Citations sur Promenade à Xian (22)
Les centaines de milliers de réfugiés de par le monde ne sont pas tous des "salauds" , des "réactionnaires", des "impérialistes".
Jusqu'à présent je n'ai rencontré aucun Chinois qui m'ait parlé avec cynisme mais j'ai l'impression que ce que cherche aujourd'hui la population c'est de vivre après avoir survécu. Vivre, apprendre, sortir de la pauvreté, découvrir le monde industrialisé, être mieux logé, pouvoir acheter davantage et parler moins de politique. Quelle avidité de connaissance ! (p. 82)
Comme toujours avec les Chinois quand il s'agit de sentiment, on effleura le souvenir et l'absence plutôt qu'on ne les nomma mais les yeux brillaient et l'émotion était si évidente que je comprenais les paroles avant d'entendre leur traduction. (p. 94)
La sonnette des vélos est devenue un des bruits de Pékin. (...)
Les cyclistes, les bras tendus, le dos blancs. Ils sont sérieux, attentifs à protéger cet objet précieux qui évite la marche trop longue, l'autobus surchargé et permet un individualisme autorisé et cher au coeur de tout chinois. (p. 26)
En regardant les deux visages souriants du jeune couple emportant la télévision, je pense à la F.N.A.C. de la rue de Rennes, à la richesse que représente une telle profusion de livres, disques, radios, télévisions, magnétoscopes, électro-ménagers, etc., et à la foule des clients qui choisit, emporte, signe les chèques. Richesse et tolérance. Un Chinois transporté rue de Rennes croirait rêver. (p. 31)
Comment parler de ce que la misère fait de nous quand on ne l'a pas soi-même connue. (p. 129)
J'ai déjà dit que tout le monde, en Chine, se photographie. On ne se mitraille pas, chaque photo est longuement préparée, cadrée. C'est un acte d'amour. Je me suis assise sur une pierre au bord du lac et j'ai regardé un jeune couple (...)
Enfin la mise en scène dut leur paraître au point, il tourna une dernière fois autour d'elle, vérifia dans l'objectif que l'effet recherché était atteint : ils continuaient à dialoguer par petites phrases, elle se prêtait à ses désirs, et je me suis demandé si je n'assistais pas à un jeu érotique, peut-être le seul permis. (p. 75)
Chaque Américain a son Chinois interprète ou guide, souriant, affable. Que pense-t-il de ces Blancs expansifs, qui lui tapent dans le dos et lui proposent un cigare ? Extraordinaire de voir face à face les derniers rejetons de la plus vieille et de la plus jeune civilisation. On est toujours le Barbare de quelqu'un. (p. 35)
A l'heure même où je respirais avec allégresse les larges et invisibles lames de vent, combien d'hommes, prisonniers politiques, déportés chinois et soviétiques, construisaient des ponts, ouvraient des routes et des voies de chemin de fer qui seront montrés plus tard comme preuves du développement sous Mao, Staline ou Brejnev ? (p. 15)
- Ce n'est pas exactement cela que je voulais dire. Le capitalisme avec ses défauts de moralité, de mentalité, son esprit uniquement tourné vers le profit possède néanmoins un extraordinaire pouvoir de création, un esprit de créativité qui est dû en partie à la compétition. La Chine ne pourrait-elle pas être le pays qui allierait ces qualités-là à ce qui devait être l'exigence humaine et morale du socialisme ? (p. 70)
Si j'étais chinoise que me serait-il arrivé pendant la Révolution culturelle, aurais-je été exécutée ou emprisonnée comme "mauvais élément" ? Ou encore envoyée dans une commune populaire pour être "rééduquée" par les paysans ? Mes enfants auraient-ils fait partie des gardes rouges les plus radicaux ? Pourrais-je vivre dans la société chinoise ? J'ai acquis tant de méfiance vis-àvis des vues "globales", prétendues objectives, où l'on prône pour les autres un monde dans lequel soi-même on ne pourrait , on ne voudrait vivre.(p. 81)