Personne n'a sourciller à l'idée que l'on abdiquât la défense nationale entre les mains de l'Angleterre, car c'est de cela qu'il s'agit.
Il y avait enfin, parmi les besognes de représentation, les dîners à Neuilly chez le général de Gaulle.
Winston Churchill m'apparut, d'un bout à l'autre du drame, comme le grand champion d'une grande entreprise et le grand artiste d'une grande Histoire.
Je devais par la suite constater avec étonnement que les Allemands que je rencontrais avaient tous oublié ou renié cette page de leur histoire.
Il y avait l'agitation des étudiants qui continuaient, mais commençait à lasser l'opinion.
Il y avait la grève générale qui s'était, en quelque sorte imposée aux syndicats, notamment à la C.G.T., et paralysait le pays mais ne débouchait sur rien.
Il y avait enfin l'action politique proprement dite, c'est à dire les menées de quelques leaders - Mitterrand, Mendès France - cherchant à exploiter la situation et à s'assurer des concours extérieurs.
Face à ce triple danger, ma tactique était simple. Je voulais, d'abord, gagner du temps. La crise n'avait pris une tournure aussi grave que dans la mesure où l'opinion - et essentiellement l'opinion parisienne - avait brusquement donné libre cours au prurit anti-gaulliste qui l'avait démangée à plusieurs reprises dans le passé, en 1953-54 par exemple. Le désordre dans la rue, l'incroyable spectacle donné par la Sorbonne ou l'Odéon, la paralysie économique devaient tôt ou tard permettre de renverser la vapeur. Déjà la province laissait percer sa lassitude et son irritation. Gagner du temps donc, éviter le drame avec les étudiants (la France n'accepte pas qu'on tue des jeunes et moi-même ne pouvais en supporter l'idée), et les intrigues politiques s'écrouleraient dans le ridicule.
(p.186)
Le lieutenant Claude Guy en particulier était maître dans l'art de provoquer des demandes d'audience et d'en oublier d'autres.
Le gaullisme leur était totalement étranger.
La guerre n'était qu'un incident venu rompre le cours normal des événements et troubler de façon provisoire le jeu politique.
Ainsi va des Français : difficiles à gouverner, mais plus difficiles encore à reconquérir quand on les a une fois abandonnés à eux - mêmes.
Sa pâleur subite me montra la vivacité de ses impressions, mais il ne les extériorisa pas autrement.
Quoiqu'il en soit, la retraite du Général devait avoir pour conséquence inattendue de me rapprocher de ce dernier.