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Critique de tamara29


Il est plus de 6h et je n'arrive toujours pas à dormir. Une tasse de café froid traîne à côté de 'l'anthologie de la poésie française' de Pompidou qui me suit depuis des années. Ou plus exactement je suis ces poètes si passionnés, si vivants, depuis si longtemps, depuis mon adolescence... Mais cette nuit, ils n'arrivent pas à me parler comme d'habitude.
Mon corps et mes pensées réagissent aux dernières nouvelles. Envie de vomir, de pleurer, de hurler. Et mes utopies s'effritent, celles sur le bien vivre ensemble, le respect de l'autre... face à ces horreurs, à la vacuité de la vie.
Pourtant la vacuité et cette image de vide qu'elle renvoie me paraîtraient plus douces que tout ce sang versé, cette haine et cette violence qui me donnent des haut-le-coeur.
Si je n'étais plus là, cela ne ferait rien. Je ne suis qu'une petite fourmi lambda dans un monde qui convulse, qui implose. Qu'une fourmi lambda qui n'a rien créé, encore moins d'oeuvre signifiante, ni travaillé pour l'Institut Pasteur ni donné assez de son temps à une association caritative. Je ne suis qu'une petite fourmi qui, dans un 'plops' pourrait -comme une bulle de savon- ne plus être sans que cela ne se remarque, ne change quoi que ce soit à la marche du monde. Il n'y aura pas alors d'effet papillon ; la Terre continuera de tourner comme elle tourne mal.
Je n'arrive pas à dormir. Cauchemar éveillé. Besoin de chaleur, de contacts, de sourires d'amis, de mots apaisants pour me prouver qu'il n'y a pas que du froid et des morts. Avec frénésie et anxiété, j'ai écrit à mes amis parisiens pour être rassurée...
Vers 4h du matin, j'ai ouvert l'Anthologie de Pompidou pour y (re)trouver des poèmes, des mots magiques qui effaceraient les images que j'ai encore sous les yeux, qui feraient oublier ces pensées ressassées, incessantes. Je tourne les pages, pressée, oppressée, suffocante, manquant d'air. Je cherche encore à me sauver. Pourquoi ? Ridicule. Les larmes finissent bien par couler. J'ai froid, j'ai mal. Même ces rimes qui d'habitude me réchauffent le coeur ne suffisent pas, cette nuit, et me paraissent presque dérisoires. A côté, toujours, si proches, à peine quelques rimes plus loin, ou même en filigrane, il y a le désespoir, la déchirure, la souffrance de l'être délaissé, esseulé. Il y a toujours le mot "fin". Cette fin qui parfois peut même sembler salutaire. Mieux que ces nuits blanches et tous ces cris, et toutes ces larmes. le noir qui s'impose, qui prévaut à tout, sur tout. Qui remporte à la fin.

Peut-être que dans quelques semaines, je me dirai qu'il faut que je passe à des romans à l'eau de rose pour avoir une vision plus opaque et naïve du monde.
Peut-être plus sûrement, le coeur moins à vif, je retournerai vers ces poètes (Hugo, Rimbaud, Baudelaire, Eluard et tous les autres...) qui me sauvent bien souvent. Et si des larmes seront versées, ce sera peut-être pour la beauté des mots, pour la beauté du coeur. Pour mon utopie retrouvée.
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