Citations sur Hallali pour un chasseur (22)
on rêve de voler avec l’oiseau, de courir avec la gazelle, de ramper avec le serpent, de nager avec le crocodile, de grimacer avec le singe (sans avoir la prétention de lui apprendre à faire la grimace !), de barrir avec l’éléphant et, le plus drôle, de rire av ec l’hyène, ou encore de vagir, de rugir, de mugir et, le pire, de pratiquer la « politique de l’autruche », tête enfouie sous des chimères.
C’est infernal d’être étranger à soi, à celui qui cherche à récurer sa mémoire pour que rien n’ait plus un a ir de famille avec ce qui a été, et à chambouler l’échelle des valeurs, déraciner les souvenirs comme on déracine les mauvaises herbes.
Tout à coup, le goût des fruits sauvages me submergea et déclencha en moi le désir. Dès que ma bouche voulait mordre dans un fruit, elle se tournait vers Malika comme vers la chair d’une mangue gorgée de soleil dont la saveur étanchait ma soif, momentanément.
Là où je suis debout face à vous tous, des vieillards, des femmes et des enfants ont été achevés à la machette sans pitié. Au bord des ravines, au pied des cascades, au sommet des cratères, les Blancs ont assassiné la liberté une fois de plus
Le monde est un, indivisible, et le miracle n’est que naturel si on aime l’odeur des grands félins. À condition de se souvenir néanmoins que la brousse exhale un arôme grisant, qu’elle est régie par ses propres lois, dont celle-ci, la plus édifiante selon moi, gravée dans l’écorce du baobab : tout arrive ici, surtout ce qui ne doit pas arriver… L’effet de surprise est total.
On ne se méfie pas assez de ce qui est inconnu. Lorsqu’on chasse, la mort frappe dès qu’on relâche son attention. Elle frappe dès qu’on est sourd aux pas feutrés, indifférent aux branches qui s’agitent, insensible à l’odeur de la peur. Et elle frappe aussi dès qu’on se méprend sur le monde des sentiments.
Il est des nuits où, ne pouvant pas dompter ce cœur qui s’affole face à la ligne de mire du destin, on tombe de cauchemar en cauchemar, et l’épouvante de la chute conforte le sentiment de la fragilité de l’être pris dans le jeu de la traque. Il est des nuits qui pleurent, gémissent, rugissent. Il est des nuits dont on ne sait pas si elles se termineront ou pas, on sue, on suffoque, on succombe au mirage dans le désert du Kalahari, l’esprit critique émoussé. Il est des nuits où l’on se sent seul à chercher une issue, d’un côté ou d’un autre.
Et c’est toujours la nuit.
Et c’est toujours l’insomnie.
Puis c’est l’aube nouvelle.
La jalousie m’amènerait également à me conduire de façon aberrante, à perpétrer des actes odieux.
C’est connu que la fièvre fait dire n’importe quoi au malade. On laisse divaguer ses pensées hors du raisonnable. On soupire pour un câlin. On minaude. On geint. On sanglote.
...au fil de mes années de chasse, j’avais appris à amadouer ma fougue. Je me comporterais avec le vieil homme comme avec un félin. Ne pas le sous-estimer. Ne pas foncer sur lui tel un buffle, mais analyser chacun de ses mouvements.