À dix-huit heures, une alarme retentit : une tempête solaire s’annonce. Nous y sommes préparés – elles sont fréquentes même pendant les périodes de faible activité de l’astre. Notre vaisseau possède son abri contre ces radiations : le couloir axial du module, où sont stockées, derrière des panneaux isolants de polyéthylène, les réserves d’eau et de nourriture, les ordinateurs et les systèmes de recyclage. Nous nous y regroupons. Chrys semble nerveux. Il ne l’avouera pour rien au monde mais son regard fuit les nôtres. Sans protection, la dose de radiations – plusieurs sieverts – qui frappe le vaisseau nous tuerait. Mais ce n’est pas ce qui l’inquiète : ce qu’il craint, ce sont les géocroiseurs : les astéroïdes échappés de la ceinture jupitérienne, ceux qui, en une seule salve, il y a trois milliards neuf cents millions d’années ont fait de la Lune ce qu’elle est… Un gruyère.
L'immobilité est stérile ; la vie est dans le mouvement, dans la modification qu'engendre ce mouvement. Dans l'affrontement ou l'affinité. Tout voyage modifie le voyageur, qu'il en convienne ou pas. Que serait le monde aujourd'hui si Marco Polo, Christophe Colomb, Vasco de Gama, Hernan Cortes, Jacques Cartier, James Cook... ne l'avaient pas arpenté ? Il serait différent. El le voyageur, aussi, modifie le monde.