Citations sur Agatha Christie, tome 5 : Mister Brown (BD) (10)
7 mai 1945, à bord du Lusitania.
Excusez moi, Miss...Vous êtes américaine, n'est ce pas ? Vous aimez votre pays ?
Bien sur, j'aime mon pays. Que me voulez vous ?
Je dois sauver ces documents d'une importance capitale....accepteriez vous de les prendre ? ...Sachez qu'il existe un réel danger ...
J'accepte, mais que devrais je faire après ?
Je prendrai contact avec vous grâce à une annonce dans le Times : "Compagnon de voyage, désire renouer avec etc..."si après trois jours, vous n'avez pas de nouvelles, rendez vous à l’ambassade américaine !
Vous avez toujours été un menteurs. Quand vous avez eu cet accident d'auto et qu'on vous a soigné dans notre hôpital, vous avez trouvé moyen de persuader à notre infirmière en chef que le docteur vous avait prescrit le vin comme remède tonique, mais qu'il avait oublié de le mettre sur l'ordonnance. Vous souvenez-vous ?
— Si je m'en souviens ! Elle rageait, la brave femme, quand elle a découvert le pot aux roses ! J'y étais bien, dans cette vieille boîte
– grâce à vous, Quat'sous ! Il paraît que maintenant ça ne va plus très fort ? L'œuvre manque de fonds, dit-on ?
Mon cher enfant, il n'y a rien que je ne sache sur le coût de l'existence ! C'est un sujet qui n'a plus de secrets pour moi. Nous voilà devant le salon de thé de Lyon's, et nous paierons chacun pour soi. Pas de réplique !
— Figurez-vous, ma chère, qu'elle a tout simplement pleuré quand je lui ai dit qu'en fin de compte je ne pourrais pas lui céder mon appartement ! Mais je vous assure, c'est une occasion unique ! Un modèle d'une grande maison de Paris, Mabel Lewis, l'a acheté elle-même quand elle avait encore de l'argent.
Miss Cowley abandonna très tôt les joies (et les ennuis) de son foyer natal, et se rendit à Londres, où elle suivit les cours de l'école des infirmières. Pendant sa carrière brillante à l'hôpital, elle retrouva un jour parmi les malades son ami d'enfance, Mr Thomas Beresford (saluez, Tommy !) qu'elle n'avait pas vu depuis cinq longues années. La rencontre fut émouvante ! Peu de temps après, l'infirmière Cowley fut réprimandée par ses supérieurs pour s'être montrée au cinéma voisin en compagnie dudit Thomas Beresford. Congédiée à la suite de la crise économique, la talentueuse Miss Cowley essaya en vain le commerce, les P.T.T. et la sténo-dactylographie. Hélas ! rien. Toujours rien ! Chômage complet !
Et maintenant, Tommy c'est votre tour.
— Eh bien, moi, c'est encore moins que cela ! Diplôme du Génie – recherche d'emploi – et depuis douze longs mois rien – rien que la chasse au travail ! Mais il paraît qu'il n'y a plus de travail, nulle part ! D'ailleurs, je ne suis pas un homme d'affaires !
Il a voulu m'adopter jadis, et j'ai refusé.
— Je crois que j'en ai entendu parler dit lentement Quat'sous. Vous avez refusé à cause de votre mère.
— Oui, ce n'aurait pas été chic vis-à-vis de maman. Vous le savez bien, elle n'avait que moi. Le vieux la détestait, il voulait à tout prix m'en éloigner. Je ne me suis pas laissé faire.
— Votre mère est morte, n'est-ce pas ?
De l'argent ! de l'argent, de l'argent ! Je ne pense qu'à l'argent jour et nuit, matin et soir ! Tant pis si je suis mesquine et cupide, mais c'est un fait !
— Je vous comprends ! murmura Tommy.
— J'ai pensé à tous les moyens d'avoir de l'argent. Il n'y en a que trois: hériter, se marier ou en gagner. Le premier est exclu. Je n'ai pas de parents riches. Toutes les vieilles tantes que j'ai sont dans des asiles pour dames de la noblesse ruinées ! J'aide toujours les personnes âgées à traverser les rues, et je ramasse les paquets que laissent tomber les vieux messieurs, pour le cas où ils se trouveraient être des millionnaires excentriques. Mais aucun ne m'a jamais demandé mon nom, et plusieurs ne m'ont même pas dit merci.
Pour la même raison que vous. Je n'en connais pas.
— Ça n'a aucune importance. Vous pouvez en connaître. Moi, si je vois un homme élégant sortir du Ritz, je ne peux pourtant pas m'élancer vers lui et lui dire : « Monsieur, vous êtes riche. J'aimerais vous connaître. »
— Voudriez-vous que je le dise à une dame sortant du même endroit ?
— Ne faites pas l'idiot. Vous ramassez son mouchoir, ou vous lui marchez sur le pied, ou autre chose du même genre. Si elle voit que vous brûlez de la connaître, elle sera flattée et s'arrangera pour rendre la chose possible.
C'est justement la difficulté. Si nous nous rendions célèbres, on nous paierait peut-être pour commettre des crimes !
— Charmant ! approuva Tommy. Surtout de la part d'une fille de pasteur !
— La responsabilité morale, expliqua Quat'sous, ce sont nos parents qui la porteraient, pas nous. Admettez qu'il y a une différence entre voler un collier de perles et être payé pour commettre le vol ?
— Il n'y aurait pas la moindre différence, si on vous prenait en flagrant délit !
— Peut-être. Mais je ne me laisserais pas prendre. Je suis trop intelligente pour cela.
— La modestie a toujours été votre péché mignon.
— Je vous assure, mademoiselle, que je n'ai aucune intention irrespectueuse.
— De quoi s'agit-il ?
— J'ai rendez-vous avec Mr Whittington.
— Par-là, je vous prie.