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Citations sur A la recherche du temps perdu, tome 3 : Le Côté de Guerm.. (21)

Enfin, mon pauvre enfant, si cela vous amuse ! Pendant que vous irez à quelque five o'clock, votre vieil ami sera plus heureux que vous, car seul dans un faubourg, il regardera monter dans le ciel violet la lune rose. La vérité est que je n'appartiens guère à cette terre où je me sens si exilé ; il faut toute la force de la loi de gravitation pour m'y maintenir et que je ne m'évade pas dans une autre sphère. Je suis d'une autre planète. (p184)
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Cependant l'hiver finissait. Un matin, après quelques semaines de giboulées et de tempêtes, j'entendis dans ma cheminée - au lieu du vent informe, élastique et sombre qui me secouait de l'envie d'aller au bord de la mer - le roucoulement des pigeons qui nichaient dans la muraille : irisé, imprévu comme une première jacinthe déchirant doucement son cœur nourricier pour qu'en jaillît, mauve et satinée, sa fleur sonore, faisant entrer, comme une fenêtre ouverte, dans ma chambre encore fermée et noire, la tiédeur, l'éblouissement, la fatigue d'un premier beau jour.
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Chacun voit en plus beau ce qu'il voit à distance, ce qu'il voit chez les autres. (p282)
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Quelques gouttes de pluie tombent sans bruit sur
l’eau antique, mais dans sa divine enfance restée
toujours couleur du temps et qui oublie à tout
moment les images des nuages et des fleurs. Et
après que les géraniums ont inutilement, en
intensifiant l’éclairage de leurs couleurs, lutté
contre le crépuscule assombri, une brume vient
envelopper l’île qui s’endort ; on se promène
dans l’humide obscurité le long de l’eau ou tout
au plus le passage silencieux d’un cygne vous
étonne comme dans un lit nocturne les yeux un
instant grands ouverts et le sourire d’un enfant
qu’on ne croyait pas réveillé. Alors on voudrait
d’autant plus avoir avec soi une amoureuse qu’on
se sent seul et qu’on peut se croire loin
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On est l’homme de son idée ; il y a beaucoup moins d’idées que d’hommes ainsi tous les hommes d’une même idée sont pareils. Comme une idée n’a rien de matériel, les hommes qui ne sont que matériellement autour de l’homme d’une idée ne le modifie en rien.
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"Vous pourriez avoir la politesse de commencer par me dire bonjour", me répondit-il sans me donner la main et d'une voix rageuse et vulgaire que je ne lui soupçonnais pas et qui, nullement en rapport rationnel avec ce qu'il disait d'habitude, en avait un autre plus immédiat et plus saisissant avec quelque chose qu'il éprouvait.
C'est ce que nous éprouvons, comme nous sommes décidés à toujours le cacher, nous n'avons jamais pensé à la façon dont nous l'exprimerions.
Et tout d'un coup, c'est en nous une bête immonde et inconnue qui se fait entendre et dont l'accent parfois peut aller jusqu'à faire aussi peur à qui reçoit cette confidence involontaire, elliptique et presque irrésistible de votre défaut ou de votre vice, que ferait l'aveu soudain indirectement et bizarrement proféré par un criminel ne pouvant s'empêcher de confesser un meurtre dont vous ne le saviez pas coupable.
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Tout ce que nous connaissons de grand nous vient des nerveux. Ce sont eux et non pas d’autres qui ont fondé les religions et composé les chefs d’œuvre. Jamais le monde ne saura ce qu’il leur doit et surtout ce qu’eux ont souffert pour le lui donner.
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« Hélas, eût
pensé Robert, est-ce la peine que j’aie passé ma
jeunesse à mépriser la naissance, à honorer
seulement la justice et l’esprit, à choisir, en
dehors des amis qui m’étaient imposés, des
compagnons gauches et mal vêtus s’ils avaient de
l’éloquence, pour que le seul être qui apparaisse
en moi, dont on garde un précieux souvenir, soit
non celui que ma volonté, en s’efforçant et en
méritant, a modelé à ma ressemblance, mais un
être qui n’est pas mon œuvre, qui n’est même pas
moi, que j’ai toujours méprisé et cherché à
vaincre ; est-ce la peine que j’aie aimé mon ami
préféré comme je l’ai fait, pour que le plus grand
plaisir qu’il trouve en moi soit celui d’y découvrir
quelque chose de bien plus général que moimême, un plaisir qui n’est pas du tout, comme il
le dit et comme il ne peut sincèrement le croire,
un plaisir d’amitié, mais un plaisir intellectuel et
désintéressé, une sorte de plaisir d’art ? »
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Albertine me parlait peu, car elle sentait que
j’étais préoccupé. Nous fîmes quelques pas à
pied, sous la grotte verdâtre, quasi sous-marine,
d’une épaisse futaie sur le dôme de laquelle nous
entendions déferler le vent et éclabousser la pluie.
J’écrasais par terre des feuilles mortes, qui
s’enfonçaient dans le sol comme des coquillages,
et je poussais de ma canne des châtaignes
piquantes comme des oursins.
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Et pourtant j’étais touché de voir combien Saint-Loup se montrait autre à mon égard depuis que je n’étais plus seul avec lui et que ses amis étaient en tiers. Son amabilité plus grande m’eût laissé indifférent si j’avais cru qu’elle était voulue ; mais je la sentais involontaire et faite seulement de tout ce qu’il devait dire à mon sujet quand j’étais absent et qu’il taisait quand j’étais seul avec lui. Dans nos tête-à-tête, certes, je soupçonnais le plaisir qu’il avait à causer avec moi, mais ce plaisir restait presque toujours inexprimé. Maintenant les mêmes propos de moi, qu’il goûtait d’habitude sans le marquer, il surveillait du coin de l’œil s’ils produisaient chez ses amis l’effet sur lequel il avait compté et qui devait répondre à ce qu’il leur avait annoncé. La mère d’une débutante ne suspend pas davantage son attention aux répliques de sa fille et à l’attitude du public. Si j’avais dit un mot dont, devant moi seul, il n’eût que souri, il craignait qu’on ne l’eût pas bien compris, il me disait : « Comment, comment ? » pour me faire répéter, pour faire faire attention, et aussitôt se tournant vers les autres et se faisant, sans le vouloir, en les regardant avec un bon rire, l’entraîneur de leur rire, il me présentait pour la première fois l’idée qu’il avait de moi et qu’il avait dû souvent leur exprimer. De sorte que je m’apercevais tout d’un coup moi-même du dehors, comme quelqu’un qui lit son nom dans le journal ou qui se voit dans une glace.
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