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Citations sur Un temps pour vivre, un temps pour mourir (14)

Il connaissait toute une gamme de peurs, les peurs aiguës, les peurs obscures, celles qui coupent le souffle et paralysent les muscles, et aussi la grande peur suprême de la créature vivante devant la mort; mais celle qu'il éprouvait maintenant était différente de touts les autres, c’était une peur rampante, une menace imprécise, une étreinte poisseuse, comme celle d'une glaire invisible et dissolvante, la peur de l'impuissance et du désespoir, la peur corruptrice qui engendrent les dangers subis par d'autres, otages innocents ou persécutés sans défense, la peur en face de l'arbitraire, de la violence et de l’inhumanité systématique. La grande peur de notre temps.
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Un grand tilleul se dressait devant la maison effondrée. Ses branches s' écarquillaient vers le ciel comme les doigts d'une main gigantesque. Quelques nuages blancs flottaient dans un ciel très bleu. Tout brillait d"'un éclat neuf comme après une ondée. C’était la vie puissante et sure d'elle même, sans question, sans tristesse, sans désespoir. Graber l'accueillait en lui comme une réponse ineffable, plus profonde que toutes les questions et tous les mots, celle là même qu'il avait entendue maintes fois déjà lorsque la mort l'avait effleuré, lorsque l'espoir avait afflué en lui, chassant la peur, l'attente et l'abandon, noyant toutes les raisons, toutes les pensées, sous une vague irrésistible.
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Il pleuvait depuis plusieurs jours. La neige fondait en boue. Un mois auparavant, il y avait eu un mètre d'épaisseur. Le village en ruine qui se réduisait au début à quelques toits calcinés émergeait un peu plus chaque nuit de la neige qui fondait. Le haut des fenêtres étaient apparus les premiers; quelques nuits plus tard on avait vu surgir l'arc des portes; puis les marches étaient sorties une à une de la blancheur pourrie. La neige fondant toujours, les morts avaient surgis à leur tour.
C'étaient des morts anciens. Le village avait plusieurs fois changé de mains - en novembre, en décembre, en janvier, enfin tout récemment en avril. Il avait été pris, puis abandonné, puis repris encore, et les chutes de neige s'étaient succédé et avaient recouvert les cadavres d'un tapis souvent si épais en l'espace de quelques heures que les infirmiers avaient perdu leur trace. Chaque jour avait étendu une nouvelle couche blanche sur le paysage de ruines, comme une infirmière jette un drap immaculé sur un lit sanglant et boueux.
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Il leva la main vers l'horizon assombri.
-Nous ne sommes pas de ceux avec qui on traite. Nous avons semé la terreur et la haine, comme Attila ou Gengis Khan. Nous avons violé tous nos engagements et piétiné la loi humaine...
-Pas nous, les SS, objecta Gräber avec désespoir.
Il était parti à la recherche de Fresenburg pour échapper à Immermann, Sauer et Steinbrenner. Il voulait évoquer avec lui avec lui leur vieille ville paisible et son fleuve, l'allée de tilleuls, leur jeunesse - et voici qu'il retombait de plus belle dans ce présent d'épouvante et de révolte. Il n'attendait une aide de personne, si ce n'est précisément de Fresenburg qu'il avait perdu de vue depuis quelques temps dans le grand désordre de la retraite. Et il fallait que ce fût justement Fresenburg qui lui jetât au visage les vérités qu'il redoutait le plus d'entendre et dont il n'aurait jamais voulu s'approcher que lentement dans le calme et la solitude de sa permission.
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Comment ces deux univers sont-ils conciliables, d'une part ces livres, ces ouvrages d’histoire, cette philosophie, d'autre part l’inhumanité des SA, les camps de concentration, les crimes massifs perpétrés sur des innocents ?
- Ces deux univers ne sont pas conciliables, ils existent simultanément et indépendamment l'un de l'autre, voila tout. Si les auteurs de ces livres vivaient encore, ils seraient tous probablement dans les camps de concentration.
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Ils redescendirent vers la ville. La rue repris possession d'eux, le souffle des incendies refroidis les enveloppa à nouveau, et les fenêtres aveugles les escortèrent de leur cortège endeuillée.
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Il connaissait toute une gamme de peurs, les peurs aiguës, les peurs obscures, celles qui coupent le souffle et paralysent les muscles, et aussi la grande peur suprême de la créature vivante devant la mort; mais celle qu'il éprouvait maintenant était différente de toutes les autres, c'était une peur rampante, une menace imprécise, une étreinte poisseuse, comme celle d'une glaire invisible et dissolvante, la peur de l'impuissance et du désespoir, la peur corruptrice qu'engendrent les dangers subis par d'autres, otages innocents ou persécutés sans défense, la peur en face de l'arbitraire, de la violence et de l'inhumanité systématique. La grande peur de notre temps.
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C’était une terre inhumaine, figée par le froid et la solitude, sans rien ou le regard put s'attarder, le cœur se réchauffer. Tout semblait infini et inachevé comme le pays lui-même sans âme ni frontières. Graber frissonna. Il se sentait étranger à lui même au milieu de ce désert hostile dont il faisait partie comme ces pierres glacées , ces cabanes calcinées.
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C'était alors que ses yeux s'étaient soudain ouverts comme ceux de beaucoup d'autres. Réfléchir était maintenant facile et à la portée de tous. Tout était bien dans le meilleur des mondes quand les victoires succédaient aux victoires. Il y avait certes quelques ombres au tableau, mais on les ignorait, ou on excusait par la grandeur des fins la médiocrité des moyens. Mais au fait, de quelles fins s'agissait-il? N'avaient-elles pas toujours eu deux faces dont l'une était sanglante et inhumaine? Pourquoi n'y avait-il vraiment jamais songé? Mais n'y avait-il jamais songé? Ou n'avait-il pas plus d'une fois senti le doute et le dégoût l'envahir? Toujours il avait chassé ces visiteurs importuns?
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- Je n'ai rien voulu vous dire, parce que je ne voulais pas vous payer d'une de ces innombrables réponses qui sont autant de dérobades. Il n'en manque pas. Elles sont toutes péremptoires et convaincantes, mais elles ne persuadent que les lâches.
- Même celles de l’Église ?
Pohlmann hésita un instant.
- Même celles de l’Église, dit-il ensuite. Mais l’Église a de la chance. A coté du commandement Tu aimeras ton prochain comme toi même et Tu ne tueras point, elle a mis cet autre commandement Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. Ça lui donne une certaine liberté de manœuvre.
Graber sourit. Il retrouvait le ton sarcastique de l'ancien Pohlmann. Pohlmann s'en aperçut.
- Vous souriez, lui dit-il. Pourquoi ne criez vous pas?
- Je crie, répondit Graber, mais personne ne m'entend.
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