Quatrième enquête de William Monk.
Callandra Daviot (voir Un étranger dans le miroir) contacte William Monk suite à la découverte dans une goulotte à linge du Royal Free Hospital du cadavre de Prudence Barrymore, ancienne infirmière de Crimée retrouvée étranglée. Cette demande a aussi pour but caché de protéger un des médecins étrangers qu'elle admire secrètement : Kristian Beck. Afin de seconder notre détective, Callandra fait également appel à Hester Latterly afin que celle-ci puisse mener discrètement quelques investigations au sein même de l'hôpital.
Rapidement, les soupçons se tournent vers Sir Stanhope, éminent chirurgien. Des lettres écrites par la victime laisseraient entendre une romance.... Seulement, les apparences sont parfois trompeuses...😏
Incontestablement, Anne Perry possède une plume incroyable et sait comment garder son lecteur sur le qui-vive jusqu'à la dernière page. Un vrai régal à lire. 😍
À travers ce quatrième opus des enquêtes de William Monk, Anne Perry aborde sans concession la place des femmes dans cette société anglaise très moralisatrice et qui pourtant cache bien des horreurs sous un vernis d'aristocratie. Ce roman s'ouvre au départ sur une enquête de viol dans la haute société pour ensuite découler vers l'intrigue principale, celle d'un assassinat au sein d'un établissement hospitalier. L'intrigue est maîtrisée et le lecteur complètement captivé par un scénario intelligent et humain.
Comme toujours, le grand plus de cette intrigue revient au découpage de l'intrigue en deux temps : l'enquête menée par Monk conduisant à l'inculpation d'un suspect ; et, le procès mené tambour battant par Oliver Rathbone qui utilise sa rhétorique pour faire parler les témoins. Dans celui-ci Rathbone va se surpasser. 😉
Les personnages récurrents de la série sont indéniablement un des grands points positifs de cette série. le trio Monk/Hester/Rathbone est d'une fraîcheur et par moment d'un humour incroyable. de plus, ce quatrième ouvrage permet à William Monk de comprendre une partie de son passé, concernant la terreur qu'il a pu inspirer à ses anciens collègues.
Les autres personnages ne sont pas en reste. Nous avons au travers des différents protagonistes, une description de la société aristocratique avec ces messieurs imbus de leurs personnes, ces dames moralisatrices et détachées de la réalité et, une description plus crue grâce notamment aux infirmières travaillant au sein de l'hôpital.
Sans contestation possible, le grand atout de cette série se trouve également dans les aspects historiques évoqués et dénoncés.
Ici, Anne Perry dénonce sans sympathie la place des femmes dans cette société anglaise patriarcale où la femme n'est qu'un objet de reproduction et de paraître. L'homme peut prendre son plaisir quand bon lui semble voire même se permettre quelques abus du moment que tout cela se fasse discrètement. La société ne veut pas entendre parler de viol au sein de la famille même, des grossesses à répétitions entraînant parfois la mort des femmes.
Dans ses conditions, les femmes en sont réduites à des solutions extrêmes. Et même là, la classe sociale intervient. Ainsi, pour un avortement, une femme de bonne famille le fera faire par un chirurgien lui détectant une "tumeur" et avec un minimum de soin , alors qu'une femme anglaise sans ressources se retrouvera à faire appel à une faiseuse d'ange exerçant à l'arrière d'une boucherie par exemple et dans des conditions hygiéniques déplorables.
Anne Perry prend également sa plume pour nous décrire les conditions de travail dans les hôpitaux de l'époque et les méthodes de soin employées. Sans hésitation, vous apprécierez notre époque.😀
Les hôpitaux de l'époque sont des mouroirs. Les conditions d'hygiène sont inexistantes avec des chirurgiens opérant les patients les uns à la suite des autres dans les mêmes vêtements; des soins postopératoires se résumant à attendre de voir si le patient survit ou pas. le personnel infirmier est effrayant puisque les infirmières ne sont pas formées aux soins : souvent ces femmes sont des alcooliques, des femmes pauvres n'ayant trouvé que ce travail.
Au cas où vous auriez un doute : j'ai adoré !!
