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Critique de muet-comme-un-carpe-diem


Il y a quelque chose de l'histoire des larmes de Jan Fabre dans la première partie du roman noir de Jean-Bernard Pouy L'homme à l'oreille croquée. le huis clos entre un adolescent et une jeune femme qu'un accident de train projette l'un contre l'autre. Marcel sent le corps de la fille sur lui, son ventre parfaitement posé sur le sien, le haut de son corps un peu tordu, il ne sent qu'une partie de sa poitrine, sa tête sur le côté de la sienne, son bras gauche le long de son corps, sa main posée sur le haut de sa cuisse.

Des corps entremêlés comme pour une union charnelle mais en fait enclavés dans les parois du compartiment qui se sont broyées autour d'eux, ne leur laissant que très peu d'espace pour respirer et remuer. La jeune femme menacée par un éclat de métal dangereusement pointé contre sa colonne vertébrale.

Bon gré mal gré, dans cette violente promiscuité, il doit accepter la totalité des fluides corporels qui vont sourdre d'elle. Il va osciller entre la peur, le dégoût, le désir, la colère reposant toutes les questions d'ores et déjà évoquées sur le rapport à l'autre et à son intériorité dans les textes d'Emmanuèle Bernheim et ceux de Jean-Paul Sartre ainsi que dans l'oeuvre de Wim Delvoye.

Lorsque les pompiers finiront par arriver pour les désincarcérer de leur prison de métal, la douleur est-elle qu'elle en vient à mordre et arracher l'oreille de son compagnon d'infortune.

Ils auraient pu ne jamais se revoir, mais cette expérience d'un train qui a déraillé est mâtinée pour l'adolescent de celle des transports amoureux aussi n'aura-t-il de cesse de la retrouver. D'autant plus lorsqu'il comprendra qu'elle est menacée.


Comme dans la Belle de Fontenay, où un retraité des chemins de fer adhérent à la CNT-AIT cherche à mettre la main sur le meurtrier de la jeune lycéenne qui lui rendait visite dans son jardin ouvrier, la quête de la vérité par ce jeune homme à l'oreille croquée va brouiller les cartes, les représentations, attiser les espoirs, l'envie et les déceptions. La chute d'airain des deux romans délivrant finalement une même perception de ce que l'on peut attendre du bonheur dans des romans noirs.

Une ambiance, une vision du monde pas si éloignée que cela de celle de Gabriel Lecouvreur, plus connu sous le nom du Poulpe, cet aventurier libertaire, dont la première enquête publiée avait été rédigée par Jean-Bernard-Pouy avant que la suite de la saga de ce personnage atypique ne soit confiée à d'autres écrivains de polars. Encore une histoire de train comme son titre ne l'indique pas : La petite écuyère a cafté.

Dans un autre registre, L'homme a l'oreille coupée, de Jean-Claude Mourlevat vous amènera à tendre l'oreille aux explications successives que lui réclament les piliers de bar sur son handicap qui finissent par un clin d'oeil facétieux.

Lien : http://muet-comme-un-carpe-d..
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