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4,45

sur 73 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
«La malédiction de l'espoir»

Voilà un premier roman qui fera date ! En entremêlant des parcours très différents, Renaud Rodier réussit une vaste fresque pleine de bruit et de fureur, mais aussi de résilience et d'humanité. Dans leur quête, les personnages vont se croiser et s'enrichir de leur confrontation.

Voilà sans conteste l'un des romans les plus aboutis de cette rentrée. Après un prologue un peu déroutant – la confession d'un homme qui court sur un pont qui n'a pas de fin – on va découvrir les différents personnages au fil des chapitres, à commencer par Lauren Bairnsfather.
Née à Kiowa, un trou perdu du Kansas, la jeune fille va mener une vie solitaire, perchée dans la cabane sur un arbre construite par son quincailler de père, qui passe le plus clair de son temps à bricoler dans son garage. Avec son voisin Kip, tout aussi secret qu'elle, ils vont connaître un parcours scolaire assez tourmenté, qui va culminer lors du bal de fin d'année, dont Lauren sera l'une des rares survivantes. Car c'est avec un fusil mitrailleur qu'un élève va se venger de toutes les humiliations et frustrations subies. Il va transformer la fête en un bain de sang. Lauren décide alors de partir pour New York.
Aaron Friedmann est quant à lui le descendant d'une famille juive de Vienne. Son grand père a échappé aux camps de la mort pour se réfugier à New York. Une histoire qu'il ne découvrira toutefois que bien des années plus tard, après la représentation de Brundibár au Metropolitan. Ce n'est en effet qu'en 1983, après avoir interprété un rôle dans cet opéra pour enfants écrit en 1942, et qui fut mis en scène dans le camp de Theresienstadt, qu'il pourra reconstituer le parcours de sa famille.
Émilie Ruelle est fille d'expats, passant de Rio à Caracas, avant d'atterrir à Mumbai en Inde. C'est là qu'elle fera la connaissance d'Aashakiran Yengde, ou plus simplement Aasha, une intouchable qui va devenir sa meilleure amie. Jusqu'au jour où elle est congédiée pour un vol de bijoux qu'elle n'a pas commis. En rupture de ban, Émilie part alors aussi à New York, plus précisément à l'Université de Columbia.
Quand Kip prend à son tour la parole, c'est pour nous donner sa version de l'histoire, et dévoiler ce que Lauren ignore.
Puis ce sera le tour d'Aasha de rétablir quelques vérités sur ses rapports avec son père, ses relations avec Émilie et sur le financement des ses études dans la prestigieuse Caltech.
Nathaniel Bridge vit pour sa part à Monterey en Californie avec son père Adam. Par un soir de tempête, ils recueillent Olivia, tombée en panne non loin de leur villa. La belle naufragée restera finalement sept ans aux côtés du scénariste et de son fils, avant que ce dernier ne quitte l'adolescence et la Californie pour la Juilliard School de New York.
Puis vient le tour de Harry Bairnsfather de dévoiler un secret de famille, après avoir raconté sa rencontre avec sa femme Becky. Et souligner, pour l'ancien Marine revenu du Vietnam en pièces, que «le mariage, encore plus que la guerre, lui a enseigné que les mensonges sont parfois plus utiles à la survie que la vérité.»
Dans la seconde partie du livre, comme vous vous en doutez, l'auteur va faire se croiser les différents personnages. Émilie va entrer dans la vie de Lauren, puis les deux nouvelles amies vont assister l'une après l'autre à une pièce de théâtre dans laquelle joue Nathaniel. Aaron quant à lui, croisera Lauren sur la grande-roue de Coney Island, ou plus exactement fera croire au hasard de cette rencontre. C'est aussi lui qui fera la connaissance d'Aasha dans les eaux du lac Baïkal. Mais arrêtons-là. Je vous laisse découvrir par vous-mêmes ces fils tissés entre les uns et les autres, cette habile construction romanesque qui permet de mieux cerner, page après page, la personnalité et la psychologie de personnages auxquels on s'attache très vite, notamment en raison de leurs failles et de leurs doutes.
Renaud Rodier a réussi une fresque d'une grande humanité qu'il a lui-même très joliment résumée : «L'histoire tournerait autour de quatre protagonistes, des antihéros esquintés par leur enfance, et de leur quête de l'âme soeur, cet «autre moi» fantasmé, seul à même de les arracher à leur spleen. Une sorte de quête baudelairienne, où l'Idéal et le Beau seraient incarnés par une figure distante et fugitive qui manifesterait ce gouffre croissant entre ce qu'ils étaient et ce qu'ils auraient été capables d'être, la malédiction de l'espoir.»
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu'ici! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre. Vous découvrirez aussi mon «Grand Guide de la rentrée littéraire 2024». Enfin, en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.

