1577, Venise. le Palais des Doges brûle et le feu ravage la salle du Grand Conseil, le coeur de la puissance de la République de Venise. Très vite, le doge Sebastiano Venier décide d'organiser un grand concours, qui réunira les peintres les plus prestigieux de la Sérénissime pour remplacer l'ancien Paradis qui a brûlé. C'est une question d'honneur et de puissance : le Paradis doit montrer au monde entier la richesse et le pouvoir de la République.
Les membres du jury sont nommés : ce sont tous des dignitaires et des mécènes, qui nomment très rapidement les participants du concours : le Tintoret, Véronèse, Palma le jeune, Francesco Bassano et enfin, par totale surprise, Federico Zuccaro, seul peintre non vénitien de la liste. Les membres de la commission du concours sont chargés de définir les attentes et la direction que les peintres devront prendre pour créer leur nouveau Paradis.
1587. Dix ans plus tard, rien n'a encore été fait. le nouveau doge, Pascale Cicogna, reprend l'idée lancée par son malheureux prédécesseur. Il faut d'urgence rappeler au monde la splendeur de la Sérénissime. le concours est enfin organisé, seul Zuccaro, le florentin, en est exclu. Hors de question de devoir sa grandeur à un étranger. Tintoret, Véronèse, Palma et Bassano présentent leurs esquisses. Les amateurs d'art les analysent minutieusement, chacun a son poulain qu'il mécène, et chacun compte bien l'imposer face aux autres. Finalement, le doge choisit un compromis : il préfère la toile de Bassano, mais la renommée de celui-ci n'atteint pas celle de Véronèse. Les deux peintres devront travailler ensemble sur la même toile, et tant pis si cette décision crée de la frustration et froisse les egos des maestros, au risque de ralentir un chantier qui s'annonce colossal.
Concours pour le Paradis met en scène la création picturale, ses affres et ses instants de grâce. À la rivalité des grandes cités italiennes et à la domination de Rome se superposent la rivalité entre deux grands génies de leur époque : le Tintoret, au caractère irascible et au patriotisme exacerbé, et Véronèse, le mondain qui a l'art de plaire, et qui n'hésitera pas, par ruse, à s'introduire dans l'atelier du premier pour lui voler l'idée de son esquisse pour le Paradis. C'est l'occasion rêvée de s'introduire dans les ateliers, de faire revivre les méthodes et les techniques picturales propres à la Renaissance, de la fabrication des couleurs à la pose de la toile sur les chevalets.
Clélia Renucci saisit assez habilement le quotidien de ces peintres, le contraste entre les moments fugaces qui composent une vie et l'immortalité de leur toile et de leur réputation, et le mêle à des enjeux bien plus vastes que leur simple vie : l'indépendance de la Sérénissime, l'affirmation de sa puissance sur ces nations rivales, aussi bien économique que culturelle, une Venise qui se construit lentement mais fièrement, entre ses palais, ses ponts et ses canaux.
Concours pour le Paradis est un roman qui passionnera à coup sûr les mordus de peinture qui y trouveront un récit assez richement documenté sur les dernières années de vie de Véronèse et des Tintoret (Jacopo, le père, et son fils, Domenico, le véritable maître d'oeuvre de ce fameux Paradis). Aux enjeux proprement artistiques se mêlent, sans surprise, les enjeux politiques et les ambitions personnelles des commanditaires. le Paradis est une toile qui exacerbe les passions, et les espions tournent autour des ateliers, avec l'Inquisition et Rome qui rôdent dans l'obscurité.
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