Je le sais désormais, en tant que lecteur, il faut faire confiance à l'auteur, au poète. Ils savent comment s'y prendre pour nous extirper de notre vie ordinaire et nous envoyer tanguer dans un autre monde dont nous n'avions même pas soupçonné l'existence. C'est ce que font les auteurs de talent. C'est ce que fit M. Baudelaire. p. 172-173
Très beau livre , beau monologue écrit avec une écriture un peu précieuse certes mais agréable à lire . Amour passionné pour son époux et pour cette maison que l'on va détruire et qui lui rappelle tout ce qu'elle a vécu , (bonheur et chagrins) avec cet être qu'elle a tant aimé .Bravo à l'écrivain pour cette écriture raffinée .
Le besoin de lire s' emparait de moi et exerçait sa délicieuse et grisante emprise. Plus je lisais, plus j'avais faim. Chaque ouvrage était riche de promesses, chaque page que je tournais était une équipée, l'attrait d'un autre monde.
« Je vous écris ces mots assise dans la cuisine vide. Les meubles ont été emballés la semaine dernière et expédiés à Tours chez Violette. Ils ont laissé la table, trop encombrante, ainsi que la lourde cuisinière en émail. Ils étaient pressés et je n’ai pu souffrir ce spectacle. J’en ai haï chaque minute. La maison dépouillée de tous ses biens en un si court instant. Votre maison, celle dont vous pensiez qu’elle serait épargnée. Ô, mon amour, n’ayez crainte, je ne partirai jamais. » [p.11]
Rose, vous êtes désormais gelée, comme si vous n'osiez plus éclore, comme si vous n'osiez plus vous offrir à moi, laissez votre séduisant parfum m'ensorceler alors que vos délicieux pétales s'ouvrent un à un.
« J'étais tellement folle de chagrin que je ne parvenais pas à comprendre votre calme. Je me rappelle avoir pensé : face à la mort d'un enfant, les hommes sont-ils plus forts que les femmes parce qu'ils ne mettent pas au monde ? Les mères ne sont-elles pas attachées à leurs enfants par quelque lien secret, intime et physique que les pères ne peuvent connaître ? »
« Personne ne se souviendra de la rue Childebert, de la rue d'Erfurth, la rue Sainte-Marthe. Personne ne se souviendra du Paris que nous aimions, vous et moi »
« Oh, quelle douleur, quelle horrible douleur. Je ne peux la laisser entrer. Je dois lutter, ne pas lui céder. Si je le fais, je sombrerai en elle, elle me videra de mes forces. »
« D'ici une centaine d'années, quand les gens vivront dans un monde moderne que nul ne peut imaginer, pas même les plus aventureux des écrivains ou des peintres, pas même vous, mon amour, quand vous vous plaisiez à envisager l'avenir, les petites rues paisibles dessinant comme les allées d'un cloître autour de l'église seraient enfouies et oubliées, pour toujours. »
« Cette maison est mon corps, ma peau, mon sang, mes os. Elle me porte en elle comme j'ai porté nos enfants. Elle a été endommagée, elle a souffert, elle a été violentée, elle a survécu, mais aujourd'hui, elle va s'écrouler. Aujourd'hui rien ne peut la sauver, rien ne peut me sauver.»
" Rose, Rose enchanteresse, à la tige sans épines, ornée de bourgeons de l'amour et de la tendresse."
" Rose, chère Rose, la lueur de vos yeux est comme l'aube, et je suis seul à pouvoir la contempler."
Alexandrine est comme ce fascinant cactus qu’avait Maman Odette, d’une douceur trompeuse et terriblement piquant.