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Critiques filtrées sur 1 étoiles  
C'est avec beaucoup de rage en moi que j'écris l'article du jour. J'ai longtemps hésité avant de le faire d'ailleurs. Je suis tellement remontée que j'ai un peu peur d'y aller trop fort. J'ai même attendu un certain temps avant de l'écrire, pour laisser les émotions retomber. Rien n'y fait, ce livre me hérisse toujours autant le poil, et c'est aussi pour ça que je dois vous en parler. Et après tout je suis maintenant professeure documentaliste, c'est donc aussi normal que je ne veuille pas que certains livres tombent entre les mains des élèves qui me font confiance pour leurs lectures, d'autant qu'une de nos missions est d'éveiller leur esprit critique.

Pourquoi les riches sont-ils de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres ? est à la base un livre qui paraît tout à fait sympathique, qui révèle une promesse de vouloir faire comprendre pourquoi il y a tant d'inégalités sociales et comment on pourrait y remédier. En voici la quatrième de couverture : « Pour tout savoir sur les riches et l'origine de leur fortune, pour comprendre que la richesse et la pauvreté n'ont rien de naturel, pour voir le monde tel qu'il est et avoir envie de le changer… Un premier manuel de pensée critique clair et engagé à mettre entre toutes les mains, de 9 à 99 ans ! »

Un résumé enthousiasmant avec lequel on se dit « chouette, moi qui n'y connais rien en politique, je vais m'éclairer un peu l'esprit ». Sauf que c'est un résumé quelque peu mensonger. ABSOLUMENT EN RIEN ce n'est un manuel de pensée critique. Les auteurs ne sont ABSOLUMENT PAS objectifs et déversent leur bile et leur mépris vis-à-vis de la classe de ceux qu'ils appellent « les supers-riches » (millionnaires et milliardaires). Entendons-nous bien, sur le fond de ce qu'ils disent, je suis d'accord. Certaines pages sont d'ailleurs tout à fait bien construites et nous permettent de comprendre comme il faut et à juste dose ce qu'est l'évasion fiscale, comment se construisent les classes sociales ou encore de voir la vraie différence des richesses entre les pauvres et les riches.

Mais la forme du livre est quant à elle abjecte. Est souvent critiqué dans notre société le fait que l'on dit de la classe populaire qu'elle vit au crochet de la société, alors que dans la majorité des cas on a juste affaire à des gens qui cumulent plusieurs boulots, qui font tout ce qu'ils peuvent pour s'en sortir, mais n'y arrivent pas et ne sont pas en train de détourner les fonds de la CAF. Ces critiques sont injustes (ayant eu plusieurs années difficiles, je sais ce qu'il en est). Mais si on n'accepte pas une telle stigmatisation sur cette classe sociale populaire, comment peut-on accepter une stigmatisation tout aussi humiliante sur la classe sociale la plus haute ? Voici le passage le plus honteux de tout le livre, à mes yeux ; à la question « A quoi reconnait-on les riches ? » les auteurs répondent :

« La richesse saute aux yeux. Les riches sont toujours bien habillés : leurs vêtements sont bien coupés, avec des tissus confortables. Leur élégance paraît naturelle, cela leur donne confiance en eux et beaucoup d'assurance. Leurs cheveux sont soyeux, bien coupés et parfaitement coiffés. Ils sont souriants et leurs dents sont blanches et régulières »

Ce paragraphe est d'un mépris sans nom ! S'il peut faire rire au premier abord, j'ai même carrément fait des recherches sur internet pour savoir si finalement cet ouvrage n'est pas satirique, parodique. Mais pas du tout, les auteurs croient dur comme fer à leurs propos. Pour ma défense, même si vous l'aurez déjà compris, je ne viens pas du tout de la classe sociale des super-riches et ne les défends donc pas. En revanche je suis outrée par les propos discriminants, envers qui que ce soit. Et ce passage en fait partie. Que font les auteurs des gens qui ne sont pas des super-riches mais qui s'habillent bien ? Même si les professeurs travaillent avec leurs élèves sur la pensée critique, comment voulez-vous qu'un élève de 9 ans (car le livre est bien préconisé à partir de cet âge) fasse la différence entre un costume à 900€ et un à 100€ ? Est-ce que tous les porteurs de mocassins à glands sont à rejeter ? (puisqu'on est dans le cliché autant y aller à fond). Parce que ce n'est pas loin de ce que disent les auteurs ! Est-ce que parce que les parents d'un élève se sont saignés pour lui payer des cours d'équitation ou de tennis, il doit tout de suite être catégorisé et vu comme un gosse de riche ? En gros, je pourrais critiquer quasiment chaque propos qui est tenu dans ce documentaire, mais je ne le ferai pas sinon on va se retrouver avec un manifeste de 50 pages.

Ce « manuel » n'est absolument pas là pour développer la pensée critique. Il est à la limite du prosélistisme pour apprendre aux jeunes à détester tous les gens bien coiffés (et si vous avez une génétique qui vous permet d'avoir de superbes dents blanches, gare à vous). Mis entre les mains d'ados en construction, qui n'ont pas encore toutes les ficelles pour prendre du recul par rapport à ce genre de propos, cet ouvrage peut faire des ravages. Il est bien plus honteux que les quelques livres que le Ministère de l'Education Nationale a voulu faire retirer de la vente parce qu'on y voyait un bout de fesse ou de sein.

Pour bien vous montrer à quel point les propos sont totalement orientés, subjectifs, et pas du tout formateurs d'une pensée critique, la dernière image du livre est parlante.

Pour voir cette image et en savoir plus sur ce documentaire, rendez-vous sur notre site !
Lien : http://lebazarlitteraire.fr/..
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Peut-être me reprochera-t-on d'être tellement inféodée par la pensée unique, que je n'arrive pas à apprécier ce"premier manuel de pensée critique". Ce n'est pas parce que l'on s'adresse à des jeunes lecteurs qu'il faut simplifier à outrance et maintenir des stéréotypes. La notion de "Bourgeois" est associée aux seuls "super-riches", la notion de capitaliste (bien plus précise que riche, notion toute relative) n'est pas mentionnée ou expliquée, aucune différenciation n'est faite entre les différents types d'entreprises et d'entrepreneurs (artisans et petits entrepreneurs n'existent pas), le capital culturel est attribué au seuls super-riches, Benzema, star du foot, ne doit son argent qu'à son talent (peut-être aussi au mode de fonctionnement discutable de la FIFA et de ses clubs ? ). Bref, à trop simplifier, on perpétue un schéma réducteur, qu'il est absolument nécessaire de questionner. La complexité des relations sociales et économiques est survolée : les raisons pour lesquelles la spéculation financière entraîne la misère de millions de gens aurait par exemple mérité des explications. Un chapitre appréciable : celui sur l'évasion fiscale.
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