Lien : https://collectiondelivres.w..
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Ils sont cinq. Ils ne se connaissent pas, pas encore du moins. Qu'il traverse le pays ou parcourt le monde, chacun tente de mettre le plus de distance avec ses origines, fuyant un passé bien souvent trop lourd à porter avec, en guise de centre névralgique, la tentaculaire ville de New-York.
Cachant leur inadaptation derrière une plastique parfaite et un esprit brillant, Lauren, Aaron, Emilie, Nathaniel et Aashakiran sont en réalité des personnages fêlés, fragilisés par une violente crise identitaire et en quête d'un sens à donner à leur vie…
Mais le destin sait réunir ceux qui se ressemblent et se complètent, pour le meilleur… et parfois pour le pire!

Et bien, je dois dire que j'ai eu un véritable coup de coeur pour ce roman choral magnifiquement orchestré. Avec ce premier texte parfaitement maîtrisé, Renaud Rodier parvient à créer des personnages extrêmement attachants, malmenés par un destin joueur mais capricieux, qui réussissent néanmoins à se sublimer au contact les uns des autres. On les suit ainsi sur quarante ans, au gré des hasards et des coïncidences, leurs routes ne cessant de se croiser pour mieux se séparer. C'est beau, parfois bouleversant, mais surtout c'est à la fois intense et tragique et ça j'adore!

Beaucoup d'émotions donc dans cette lecture digne d'un bon page turner, qui happe le lecteur dès les premières pages et qu'il est difficile de lâcher une fois commencée! le style est très agréable, à la fois fluide tout en étant travaillé. L'auteur prend le temps de planter ses décors et de développer ses personnages, donnant à chacun une voix propre et instaurant ainsi une proximité avec le lecteur et une empathie quasi immédiate. On se sent bien auprès de ces anti-héros qui luttent maladroitement pour remplir le vide qui les oppresse, réparer leurs fêlures ou combler les silences. Alors certes, il y a quelques facilités narratives qui ajoutent à l'aspect romanesque du roman, mais elles ne gâchent en rien le plaisir de lecture. Une très belle découverte en somme et un auteur à suivre!
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Ils sont nés en France, aux États Unis, en Indes. Ils ont grandi dans un monde où l'argent coulait à flots ou dans celui où chaque centime était gagné à la sueur de leur front. Ils étaient entourés ou plutôt solitaires. Si différents, leurs parcours de vie les a pourtant réuni, pour un instant ou pour une éternité. Chacun a cherché longtemps qu'elle était sa place en ce monde… Et le sens à donner à leur exil…

J'ai eu la chance de recevoir ce roman, le tout premier de @renaudrodier. Je le remercie pour sa confiance…

Les échappés est un roman choral parfaitement maîtrisé, où l'on découvre l'univers de l'auteur, son écriture fluide et rythmée, ses personnages attachants et une histoire envoûtante. Parce que cette histoire est bien plus que celle de destins croisés…

Chaque chapitre s'attache à un personnage. On comprend très vite les liens qui les unissent, parce que là n'est pas le coeur du roman. Ce qui anime Lauren, Aaron, Émilie, Nathaniel et Aashakiran est bien plus profond qu'une simple rencontre. C'est la confrontation de mondes différents, la fuite d'un passé douloureux, les secrets de famille qui empoisonnent un présent trop lourd.

Alors, chacun à leur manière, avec leurs forces et leurs fragilités, fuit et s'envole à la recherche de leurs origines. Ils veulent trouver leurs places, leurs rôles, ce que la vie attend d'eux et enfin alléger leurs âmes blessées.