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La nouvelle cliente qui se présente, vient de la part de Lady Callandra. Mrs Julia Penrose raconte à William Monk, enquêteur privé, une affaire très délicate qui concerne sa jeune soeur Marianne Gillepsi. Il est impensable de faire appel à la police et il est inconcevable d'oublier… La douce Marianne a subi une agression sexuelle dans le pavillon du jardin de leur demeure et elle est incapable de se rappeler les faits, ayant effacé de sa mémoire ce traumatisme.
L'enquête ne doit plus tarder et se mener en toute discrétion car le scandale entacherait la réputation de Marianne… Même Mr. Penrose ne doit rien savoir.
Monk, se faisant passé pour l'ami d'un lointain cousin, questionne finement l'entourage proche des deux soeurs, voisins et domestiques, et s'entretient longuement avec la jeune fille. Très vite, il ne peut s'empêcher d'éprouver un malaise et imagine une trame bien cruelle, se doutant que les répercussions seraient encore plus dramatiques si ses conclusions venaient à être divulguées…
Lorsqu'il se confie à sa bienfaitrice Lady Callandra, Monk se sent plus apaisé, sauf lorsque Hester Latterly est présente ! La première est devenue une amie, la seconde est une épine qui ne cesse de le darder mais aussi de le stimuler…
« … Enfin, Callandra reposa sa cuillère.
- Avez-vous vu Hester récemment ?
- Non.
Elle eut un sourire amusé. Agacé, il éprouva le besoin de poursuivre.
- Non, je ne l'ai pas vue, déclara-t-il. Et je m'en porte très bien. La dernière fois, nous nous sommes séparés sur des propos qui étaient loin d'être aimables. C'est la femme la plus acerbe et la plus imbue de ses opinions que j'aie jamais rencontrée ! Elle est dogmatique et ne juge pas utile d'écouter les autres. Et elle est si contente d'elle-même que cela la rend insupportable… »
Lady Callandra est devenue administratrice du Royal Free Hospital. Bénévole déterminée, elle souhaiterait changer les conditions de travail du personnel soignant. le manque d'hygiène, la formation des infirmières, la considération du patient, le traitement de la douleur, beaucoup de points seraient à réformer. Parfois en désaccord avec le médecin chef Sir Herbert Stanhope, elle se tourne vers Kristian Beck, un médecin originaire de Bohême, qui est un homme humain, sensible et généreux.
C'est en voulant aider une lingère à dégager un conduit de la blanchisserie, que tous deux découvrent le cadavre de l'infirmière, Miss Barrymore.
Miss Barrymore était une infirmière respectée et appréciée. Jeune femme qui avait suivi Florence Nightingale en Crimée, elle était revenue forte de son apprentissage et de ses désirs d'améliorer le système hospitalier.
L'affaire est confiée à la police, l'inspecteur-chef Runcorn assisté de ses adjoints le sergent Evan et l'inspecteur Jeavis… mais Lady Callandra n'a guère confiance. A titre privé, elle préfère soumettre l'enquête à Monk et contacter Hester pour l'aider dans son investigation. Hester, ancienne camarade de Miss Barrymore, assurera le remplacement et jouera les espionnes.
Qui a étranglé Miss Barrymore ? quel est le motif ? Et si par un incroyable hasard, les affaires Gillepsi et Barrymore se mêlaient ? Bientôt un autre personnage entre en scène… l'avocat Oliver Rathbone.
Afin de rendre justice, pour la quatrième fois, le trio se ressoude.
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Pour le quatrième tome des enquêtes de William Monk, on se retrouve dans les couloirs d'un hôpital et non pas dans ceux des demeures aristocratiques. L'auteur avec son talent habituel, nous décrit la misère, la vétusté, de l'hospice public et des soins prodigués. Au XIXème siècle, la médecine moderne commençait à se profiler, révolutionnant des pratiques et les consciences, mais certains dogmes demeuraient inébranlables. Les femmes ne pouvaient prétendre pratiquer la médecine, elles étaient considérées comme inférieures aux hommes et sans faculté. Au retour de Crimée, Florence Nightingale et d'autres femmes de son acabit ont changé la profession, lui offrant une évolution capitale.
Cette série est passionnante pour trois raisons…
- les intrigues, toujours bien tissées, surprenantes et captivantes,
- l'époque, voyage dans l'Histoire victorienne,
- et les personnages récurrents, tous sympathiques et fascinants. Leur évolution personnelle contribue à rendre la lecture plus fluide, plus agréable, car les thèmes abordés sont particulièrement durs et affligeants.
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