Nostalgique de sa Bretagne, Henri Queffélec écrivit ce roman à Paris pendant l'occupation. Il s'inspire alors d'un fait historique survenu au début du XVIIè siècle sur l'île de Sein : après le départ du recteur et en l'absence d'un successeur, le sacristain se vit provisoirement confier l'église et assurer les prières dominicales.
Récemment réédité chez Pocket, c'est l'occasion de découvrir ce petit roman et de se transporter sur cette île bretonne à une époque bien éloignée de l'attrait touristique que ce monde insulaire représente aujourd'hui.
Après le départ de leur prêtre, les îliens qui s'estiment bons chrétiens n'ont pas mérité cet abandon spirituel et réclament à cor et à cri un nouveau curé pour les guider. Mais cette paroisse retirée du monde et battue par les vents n'attire aucun recteur.
Thomas Gourvennec, sacristain et pêcheur, se lance, un dimanche, dans un sermon pour dénoncer certains actes païens suite au naufrage d'une chaloupe. Mais loin d'en être blâmer, toute l'île le réclame car il prêche aussi bien qu'un prêtre !
Mais « Il ne voulait pas se fourrer au presbytère comme un bernard-l'ermite dans un bigorneau. »
Tiraillé d'un côté par son honnêteté à ne pas usurper la place de prêtre et d'un autre côté par l'envie de répondre aux besoins religieux des paroissiens, Thomas attire le respect, l'admiration, mais également la jalousie de certains îliens.
C'est un petit roman qui s'apprivoise doucement au beau milieu de ces habitants rudes, qui ne mangent pas toujours à leur faim et que les voisins du continent considèrent comme des sauvages, essentiellement pêcheurs, pilleurs d'épaves lorsque l'occasion se présente. Des îliens, à la foi inébranlable, qui aux milieux des disputes ont un besoin puissant de religion pour les unir sur cette terre isolée. L'image des lits clos revient souvent, nous sommes bel et bien en Bretagne !
L'écriture est magnifique et donne vie aux éléments naturels : le vent qui se rue sur l'île, les tempêtes dans les ténèbres qui menacent d'engloutir cette terre, les vagues rugissantes qui transforment les rivages.
J'ai beaucoup aimé cheminer aux côtés de Thomas qui porte sa paroisse afin que ce petit monde clos ne sombre pas dans la folie. Le sujet est intéressant et porté par des mots et des personnages touchants.
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Vivre sur une île est toujours une expérience ethnologique. Celle-ci au ras de l'eau face au raz de sein avait tout pour façonner des hommes durs et donner du travail au curé comme à celui du Cucugnan. Des naufrageurs premiers on sait depuis qu'on leur doit leur rôle au front de la première guerre mondial : impliqués comme le cochon dans l'omelette au lard.
Aujourd'hui on note leur implication à la société nationale de sauvetage en mer. J'ai fait 2 fois le pèlerinage et je recommande ce site classique en lisant 'le recteur de l'île de Sein'.
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Henri Queffelec est un auteur français mort en 1992 et, accessoirement, père de l'écrivain Yann Queffelec. Il a beaucoup écrit, notamment sur sa Bretagne natale. Cela fait longtemps que le titre de ce livre avait attiré mon attention: j'ai fini par me décider. Au début, j'ai trouvé la lecture très peu attrayante. Le sujet parait étonnant. En ces temps déjà lointains, les habitants de l'île de Sein, confetti isolé au large de la Bretagne et battu par les tempêtes, sont privés de curé: aucun titulaire nommé par l'évêque ne veut rester sur place. Ce manque fait souffrir les îliens, ça parait bizarre mais c'est ainsi. L'auteur illustre à cette occasion l'immense influence de l'Eglise "ancien style" sur le petit peuple.
Le sacristain Thomas Gourvennec va peu à peu assumer (ou, du point de vue de l'évêque, usurper) la charge de curé. Thomas est un brave homme, qui bénéficie d'un soutien sans faille de ses ouailles - sauf d'un certain François qui le déteste. Le lecteur se trouve ainsi plongé dans la vie de cette micro-communauté, rude, agitée par quelques conflits et parfois en marge de la légalité; je ne raconterai pas la fin. Personnellement, je me suis vraiment intéressé aux personnages et à l'histoire racontée, qui est simple et pourtant originale. Et, en plus, Henri Queffelec écrit bien…
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Un livre lu après des vacances en Bretagne, choisi pour découvrir cette île que je n'avais vue que de loin.
Il donne un certain regard sur ce qu'a pu être la vie sur une telle île au début du 20ème siècle et comment la rudesse des conditions et l'isolement ont pu influencer les relations de ces hommes et de ces femmes avec leur guide religieux.
Ce n'est probablement pas le livre que je conseillerais à quelqu'un qui cherche un divertissement léger pour la plage mais il apporte sa dose d'embruns et de voyage dans le temps. Plaisant.
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