La connaissance peut toujours être dangereuse. C’est une arme plus puissante que n’importe quelle épée ou n’importe quel sortilège.
« Installez-vous à votre aise, mademoiselle Scrivener. Nous avons un long voyage devant nous. Et plus vite nous nous mettrons en route, plus vite je pourrai retourner torturer les veuves et horrifier les vieillards avec mon infâme magie noire. »
Elisabeth le dévisagea d’un air interdit.
— La quoi ?
— L’inflammation de votre cerveau, mademoiselle Scrivener, expliqua-t-il patiemment. Il s’agit d’une affection assez courante chez les femmes qui lisent des romans.
Elisabeth comprenait désormais que le monde n'était pas tendre envers les jeunes femmes, notamment quand elle se comportaient d'une façon qui déplaisait aux hommes et énonçaient des vérités qu'ils n'étaient pas prêts à entendre.
A toutes les filles qui se sont trouvées à travers les livres.
L'espoir s'agitait en elle à la manière d'un moineau prisonnier d'une maison et voletant au hasard en se cognant aux murs, épuisant ses forces dans son aspiration à rejoindre l'infini de ciel. Et la peur planait derrière lui comme une ombre.
Les gardiens avaient pour mission de protéger à la fois les grimoires du monde, et le monde des pouvoirs que ceux-ci renfermaient.
La directrice ne lui adressait que rarement la parole. Elle était aussi lointaine et inaccessible que la lune, et tout aussi mystérieuse. Pour Elisabeth, sa décision de la garder ici relevait presque de quelque chose de mystique, un peu comme la protection de la bonne fée dans les contes, et ne pouvait pas être remise en cause ni lui être enlevée.
A présent que les fondations de son monde se trouvaient ébranlées, il lui semblait qu'il risquait à tout moment de s'écrouler.
La peur raisonna en elle comme la vibration d'une note sur les cordes d'une harpe.