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Citations sur La force majeure (10)

L’appoint de la joie est nécessaire à l’exercice de la vie comme à la connaissance de la réalité.
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Affirmer le caractère névrotique de l'espérance peut certes sembler paradoxal : puisqu'on tient généralement celle-ci pour une vertu, c'est à dire une force. Pourtant il n'est pas de force plus douteuse que l'espérance. Ce n'est sans doute pas par hasard, ni par l'effet d'une erreur de copiste, que Hésiode assimile, toujours dans Les travaux et les jours, l'espoir au pire des maux, au fléau qui est resté dans la boîte de Pandore, à la libre disposition des hommes qui s'y précipitent dans la pensée qu'ils y trouveront le salut et le contre-poison à tous les autres maux, alors qu'il s'agit d'un poison parmi les autres, sinon du poison par excellence. Tout ce qui ressemble à de l'espoir, à de l'attente, constitue en effet un vice, soit un défaut de force une défaillance, une faiblesse, - un signe que l'exercice de la vie ne va plus de soi, se trouve en position attaquée et compromise. Un signe que le goût de vivre fait défaut et que la poursuite de la vie doit dorénavant s'appuyer sur une force substitutive : non plus sur le goût de vivre la vie que l'on vit, mais sur l'attrait d'une vie autre et améliorée que nul ne vivra jamais. L'homme de l'espoir est un homme à bout de ressources et d'arguments, un homme vidé, littéralement "épuisé" ; tel cet homme dont parle Schopenhauer, qui "espère trouver dans des consommés et dans des drogues de pharmacie la santé et la vigueur dont la vraie source est la force vitale propre".
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Toute joie parfaite consiste en la joie de vivre, et en elle seule.


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Une des marques les plus assurées de la joie est, pour user d’un qualificatif aux résonances fâcheuses à bien des égards, son caractère totalitaire. Le régime de la joie est celui du tout ou rien : il n’est de joie que totale ou nulle (et j’ajouterai, anticipant sur la suite de mon propos, qu’il n’est de joie qu’à la fois totale et de certaine façon nulle). L’homme joyeux se réjouit certes de ceci ou de cela en particulier ; mais à l’interroger davantage on découvre vite qu’il se réjouit aussi de tel autre ceci et de tel autre cela, et encore de telle et telle autre chose, et ainsi de suite à l’infini. Sa réjouissance n’est pas particulière mais générale : il est « joyeux de toutes les joies », omnibus laetitiis laetum, comme le dit un amoureux comblé dans une pièce du dramaturge latin Trabéa, partiellement citée par Cicéron. Parole pénétrante, encore qu’on ignore tout du contexte dans lequel elle se situait. Ce que suggère une telle parole peut à peu près s’énoncer ainsi : il y a dans la joie un mécanisme approbateur qui tend à déborder l’objet particulier qui l’a suscitée pour affecter indifféremment tout objet et aboutir à une affirmation du caractère jubilatoire de l’existence en général. La joie apparaît ainsi comme une sorte de quitus aveugle accordé à tout et à n’importe quoi, comme une approbation inconditionnelle de toute forme d’existence présente, passée ou à venir.

La force majeure, p. 7-8
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Conséquence curieuse de ce totalitarisme : l’homme véritablement joyeux se reconnaît paradoxalement à ceci qu’il est incapable de préciser de quoi il est joyeux, de fournir le motif propre de sa satisfaction. Car il aurait sur ce point beaucoup trop de choses à dire en général, tout en ne trouvant rien à alléguer en particulier.

La force majeure, p. 8
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La langue courante en dit beaucoup plus long qu'on ne pense lorsqu'elle parle de "joie folle" ou déclare de quelqu'un qu'il est "fou de joie". Tout homme joyeux est nécessairement et à sa manière un dé­raisonnant. Mais il s'agit là d'une folie qui permet d'éviter toutes les autres, de préserver de l'existence névrotique et du mensonge permanent. À ce titre elle constitue la grande et unique règle du savoir-vivre
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Le régime de la joie est celui du tout ou rien : il n'est de joie que totale ou nulle(...) [ I ]
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La joie est un plein qui se suffit à lui-même et n'a besoin pour être d'aucun apport extérieur.
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... il y a dans la joie un mécanisme approbateur qui tend à déborder l'objet particulier qui l'a suscitée pour affecter indifféremment tout objet et aboutir à une affirmation du caractère jubilatoire de l'existence en générale.
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Cette manière moderne d’ignorer Nietzsche par le biais d’un commentaire enthousiaste soit du fait que Nietzsche ne pense pas, soit du fait qu’il pense dans le sillage d’une modernité post-hégélienne, équivaut évidemment à une fin de non-recevoir (…) Il y aurait sans doute à s’interroger sur les causes d’une telle fin de non-recevoir, qui persiste près d’un siècle après la mort de Nietzsche. La raison fondamentale de ce rejet me paraît résider en ceci que tout discours totalement affirmateur, comme l’est celui de Nietzsche ou comme le sont ceux de Lucrèce et de Spinoza, est et a toujours été reçu comme totalement inadmissible. Inadmissible non seulement aux yeux du plus grand nombre, comme l’insinuait Bataille dans son livre sur Nietzsche, mais aussi, et je dirais plus particulièrement, aux yeux du petit nombre de ceux qu’on appelle les "intellectuels" .
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