AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,73

sur 190 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Nul besoin d'écrire un pavé pour proposer un livre à la fois intelligent, intéressant et percutant. Dans l'affaire Collini, Ferdinand von Schirach nous initie avec simplicité et efficacité aux arcanes de la justice allemande. L'écriture précise de l'auteur avocat, sans grandes envolées ni pathos particulier, nous amène à vivre un procès dont le coupable ne fait aucun doute (puisque nous "vivons", dans le premier chapitre, le meurtre de la victime, un vieil industriel) mais dont le mobile est inconnu. Il nous emmène également, sans qu'on ne le sache, visiter un passé que, j'imagine, l'Allemagne et les Allemands aimeraient bien pouvoir planquer sous leur tapis ou dans leur placard.
Et au travers de ce procès qui semble plié d'avance, avec un jeune avocat fraichement diplômé lié à la victime et défendant un coupable qui se tait, von Schirach ouvre le débat sur un tas de questions qui dépassent largement le cadre de la fiction, de l'Allemagne et de son passé. Par exemple, à quoi sert la justice ? Quelles actions sont acceptables ou pas en temps de guerre ? Comment la justice peut-elle traiter les dossiers des "exécutants" qui obéissent aux ordres de leur supérieur ? Comment une pirouette législative peut-elle donner l'immunité ?
Et, si la Justice échouait à rendre justice, est-il alors acceptable de rendre justice soi-même ?

Si Ferdinand von Schirach ouvre les débats, il n'apporte pas pour autant de réponse, mettant un terme (inattendu) à l'affaire Collini. Mais, petit-fils du chef des jeunesses hitlériennes, il prend position. du côté des victimes.
Une très belle découverte.
Commenter  J’apprécie          302
"Tu es qui tu es". C'est sur cette tautologie que se clôt le roman.
Loin d'être une figure de style gratuite cette affirmation prend son sens à la lecture de ce récit court mais d'une ambitieuse portée.
Dès les premières lignes j'ai renoué avec un plaisir non dissimulé avec l'écriture froide et dense de Ferdinand von Schirach.
À Berlin, un ouvrier italien sans passé judiciaire, Fabrizio Collini, abat un octogénaire allemand, et s'acharne sur sa victime. La victime, c'est Hans Meyer, un industriel estimé.
Contrairement au bref résumé, rien n'est simple.
L'enquête se heurte à un premier écueil avec le mutisme total de l'assassin quant à son mobile.
Comme on n'a pas grand-chose à se mettre sous la dent pour avancer Ferdinand von Schirach va s'attarder sur le jeune avocat et ses liens personnels avec Hans Meyer, un grand père aimant et sa belle famille. le récit, pendant la première moitié du livre reste neutre, gris et on reste largement à la périphérie de l'enjeu.
Le suspense est de fait bien ménagé.
Plus intéressant à mon goût est, pendant le procès de l'accusé, la révélation du passé. le vieil homme était un ex commandant SS et la relecture de ses actes plus de soixante ans plus tard prend un nouveau sens.
L'histoire de ce bourreau SS est de fait inspirée d'une histoire vraie.
L'intrigue se polarise alors sur la façon dont l'Allemagne a soldé son passé hier et la façon dont elle l'interroge aujourd'hui.
La bataille juridique portant sur la promulgation d'une loi et ses conséquences sont au coeur du procès. C'est assez technique et l'auteur, en bon pédagogue, met en scène la problématique pour un public non initié.
Contrairement à ses nouvelles qui collent aux faits réels sans fiction additionnelle, Ferdinand von Schirach propose ici un roman. Il étoffe le récit avec une intrigue autour de l'avocat, son passé, sa personnalité, ses tâtonnements de néophyte...On comprend son intention. Il s'agit de montrer que les anciens nazis ont repris l'apparence d'hommes ordinaires voire sympathiques. Avec la fiction, l'histoire et les questions de droit, se trouvent incarnées.
On est à la confluence d'un roman à suspense, d'un drame personnel, d'un livre de procès, d'histoire. C'est avant tout un livre engagé que l'on lit d'une seule traite.
Un livre qui a contribué par son succès à faire avancer la réflexion et l'ouverture d'une Commission d'enquête en Allemagne " pour évaluer l'empreinte laissée par le passé nazi"



Commenter  J’apprécie          144
Ah ! Que je suis contente d'avoir mis la main sur un nouveau récit de Ferdinand von Schirach.

J'ai énormément apprécié la qualité de ses nouvelles, tant pour l'écriture, factuelle et concise à souhaits, que pour les dénouements parfois astucieux voire machiavéliques des Crimes, la façon de démasquer les Coupables ou la justesse de la Sanction appliquée ! 

J'appréhendais un peu d'être déçue par un ouvrage plus long ! Mais que nenni ! Les 160 pages sont le juste nécessaire au récit de l'affaire ! 

Hans Meyer, un riche industriel octogénaire est assassiné par un inconnu qui s'est présenté comme journaliste dans sa chambre de l'hôtel Adlon à Berlin. 

Son forfait accompli, couvert d'éclaboussures sanglantes, le talon d'une chaussure abîmé par les coups portés sauvagement au visage de la victime, il demande à ce qu'on appelle la police, et l'attend sagement, assis sur une banquette du hall. 

 Un jeune avocat, Caspar Leinen, est commis d'office. Ce sera le premier procès d'assises, mais Fabrizio Collini refuse de s'expliquer sur les mobiles de ce crime.

Quand il découvre l'identité de la victime, Leinen essaie de se faire récuser : il a bien connu la famille Meyer, son meilleur ami d'enfance, petit-fils de la victime, l'a beaucoup invité dans les différentes résidences familiales , il a beaucoup côtoyé Hans Meyer qui lui a appris à jouer aux échecs. 

