Je remercie Babelio et les éditions Eyrolles pour ce privilège de lecture.
Un prologue qui vous laisse sans voix, et sans voie au milieu du désert du Ténéré, où sous une chaleur de plomb, les gens crèvent, leurs cadavres s'amoncèlent. Ce ne sont que de pauvres hères qui fuient la misère ou la guerre ou la famine ; ils espèrent juste aller ailleurs vers une vie meilleure.
Parmi Nour, 17 ans, androgyne, transgenre qui fuit la persécution de sa famille et de son village en raison de ce qu'elle est.
« Je suis Nour Rassol. Je viens du Bénin. »
Dans le camp de Choucha au sud-est de la Tunisie, Nour n'est pas à l'abri. Un camp de transit ? Plutôt le concentré de ce qu'il y a de pire dans l'humanité, la loi du plus fort pour exploiter encore plus la détresse qui les conduisent là.
Mais Nour ne veut pas être une victime, elle est comme un fauve toujours sur ses gardes, prête à en découdre au risque de sa vie.
« Elle doit se méfier de tous. Et de toutes. Mais surtout d'elle-même. Elle garde ses distances. L'amitié est un terrain dangereux. Elle pourrait s'attacher. Se livrer. Et alors, elle serait nue et vulnérable. Son secret la protège et l'éloigne. Même de sa seule amie. »
Dans ce camp elle aura pour alliée Loubna une Syrienne, surnommée la lionne. Loubna a beaucoup subi et veut protéger à tout prix.
Il y a aussi le docteur qui fait ce qu'il peut avec ce qu'il a, c'est une oreille attentive.
Surtout il y a Amou et sa bande. Amou est trafiquant fils d'une Libyenne et d'un Italien, qui a abandonné mère et enfant. Sa famille Libyenne les a rejetés tous les deux.
Ces quatre personnages dans leurs interactions vont nous faire vivre au coeur de la réalité de ce camp.
Cette histoire est racontée sur le rythme d'un lamento à ceci près que des perles d'espoir infusent ce désir d'aller jusqu'au bout de cette horreur.
Sombre, cruelle, réaliste la vie quotidienne est juste insupportable et les commandes du lieu sont données ou prises par des hommes qui ne sont que des bombes à retardement.
Les drogues sont omniprésentes plus facile à trouver que la nourriture et l'eau.
Pour Nour sa vie entière tient à un papier qui soit conforme à ce qu'elle veut être.
Pour découvrir Nour il faut que le lecteur suive les petits cailloux semés sur cette voie faite d'embûches.
Cette lecture est souvent insoutenable, il faut laisser du temps mais elle me semble au plus près de la réalité.
L'interrogation demeure à qui profite le crime ?
Dans son discours parlementaire du 1849
Victor Hugo disait :
« Je ne suis pas, messieurs, de ceux qui croient qu'on peut supprimer la souffrance en ce monde ; la souffrance est une loi divine ; mais je suis de ceux qui pensent et qui affirment qu'on peut détruire la misère. »
Quand on voit l'état du monde l'angoisse est grande.
©Chantal Lafon
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