Promiscuités

Murs

Le soir venu, je m’accroche au plafond. J’attends. Il ne se passe rien, ce n’est pas la question. J’entends le son de la télé, j’écoute à peine, j’entends le tic-tac d’une horloge murale, j’écoute à peine, j’entends des voix, j’écoute à peine. J’écoute quand même. Je fais le vide, je gobe l’insecte. Parfois, je le laisse vivre. Je lui demande simplement de ne pas trop m’approcher. Le
soir venu, tu comprends, j’aime la solitude. Je la trouve là-haut, oui : au plafond. Et je ferme les yeux.

Près du lit

La photo de sa femme, la photo de sa fille. Et un piano. Lui seul le sait. Quand il ferme les yeux. Ses doigts alors tremblent, s’épuisent. Tandis que son visage exprime : la douleur. De jouer moins bien qu’avant. D’avoir des trous de mémoire. Il s’est, depuis longtemps, brouillé avec sa fille. Sa femme aussi s’en est allée. Elle buvait trop. Lui disait-il. Il reste la musique : une Fantasiestucke. De Schumann. Il la connaissait par cœur. Et il la jouait si bien. Lui disait-elle.

Une rencontre avortée

Elle, enrhumée, assise au chaud à l’intérieur d’un calme bistrot, le calepin posé sur la table, près d’un portable, a commandé, d’une voix douce, une infusion avec un nuage de lait.
Lui, à la table d’en face, l’observe du coin de l’œil, attiré par ce qu’il considère un charme rêveur et mélancolique, mais qu’il ne sait comment aborder sans lui paraître ridicule ou importun, a demandé une nouvelle bière pression.

Et s’il n’en reste qu’un

Il s’est installé dans la dernière cabine téléphonique de la ville. C’est là qu’il vit désormais. Il veut être le premier à décrocher quand ça sonnera de nouveau et, il en est absolument persuadé, ça finira bien par sonner, un jour ou l’autre

Cette sensation

L’odeur de mort, âcre et prégnante, je l’ai connue dans la maison de mon enfance ; c’était celle des punaises que j’écrasais volontiers contre le rebord de la fenêtre les jours d’ennui, les jours d’été.