Tu rajouteras du bois, petit à petit, parce que le feu a besoin d’amour constant : sans heurts, sans accros, sans déséquilibres, sans excès et sans faiblesses, sinon il s’éteint.
En songeant de manière obsédante à cette période, Francesca essaie de mettre des mots sur ce qu’elle a ressenti.
Elle a l’impression que son corps s’est rempli de glace et de fil de fer barbelés. Elle voit la réalité se brouiller, s’éteindre, s’assombrir comme dans un crépuscule qu’elle est la seule à voir, comme une fièvre individuelle et mortelle qu’elle porte en elle à l’insu de tous. A partir de cet instant, le temps, l’espace et les mots n’existent plus. Le monde tout entier disparaît.
Un vide sidéral, voilà ce que devient Francesca.
Tu te diras qu’en fin de compte, c’est cela la métaphore parfaite de toute forêt : une représentation de l’intimité, du recueillement et de la dissimulation de soi. Une projection élégiaque. Le contraire de la haute montagne qui est la métaphore parfaite de l’ouverture à l’autre, de la projection de soi. Une tension vers l’infini
Puis tu ouvres les yeux.
Et tu te dis que c'est le jour ou jamais.
La journée durant laquelle allait se réaliser ce qu'une mystérieuse voix vous avait ordonné à tous deux de faire.
Votre exigence.
Notre exigence.
Tu penseras à toutes les occasions où tu t'es retrouvé dans la même situation. Ces situations où ce n'est pas toi qui décides mais plutôt les circonstances, le hasard, le destin.
Vote regard s'ouvrira et vous aurez l'impression de respirer avec les mêmes yeux.
(...) Vos yeux deviendront liquides et vous regarderez cette gigantesque masse de roche dolomitique comme si elle avait été jetée du ciel par une main invisible et toute-puissante. Face à elle, vous ressentirez de la stupeur, de l'émerveillement et des frissons parcourront votre corps. Elle vous effrayera un peu mais surtout elle vous attirera vers elle.
Pendant un moment tu la trouveras différente, comme si toutes ces années et tous ces conflits n'avaient pas eu lieu. Comme si au fond, un instant seulement, tu avais l'impression d'être toujours le même et qu'elle était, elle aussi, toujours la même.
Tu te diras qu'en fin de compte, c'est cela la métaphore parfaite de toute forêt : une représentation de l'intimité, du recueillement et de la dissimulation de soi. Une projection élégiaque. Le contraire de la haute montagne qui est la métaphore parfaite de l'ouverture à l'autre, de la projection de soi. Une tension vers l'infini.
La forêt touffue, compacte, vous cachera et vous engloutira comme le silence profond engloutit un mauvais souvenir.
Mais votre volonté vous fera surmonter les premières difficultés, comme une force invisible vous poussant à vous dépasser. Et à aucun moment vous ne panserez ne pas pouvoir y arriver.