Si chaque lecteur trouvera un sens à cette lecture, nous pourrons tous y puiser la lumière d'une main qui se tend, d'une épaule qui accueille et de bras qui apaisent. La vie est faite de belles et fausses coïncidences… Cette histoire en est la preuve…
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Je n'ai jamais été porté à rédiger des critiques. Je ne me sens ni la compétence ni le droit de le faire. Pourtant, aujourd'hui, j'éprouve le besoin de le faire car ce livre, encore confidentiel, mérite d'être défendu avec autant de ferveur que l'écrivain a déployée pour « protéger » ses personnages cabossés, pour expliquer (et non justifier !) leurs faiblesses. Une grande humanité transparaît derrière cette plume, qui résiste toujours à la tentation de juger. Dans une ère où tout le monde juge tout, tout le temps, quelle bouffée d'air frais ! Ce qui m'a le plus séduit, je crois, c'est que ces anti-héros ne suivent aucun schéma attendu dans leur destin. Leurs (demi) choix, leurs reculs, leurs avancées nous étonnent. Leurs victoires sont teintées d'amertume, leurs défaites apportent une forme de salut. Ils nous ressemblent, vivent à nos côtés, et nous parlent. À travers eux, nous parvenons à mieux nous comprendre, à pardonner nos propres imperfections, et surtout, à croire en la rédemption. Une lecture si enrichissante. Je la recommande vivement !
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Pour une fois, il m'est difficile de jeter des mots pour rendre compte d'une lecture. Je débute donc par l'essentiel: Les échappés est mon coup de coeur de cette rentrée littéraire d'hiver ! Ce roman mérite davantage de visibilité et d'être mis en valeur.

Lauren
Aaron
Émilie
Nathanaël
Aashakiran
Absolue et courageuse liberté ou soumission silencieuse ?

Ces cinq personnages audacieux ont en commun le besoin vital d'échapper à leur condition de naissance. de partir loin de leurs origines pour être capables de les affronter, d'arracher le pansement du passé afin que la plaie cicatrise et, enfin, savoir apprécier le présent.

Audacieux, donc, car chaque personnage nous entraîne sur un chemin que nous découvrons en même temps que lui. Souvent aux antipodes de ce que l'on pourrait imaginer, ils n'hésitent pas, chacune à leur manière, à bousculer l'ordre établi, les convenances, les attendus de leur condition sociale et à changer de trajectoire. En cela, le roman est bouleversant de luminosité ! Car de l'intime de chacun.e d'entre eux se dégage une universalité salvatrice. Aux quatre coins du monde et sur des décennies, leurs histoires se chevauchent. Hasards, coïncidences, destin ? Peu importe, comme eux, laissons nous surprendre par cette roue de la vie. Avec toujours une musique en arrière-fond.

Ce roman transcende tout ! Les frontières, les cultures comme les codes littéraires. Il nous embarque dans une expérience de lecture qui nous laisse affreusement nostalgique après la dernière page. Ah, cette fameuse dernière page...
Pour la savourer, il faut s'être arrêté sur le prologue énigmatique et déroutant, mettant en scène un vieil homme dont les souvenirs s'échappent au rythme des kilomètres parcourus. Car le roman est une boucle dont la compréhension globale s'éclaire grâce aux derniers mots.

Mais la véritable profondeur du texte se révèle avec la mise en abyme dans la 2ème partie du texte, lorsqu'un des personnages p.322 rédige un script qui en tout point correspond au résumé du roman :
« L'histoire tournerait autour de quatre protagonistes, des anti-héros esquintés par leur enfance, , et de leur quête de l'âme soeur, cet « autre-moi » fantasmé, seul à même de les arracher à leur spleen. »
Un texte dans le texte rédigé par Lauren, sorte de double de l'auteur, qui dévoile au fil des pages ses routines d'écriture comme ses inspirations, son départ d'une page blanche et sans plan défini.
Alors que Lauren recherche inlassablement son « Stanley », personnage vu dans une pièce de théâtre de Broadway (interprété par Nathanaël), je me pose alors cette question : qui est le « Stanley » de l'auteur ?

Bilan :
Un roman tel un ballet onirique au grand souffle romanesque, captivant de bout en bout. Une célèbre citation affirme que « celui qui ne sait pas d'où il vient ne peut savoir où il va ». le roman de Renaud Rodier montre que c'est parfois à l'autre bout du monde que l'on peut comprendre et accepter qui l'on est.
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J'ai adoré ce roman acheté sur recommandation de mon libraire. Les Échappés aborde des thèmes complexes - la question des origines etc. - avec une fluidité rare. Je l'ai lu en deux jours! J'ai été particulièrement impressionné par la manière qu'a l'auteur de multiplier les perspectives pour restituer un passé perdu dans les corridors de la mémoire.
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Si vous appréciez la littérature américaine, comme moi, n'hésitez pas. L'auteur, qui semble avoir vadrouillé encore plus que les personnages qu'il met en scène, a vécu aux États-Unis et en Amérique latine, et ces expériences imprègnent tant son style que son imaginaire. Plus que ses influences littéraires (Russell Banks ?), cela se ressent au niveau de "l'espace" qu'il transmet, son habileté à décrire des paysages infinis, aussi vierges qu'une toile blanche, et des personnages soumis aux lois du Destin, comme des pions, mais qui ne s'avouent pas pour autant vaincus.

