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Citations sur Les derniers contes de Canterbury (17)

Le rose n’est pas une couleur, c’est le bâtard du rouge triomphant et de la lumière coupable ; né d’un inceste où l’enfer comme le ciel ont joué un rôle, il est resté la teinte de la honte. Mais cela, je ne l’ai senti que plus tard, quand il m’était devenu impossible de sortir encore de la géhenne.
La connaissance d’après coup, celle qui arrive trop tard pour vous sauver, me rappela que le rose est jumelle à l’horreur.
Pleur sanglante des poumons phtisiques, mousse aux lèvres des hommes qui meurent la poitrine percée, tissus visqueux des fœtus, prunelles affreuses des albinos morbides, témoin du virus et du spirochète, compagnon des sanies et de toutes les purulences, il a fallu l’innocence et l’admiration des enfants et des jeunes filles pour l’entourer de désirs et de préférences, et cela même démontre sa malice et sa ténébreuse essence.
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Les bruits étaient sympathiques et excellents : des grésillements de graisse chaude, des flonflons de bouilloire, des bruits en fusée de rôtis arrosés, le choc clair des casseroles et de la vaisselle, un glou-glou de bouteilles qui semblait parodier une cascadante série de baisers goulus.
Toute sa sympathie d’homme affamé serait allée vers les odeurs des viandes chaudes et des sauces épicées, si un effluve étrange, doux et terrible, n’était venu flotter autour de lui.
— Je connais cela, murmura-t-il.
Et, soudain, une cruelle fantasmagorie se déroula en film silencieux dans sa mémoire : il revit les boueuses tranchées où saignaient d’innombrables cadavres de Tommies et de Feldgrauen.
— Cela sent la mort, dit-il, le sang… Pouah !
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Il versa jusqu'à la dernière goutte de whisky sur le nouveau-né en prononçant les paroles sacramentelles, et tout le monde pria et chanta des hymnes, puis quand l'aube mit quelques misérables traînées jaunes dans la purée sale de la brume, ils posèrent tous un maladroit baiser sur le petit être qui vagissait aigrement dans les bras de sa maman, pâle, épuisée, mais si heureuse.
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(Souvenirs heureux du bourreau de Tyburn) Je fréquentais assidûment la taverne du Pécheur Repenti et j'y prenais fréquemment mes repas, surtout aux jours du pâté de pintade au vin d'Espagne. A l'un des angles dans Spite Street, s'ouvrait la boutique du boulanger Miffins, un bien digne commerçant à qui je réservais ma pratique et qui devint mon ami.
Les jours de fête il confectionnait à mon intention un gibet en pain d'épices, et je me souviens avec émotion d'un de mes jours d'anniversaire où il m'offrit une épée de justice en sucre argenté sur laquelle le sang des suppliciés avait été représenté par du sirop de framboise.
Aux pauvres gens qui habitaient un peu plus loin vers Wardour Ham, je laissais emporter les fagots non consumés des bûchers ou les rondins tournés au charbon, et je leur offrais le vieux chanvre du gibet impropre à un nouvel usage. Ils m'en surent si bien gré que bientôt ils ne m'appelèrent plus que "le bon sir Benjamin" et ils poussèrent même la reconnaissance jusqu'à me proclamer leur principal bienfaiteur, après Dieu et le roi.

p. 77
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J'avais un camarade qui n'était pas un garçon ordinaire. Il avait étudié le formulaire magique du grand Albert, dans une édition qui n'était pas pour concierges, expliquait d'ingénieuse façon la lettre de Salon et avait passé un mois de ses vacances au British Museum à rechercher les écrits du mystérieux Docteur John Dee et à compulser le Theatrum Chemicum d'Elias Ashmole.
Dans un nid de huppe, il avait trouvé la pierre "ématilla" des sorciers, et sur les minuit, avait cueilli la bétoine d'eau dans le fossé d'un cimetière.
Alors, dans une chambre où rien n'était suspendu et où tressautaient encore les restes acéphales d'une poule noire, il invoqua le diable. Qui ne vint pas.

p. 252
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Dans une poignée de sable de la route,
j'ai mis un rayon de soleil qui brille,
un murmure du vent qui se lève,
une goutte du ruisseau qui passe et un frisson de mon âme
pour pétrir les choses dont on fait les histoires...
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Oh daddy, achète-moi le diable... vois comme il est beau !
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Un bout de biscuit de mer dur comme pierre, un petit morceau de lard rance, un litron de soupe et un pot de lavasse baptisée thé ou café, au caprice du cuisinier, étaient dévolus comme ration quotidienne. Deux fois par semaine une écuelle de pois chiches, de riz éventé ou de lentilles rouges parsemées de cadavres de cancrelats, corsait cet horrible menu.
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La lumière s'était soudain figée… et sur l'écran azuré de l'Infini se profilait, immense, radieuse, taillée dans le flanc ardent de mille soleils… une bouteille de whisky !
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La quête fut belle malgré le peu de monde ; la pauvre petite loque humaine où palpitait la divine étincelle de la vie apportait un grand frisson de douceur parmi ces cœurs trempés à la peine des jours.
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