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Critique de bobfutur


"Roman d'autofiction fantasmagorique" ? Vraiment ?
Ce dernier mot est apprécié par l'auteur, du moins utilisé à plusieurs reprises dans les interviews que j'ai regardé ces derniers temps. En présence d'un tel livre, impossible de ne pas passer au moins le triple du temps nécessaire à sa lecture en recherches à son sujet, au sujet de ces guerres, et à l'histoire en général. On a beau avoir quelques notions, elles sont très vite balayées par l'ampleur de la tâche...

Donc entre les mains ce "roman", dont on n'arrive pas à le considérer autrement que comme un récit, une forme de gonzo-journalisme où Hunter S. Thompson aurait enfin pu laisser libre cours à sa passion pour les armes...
Est-ce juste un prétexte pour qu'on n'aille pas lui demander des comptes ?
Car on parle bien ici, toute opinion politique mise de côté, d'un écrivain s'engageant dans un conflit au point d'y être un acteur de premier plan... le guerre, oui, vous savez, ce truc que les Hommes font très bien, et où il n'y a jamais des gentils et des méchants, que des vainqueurs et des vaincus.

Ce livre est à prendre tel quel, car il y a en premier lieu beaucoup de talent dedans, bien que sa structure soit complètement éclatée, comme une volonté de ne PAS raconter, ni non plus de réellement s'en justifier. Comme le dit très bien Henri, dans sa critique vers laquelle je vous renvoie, c'est surtout le témoignage à propos des dernières années de la vie d'un homme, Zakhartchenko.
La fantasmagorie vient sûrement de cette correspondance, que le pseudonyme d'écriture depuis longtemps porté par Prilepine en soit compléter par ce suffixe de nom de famille typiquement ukrainien, et qu'ils soient devenus des frères. Vertiges.
Car Henri parle plus bas de Kundera, et tout de suite me revient ce paragraphe essentiel de L'insoutenable légèreté de l'être:
"Qu'est-il resté des agonisants du Cambodge ? Une grande photo de la star américaine tenant dans ses bras un enfant jaune. Qu'est-il resté de Tomas ? Une inscription : Il voulait le Royaume de Dieu sur la terre. (...) Et ainsi de suite, et ainsi de suite. Avant d'être oubliés, nous serons changés en kitsch. le kitsch, c'est la station de correspondance entre l'être et l'oubli."
Auquel on se doit d'ajouter Maïdan ? un film rythmé par des énormes tambours et le visage grêlé de Iouchtchenko ?
On a tous jugé l'histoire à ce moment là, forcément orange car de notre "côté". Bien-sûr, à creuser, à dépasser l'information donnée, simplifiée, on se heurte toujours aux abîmes de la complexité, ayant devant nous comme planche de salut facilitante le Relativisme, simplifiante le Complotisme, même si toutes ses notions se doivent d'être balancées à tout bout de champs pour achever définitivement celui qui cherche simplement la Vérité, quête quasi-religieuse pour nous ramener à la mystique russe, toujours au dessus de ses écrivains.
Je vous laisse dérouler l'argumentaire en vous, c'est sans fin, si l'on a un peu d'honnêteté. Je n'en ai pas fini avec toutes les questions que ce livre, parmi d'autres lectures, soulèvent; du rôle de l'artiste dans nos sociétés, etc.
Avec pour finir un souvenir plus léger (besoin après un tel livre): Kusturica ("frère" de Zakhar) déclarant qu'il avait songé à arrêter le cinéma après l'opprobre jeté par des intellectuels, BHL en tête, après la sortie de son chef d'oeuvre "Underground", qualifié de "pro-Grande Serbie" (sous-entendu "pro-Milosevic", bref méchant). Emir annoncera plus tard qu'il était obligé de revenir tourner, pour laver la culture mondiale de la tâche laissée par la sortie du film de BHL "le Jour et la Nuit"...

Voilà, et de Zakhar, j'aimerais toujours lire son "L'archipel des Solovki", ou d'autres romans, car celui-ci n'en est pas un. Merci les Editons des Syrtes et Babelio pour cet avant-première.
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