On ne sait trop comment catégoriser ce roman, qui navigue entre la fresque sociale de "l'Amérique du Milieu", le réalisme magique (quoi ? un rabbin qui traduit des silences), le roman policier, et j'en passe.

Ce que j'ai le plus aimé, c'est que ce livre est aussi imprévisible qu'un OVNI dans sa trajectoire. Renaud Rodier nous nargue presque quand l'une des protagonistes nous parle de tordre des arcs narratifs (J'inclus le passage incriminé comme citation). On sent que tout cela est construit, complet, maîtrisé, mais que l'auteur est tombé amoureux du chaos et s'est mis à son service.

J'aurais pu lui attribuer cinq étoiles – pour un premier roman, c'est absolument ébouriffant – mais je lui mets 4,5 par principe. J'attends de voir ce qu'il fera la prochaine fois, tant j'espère qu'il y en aura une.
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Je n'ai pas l'habitude de poster des revues mais ce roman m'a bouleversée et mérite qu'on en parle. Il s'ouvre sur un prologue énigmatique d'un homme qui erre sous un pont et perd la mémoire à chacun de ses pas... puis nous plonge dans les parcours mêlés de plusieurs personnages, dans différents lieux, à différents moments de leur vie.

Une écriture rythmée, intime, profonde, poétique, en clair-obscur comme ses personnages. Une réflexion sur les mystères que chacun porte en soi, la magie du réel, la mémoire et les mots. Il a fait naître chez moi une émotion rare, la même que lorsque j'ai découvert Roberto Bolaño, Paul Auster, Gabriel Garcia Marquez ou Jonathan Franzen... Les personnages continuent de m'habiter bien après avoir terminé ce livre. Laissez les vivre en vous aussi, lisez Les Echappés de Renaud Rodier !
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Mon coup de coeur pour cette rentrée littéraire 2024. Les Échappés se compose d'une série de confessions à la première personne, retraçant les destins entrelacés de cinq mal-nés à travers quarante ans de leur vie, sur quatre continents. L'auteur maîtrise avec brio ce dispositif choral, qui lui permet de multiplier les points de vue et de dévoiler, avec délicatesse mais aussi une acuité quasi clinique, leurs failles, leurs oublis, leurs dénis. Renaud Rodier explore minutieusement la psychologie de ses personnages à la manière d'un Franzen. Les imperfections de ces anti-héros émeuvent profondément, car elles trouvent écho en nous-mêmes. Les Échappés développe une réflexion profonde sur l'impact de notre passé et de notre environnement sur nos existences. Ce livre questionne la propension humaine à perpétuer les schémas et erreurs observés dans nos histoires familiales ou sociétales. Il s'interroge sur notre capacité à modifier ces schémas. Quelques touches de réalisme magique –un homme égaré sur un pont infini, un rabbin interprétant les silences – confèrent un charme singulier à cette histoire, portée par une écriture précise et rayonnante. Des réminiscences de Gabriel García Márquez, Haruki Murakami et Paul Auster émergent de ces pages. Un personnage affirme d'ailleurs que la vérité suit d'autres règles que la réalité, et que ce qui aurait pu être a parfois plus de poids que ce qui a été. Après cette lecture, cette idée résonne avec force.
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"Les Échappés" est une fresque poignante qui explore la quête de rédemption, où chaque protagoniste, portant le fardeau de son passé, nous touche au plus profond. L'écriture immersive et éclatante de Renaud Rodier nous plonge dans un tourbillon d'émotions, dévoilant avec adresse les liens subtils unissant ces anti-héros tourmentés. Ce livre invite à une réflexion prolongée bien après sa lecture. Avec "Les Échappés", Renaud Rodier signe un grand premier roman, laissant entrevoir l'émergence d'un écrivain d'un rare talent.
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