dans son lit au réveil, en réunion, en séminaire…Le Je narratif nous immerge dans sa tête, son regard acerbe de prédateur et nous fait entendre, en plus de sa vie pulsionnelle sans détours, les dialogues, les confidences, les propos des collègues, amis, connaissances. le tout se mélange entrecoupé des scènes photographiées et postées sur réseaux pour récolter des émojis lesquels, plus ils seront nombreux, signeront LE bonheur sans faille à afficher.
Des dedans et dehors s'enchaînent là : un dedans qu'on fuit, qu'on méconnaît et qu'on craint comme la frontière à ne pas franchir et un dehors aux codes maîtrisés, partagés, qui confortent quitte à entretenir les faux-semblants, les hypocrisies et les jeux puissants, un dehors aux limites floutées, biaisées, tolérées et niées.
Je n'ai pas aimé cette lecture. Tout d'abord. J'ai re-feuilleté en bonne élève et de passage en extrait, j'ai été emportée par ma relecture, une relecture presque immédiate. Comme si lors du premier temps de découverte, je l'avais survolé : trop défendue, volontairement blasée devant une vulgarité qui m'est toujours difficile, alors même qu'elle dit beaucoup des éducations et autorisations implicites depuis trop longtemps intégrées…Comme si mes neurones s'étaient connectés et avaient réagi avec retard.
Tout ce bouillonnement de mots, pourtant énoncés dans la placidité écoeurante de notre personnage suffisant, ce foisonnement de scènes déjà vues, surfaites, grossières, familières, toutes devenues notre normalité, la normalité qui se déroule en toute impunité au milieu de nous…La marge, la porosité entre notre intime et notre incarnation, à travers toutes les balises, tous les pares-feux que l'on sait indispensables pour se tenir au monde et ne pas laisser voir les fêlures ; la perméabilité si frêle qui peut nous faire basculer en un rien, un souffle, vers un comportement abusif socialisé ou un lâcher prise marginal, inquiétant, jugé irraisonné, fou…sont manifestement bien démontrées dans ce roman assez inédit dans son traitement. Inédit et certainement dérangeant. Il n'est pas construit pour s'assurer la sympathie, ni l'empathie du lecteur, et l'aversion est même rapidement suscitée tant l'odieux s'affiche sans honte. Ce parti pris signe là la particularité de ce premier et représente peut-être le choix de l'auteur pour provoquer et bousculer le lecteur dans sa réflexion, sa perception. Les « tolérances » desquelles nous sommes complices, actifs ou non, en nous taisant, en minimisant, en détournant le regard ; le territoire de la folie, de la dérive à interroger comme une ultime tentative de fuite, d'échappatoire à une « réalité partagée » devenue absurde, violente, faussement cadrée, réellement abjecte…Ce roman nous oblige à tirer encore le constat, à nous rappeler encore que l'équilibre est précaire entre ce que l'on croit normal et ce que l'on redoute comme pathologique. Que tout est affaire de croyance distillée par les codes éducatifs, les dogmes dominants. Que nous réinitialiser comme on le fait d'un disque dur pourrait être intéressant, et…. réellement suffisant ?
A distance je me souviendrai de l'antipathie du personnage, de l'originalité de la narration et du cynisme héros, actuel qui courent les lignes, du cynisme roi peut-être nécessaire même si dérangeant pour fuir lâchement ou se protéger de la violence d'un monde ?
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Ce premier roman raconte la chute d'un quadragénaire, Antoine, directeur général d'une agence de publicité parisienne. Les chapitres alternent entre "Dedans" (dans l'hôpital psychiatrique de Ste-Anne où il rend visite au frère d'un ami d'enfance), "Dehors" (sa vie à l'agence, avec sa famille et ses amis) et les "gingembres". Christophe Perruchas explique en préambule que le gingembre dans la cuisine japonaise traditionnelle sépare les plats et "permet au palais de retrouver une certaine virginité entre deux saveurs. [...] Ici, les gingembres voudraient faire la même chose, mais, bien sûr, n'y parviennent pas."
Nous sommes en pleine vague MeToo. Antoine reçoit la visite d'un inspecteur du travail. Il mène une enquête pour harcèlement moral suite à une tentative de suicide de la directrice commerciale, Léa, 32 ans. Pendant cet entretien, Antoine va fixer l'inspecteur du travail, le déshabiller du regard. Chaque femme qu'il croise dans la rue ou en réunion, il la détaille physiquement, décrit au lecteur ses fantasmes. C'est un homme de pouvoir, obsédé et totalement dans le déni de son attitude perverse.
"Il n'y a pas de harcèlement ici et il n'y en aura pas. On règle les choses entre gens civilisés, on trouve des solutions humaines."
Au début, son patron le soutient :
"Je te connais Antoine, je sais comme tu peux être lourd en fin de soirée, comme tu aimes les femmes, comme tu te sens bien dans l'ambiguïté. Mais de là à t'accuser de harcèlement, au pire, une vanne toute naze, qui tombe à plat, on n'est plus en 95, parfois ça passe mal. Mais harcèlement, non."
Il a une femme et deux enfants, une vie très instagrammable. Mais peu à peu il sent qu'il se déconnecte du monde qui l'entoure et n'écoute que la voix dans sa tête. de l'extérieur, personne ne remarque ses absences. Il sait donner le change lors des réunions. Il y a beaucoup d'anglicismes et de jargon liés au métier d'Antoine, surtout lorsqu'il se rend à un salon professionnel ou un séminaire. le monde de l'entreprise et le milieu de la publicité en prennent pour leur grade. Christophe Perruchas est d'ailleurs issu de ce milieu.
Antoine entretient une relation avec sa secrétaire qui n'arrive pas à croire les choses horribles qu'on raconte sur lui. Il lui répond que tout est faux et disproportionné.
"L'époque est pourrie, on ne peut plus rien dire, même les écrivains sont emmerdés, scrutés, jaugés, tu sais qu'il existe des sensitive readers, des lecteurs des minorités qui lisent à la chaîne et qui font des rapports"
Les chapitres s'enchaînent et on se laisse happer par l'histoire de ce prédateur sexuel. Après avoir refermé le livre, je ne saurais vous dire si j'ai aimé ce livre ou pas. J'ai certainement été perturbée de me retrouver dans le flot continu des pensées obsessionnelles de sexe de ce personnage antipathique. Un roman intéressant, dérangeant, bien écrit, mais pas un coup de coeur pour moi. En tout cas il sonne juste et ça n'en est que plus troublant.
Merci aux 68 premières fois pour cette lecture.
Lien : https://joellebooks.fr/2021/..
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Antoine est directeur général d'une agence de publicité.
Brillant, aimable, il est marié et père de famille investi.
Mais également prédateur sexuel dans ce monde de requins.
Cependant, le vent tourne ...
Tout n'est plus permis.
Premier roman qui décrit bien le monde machiste des entreprises, démodé et plus d'actualité.
S'il est toujours utile d'en parler et de dénoncer ces pratiques, ce roman m'a un peu déçue par sa construction et son style très particuliers.

Sept gingembres
Christoph Perruchas
Ed : la brune au rouergue

Lu pour les 68 premieres fois
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