Les historiens interrogent toujours l'histoire en fonction du moment présent. La science historique s'est passionnée au cours des dernières décennies pour la mondialisation qui nous occupe tant. Ils en ont cherché les origines et les prémices, illustrant la précocité du désir des hommes pour la recherche de l'ailleurs, les échanges de biens et d'idées ; le tout en sortant enfin du regard européo-centré.
Maurice Sartre poursuit cet effort en scrutant sa période d'études : l'Antiquité. Il recherche dans les textes et l'archéologie les traces les plus anciennes de découvertes, de voyages au-delà des mondes connus, de circulation de biens et de marchandises parfois entre des mondes qui s'ignoraient.
Les sources sont bien sur la difficulté essentielle : une allusion dans un texte antique, un témoignage de troisième main qui mêle une vérité probable à cent fantasmagories ; un bas-relief représentant Héraclès avec un geste évoquant Bouddha, une inscription latine en hommage à l'empereur Antonin dans une île tout au sud de la Mer Rouge...
Pourtant à partir de ces traces,
Maurice Sartre nous entraine dans un véritable voyage d'aventure. Nous y rencontrons quelques personnages fascinants; comme ce Pythéas, grec de Marseille de la fin du IVe avant JC qui a probablement atteint l'extrême nord de l'Europe, même si les géographes de l'Antiquité le traite de " grand menteur". Pythéas affirme avoir vu le soleil briller sans discontinuer ce qu'il n'a pu inventer.
L'auteur anonyme du " périple en mer d'Erythrée" livre un témoignage sur la navigation le long des côtes de l'Afrique et vers l'Inde.
Une mention a particulièrement retenue mon attention : l'auteur Marin de Tyr relate les voyages d'un marin appelé Diogène, qui, revenant d'Inde, fut repoussé par des vents, à hauteur des "lacs d'où coule le Nil" , lacs qui se situent à 800 km à l'intérieur des terres, indiquant ainsi que l'information des sources du Nil était parvenue aux méditerranéens de cette époque.
Le chapitre " la vie mouvementée de Sôphytos" débute sur une inscription en grec, provenant d'Afghanistan, qui retrace les mésaventures d'un Indien issu d'un riche famille lui ayant donné une éducation grecque.
Le chapitre 14 "l'ambassade d'Andoun" fait référence à "l'histoire des Han Postérieurs" de Fan Ye qui relate une improbable ambassade envoyée par l'empereur
Marc-Aurèle au IIe siècle de notre ère à la cour de Chine. Il n'y a pas de traces de cette ambassade dans la documentation de l'empire romain.
Aussi loin que la mémoire des hommes puissent remonter, ceux-ci ont toujours été poussés vers la découvertes de nouvelles terres, la volonté de voir où le monde finissait et aussi de rencontrer d'autres cultures. C'est bien ce que l'auteur voulait montrer. le monde d'aujourd'hui est né de cette envie puissante dont il ne faut pas négliger les effets positifs. Pour autant, les mécanismes de la mondialisation actuelle ne sont peut être pas les mêmes que ceux des échanges antiques, si on se réfère à la littérature économique.