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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Avoir vingt-ans à Moscou en 1989 quand tout chancelle sous l'oeil d'un oncle colonel du KGB.
Moscou est un vaste théâtre d'ombres où les anciennes positions sont ébranlées par de nouvelles ambitions. Correspondant français pour RFI , l'auteur restitue avec une grande maîtrise les luttes d'influence aussi bien que les misères de la vie quotidienne. Un drame shakespearien chez les Soviets !
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Petit topo sur l'histoire : Anton est un jeune homme de 20 ans qui vit dans un petit village (très) retiré de la Russie, au fin fond de la Sibérie. Alors qu'il détient un pouvoir mystique qu'il ne sait pas encore maitriser, il décide de découvrir d'autres contrées et s'installe chez son oncle Iouri Nesterov, à Moscou. Ce dernier, membre de la célèbre KGB, l'accueille à bras ouverts et lui fait découvrir entre deux missions, la vie urbaine d'une Russie en plein mouvement.
Je découvre la plume d'Olivier Rogez avec ce roman et quelle claque. Son vocabulaire est d'une richesse telle qu'on ne ressent aucune « lourdeur » dans les chapitres et sa syntaxe est d'une telle maîtrise que ce mariage rend la lecture fluide et addictive. le lecteur est spectateur d'un pays divisé entre révolutionnaires et communistes, entre complots, corruptions et manipulations. Bien que romancé, on retrouve des personnages clés de l'histoire de la Russie, notamment Gorbatchev, imaginé dans son intimité ou encore Boris Eltsine, présenté dans ses vices et ses réussites. On est transportés au coeur de l'âme russe, et on prend plaisir à (re)découvrir sa richesse artistique, culinaire et son penchant pour le mysticisme.
J'ai trouvé les personnages recherchés et charismatiques. le personnage type du KGB représenté par Iouri est l'image de l'homme qui n'a peur de rien, qui tente toujours le tout pour le tout et pour qui la confiance en soi est le point d'orgue d'une carrière réussie. D'un côté nous avons un peuple qui prône l'égalité et l'indépendance mais qui puise dans les réserves et regarde l'occident avec des étoiles plein les yeux. Puis, de l'autre côté, nous avons Anton, avec qui on bascule vers une Russie plus profonde, présentant l'image d'un peuple qui tente de survivre et qui cherche du réconfort dans tous ceux susceptible de lui redonner de l'espoir.
En conclusion, Les hommes incertains est un réel coup de coeur. Tout y est : délicatesse et force dans la narration, notions historiques parcimonieuses mais de qualité, sentiments délicats et unanimes. On plonge dans un pan de l'histoire qui a fait basculer des années de communisme corrompu dans un faux-semblant de révolution.
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« Nous sommes en 1989, l'été a laissé place à l'automne et les premiers froids rôdent sur les plaines sibériennes. A des milliers de kilomètres de là, le mur de Berlin se réchauffe, s'apprêtant à tomber tel un morceau de banquise arraché par les cours tumultueux de l'histoire ».

L'empire soviétique s'effondre, la Russie va renaître de ses cendres, ou du moins, un vent d'espoir souffle à déglacer Iakoutsk en plein mois de janvier. Après le mur de Berlin, c'est toute la muraille virtuelle du bolchevisme qui va se fissurer, se rompre avec secousses et fracas. Dans ce tremblement politique du vingtième siècle, le journaliste Olivier Rogez nous entraîne au coeur de Moscou avec son oeil de grand reporter et sa plume de romancier en mêlant avec délice et ingéniosité géopolitique et personnages fictifs.

Les premières pages débutent en Sibérie avec Anton et son père Dimitri. Anton, grand rêveur et doté d'une grâce italienne souhaite partir pour s'affirmer, faire sa vie, il sent qu'il est doté de forces étranges et qu'il a destin à jouer. Malgré tout l'amour qu'il porte à son père, il partira à Moscou mais avec la protection du frère jumeau de son paternel, le colonel Iouri Nesterov, haut responsable du KGB. Ce dernier est une sorte de guépard à la russe, intègre mais incertain, incertain sur le passé, le présent et l'avenir ; on se remémore le livre (et le film) sur cette Sicile de Lampedusa qui doit basculer d'un ancien ordre à un nouveau mais peut-être « tout changer pour que tout demeure ».
C'est qu'en plus d'être lucide, Iouri semble très séduisant, tant pas sa prestance que par cette humanité dans un pays où l'humain n'a guère trouvé sa place. Il va veiller sur son neveu comme du lait sur le feu, comme l'innocence (dans toute sa noblesse du terme) sur le brasier de la perestroïka.

Anton va faire connaissance avec la peintre Helena, compagne de Iouri, avec la mystérieuse Aliona dotée de talents divinatoires et d'un étrange personnage, quasi mystique, un « starets » qui aurait pour nom Volodia (subtil clin d'oeil à Anton Tchekhov) avec un passé aussi étrange que flamboyant, aussi dramatique que magnifique.
S'ajoute une galerie de communistes en perdition et de mafieux en espérance ; tous agissant dans un souterrain plus ou moins visible, plus ou moins glauque, où personne ne peut faire confiance à personne, où l'idéologie politique va progressivement laisser place à la puissance financière.
Deux autres noms apparaissent comme des ombres chinoises, protagonistes de cette nouvelle Russie naissante : Mikhaïl Gorbatchev et Boris Eltsine, un « je t'aime moins non plus » qui marquera les années 90 à jamais, de l'Atlantique à l'Oural. Et bien au-delà.

Que va devenir Anton, ce jeune idéaliste ? Et Iouri, avec le démantèlement du bloc soviétique ? Qui survivra ? Qui se transformera en Icare ? Une roulette russe dans l'incertitude humaine…

Ce roman est une formidable opportunité pour se replonger dans cette période charnière de l'histoire contemporaine, et, un brillant kaléidoscope sur la réalité du communisme et de sa chute. Brillant mais également féroce, rien de « potemkineste » juste un regard sans concession sur l'hypocrisie des apparences, la dichotomie entre le peuple et le pouvoir et la complexité des manoeuvres politiques. le sujet n'est pas nouveau mais le romanesque de la trame le transforme en inédit. Une adaptation sur grand écran ferait d'ailleurs merveille.

Quant aux coulisses du KGB et autres services secrets, c'est une impression particulière qui saisit le lecteur même averti. Est-ce la fluidité de la narration ou bien la savante combinaison (je ne parle pas de lingerie féminine) entre réalité et fiction ? On imagine chaque officier sur la scène du Bolchoï dansant sur le long fil des directives soviétiques, s'obligeant à des arabesques périlleuses, faisant croire qu'ils avancent en faisant des pointes alors qu'ils préparent déjà la valse pitoyable des ogres, un ballet sans cadence rythmé simplement par l'orgueil, la vanité et l'instinct de survie. Jusqu'au jour où le rideau va tomber…

Passion et corruption, amour et désamour, une formidable saga dans la pure tradition des drames russes, ces récits empruntés à l'histoire où chaque évènement n'obéit qu'à un déterminisme inéluctable. Mais où la beauté demeure dans les méandres enlacés de l'aube et du crépuscule.
Lien : https://squirelito.blogspot...
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Prenant place dans une URSS en déclin, on suit les parcours individuels de Iouri, haut gradé du KGB, et son neveu Anton récemment arrivé à Moscou.

Les personnages sont bien construits, on suit avec plaisir leurs évolutions, on les voit se prendre en main, se construire.

Un livre où le destin des personnages résonne avec le destin d'une nation.

J'ai trouvé très belle et très bien écrite la relation entre Iouri et son neveu.
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