Faisant fi des offres mirobolantes qui l'invitent à laisser tomber l'affaire, Caspar Leinen débusquera les évènements anciens qui ont conduit Fabrizio Collini à accomplir son forfait, et à obtenir une justice.

Un roman extrêmement bien écrit, où l'auteur évoque sans pudeur, ni pathos, les événements tragiques de la fin de la seconde guerre mondiale et nous éclaire sur des spécificités de la justice allemande.

Un excellent ouvrage d'un auteur qui n'écrit malheureusement pas assez à mon goût !   
Lien : http://les-lectures-de-bill-..
Commenter  J’apprécie          120


Je pense que c'est l'aspect documentaire qui a forcé ma réticence à lire des romans policiers.

J'ai souvent du mal avec le suspens, j'avoue que je commence souvent les romans par la fin, pour ne pas attendre un dénouement et me consacrer uniquement à l'écriture.

Ici, ce n est pas la peine puisque la scène de meurtre commence le roman.

Il reste le mobile et les raisons pour lesquelles le meurtrier ou l'assassin ,nuance juridique importante pour le coupable , a tué de façon aussi brutale Hans Meyer , respectable industriel.

C'est l'intérêt du roman et de façon très précise et très bien documenté , le lecteur comprend à la fois le système judiciaire allemand et sa difficulté à juger son passé nazi

Sans aucun pathos , on est saisi d'effroi par les malheurs de Fabrizio Collini.

Il était bien évident qu'il ne pouvait s'agir d'un crime gratuit mais on prend conscience qu'un appareil judiciaire injuste peut pousser un homme à la vengeance.

J'ai été très sensible également aux deux vies de la victime : le commandant SS Hans Meyer et le gentil grand père qui faisait le bonheur de ses petits enfants.

Je me souviens de l'interrogation des membres de ma famille qui avait connu la guerre, face aux touristes allemands du même âge qu'eux: comment faisaient-ils pour revenir en France?

Et jamais, je n'ai reconnu dans la gentillesse allemande des touristes comme des familles de nos correspondants l'image des nazis massacrant des gens sans défense.

Un livre écrit au plus près de la vérité, sans se perdre dans des considérations psychologiques et incroyablement efficace.


Lien : http://luocine.over-blog.com..
Commenter  J’apprécie          100
Avec "L'affaire Collini", Ferdinand von Schirach livre un récit remarquable ET heureusement remarqué puisque "quelque mois après sa publication en Allemagne, le ministère fédéral de la Justice a institué une commission d'enquête indépendante pour évaluer l'empreinte laissé par le passé nazi sur le ministère".
Ce court récit (172 pages) de 2011 a eut un impact en Allemagne par tout ce qu'il dénonce, comme par exemple, le degré de responsabilité des criminels nazis, de leurs complices "exécutants" et des "criminels de bureau" (à savoir les organisateurs de la déportation depuis leur bureau) ainsi que la question des délais de prescription de ces crimes.

L'histoire est prenante, le procès est passionnant.
Un très bon livre qui pose encore aujourd'hui des questions essentielles.

En 2022 (année de lecture du livre), certes, de moins en moins de personnes pourront rendre comptes de leurs actes pour crime sous le IIIème Reich, mais encore beaucoup souffrent de ce qui a été perpétré durant cette sombre période ; voilà pourquoi, il est important d'exorciser le mal en débattant de questions concrètes telles que celles présentées dans ce livre.

Ferdinand von Schirach est une plume fluide et intelligente dans le sens où il nous fait réfléchir.
Très bon livre.
Commenter  J’apprécie          40
Avec une belle écriture fluide et percutante à la fois, l'auteur parle très bien de ce qu'il connait. Il est avocat allemand lui-même. Il nous raconte un procès "historique" en Allemagne. Jamais ennuyeux, avec les descriptions adéquates, ce court roman m'a captivé. Ses deux précédents ouvrages étaient des recueils de nouvelles. Espérons que pour le prochain, il se lance sur du lourd avec le même talent.
Commenter  J’apprécie          40
Je ne m'attendais pas à un roman aussi édifiant. On part d'un cas assez classique : un homme en tue en autre. On sait d'emblée qui est le meurtrier. Un jeune avocat lui est commis d'office. Coincidence : il connaît bien la victime même s'il l'avait perdue de vue depuis de nombreuses années. Mais le roman ne s'arrête à ce dilemme, loin de là. À un rythme tranquille, mais certainement pas ennuyeux, nous naviguons dans les arcanes de la justice allemande face à son passé. La démonstration faite par l'auteur est brillante et est même sans doute à l'origine de la suspension d'une loi. Un style sobre et efficace au service d'une cause importante. A lire.
Commenter  J’apprécie          30
Ecriture tel un documentaire

Froid précis et percutant
Commenter  J’apprécie          30
C'est par ce bouquin que je suis entré dans l'"univers " de von Schirach.
Je le découvre dans sa langue puisque je lis l'allemand sans trop de mal, du moins tant qu'il ne s'agit pas de haute voltige en philo ou, que sais-je, en argot local, ou en technologie, ou encore en science ou en tout autre spécialité...
Tout ça pour dire que la langue de von Schirach n'a rien d'ésotérique. Elle est classique et fluide, sobre et sans aucune affèterie. Elle ne ronfle pas vers le pathos mais sa force, parfois, émane précisément de sa sobriété. C'est une langue simple et belle.
Je ne sais ce qu'en a fait la traduction dans les versions éditées pour la France. J'espère qu'elles sont à la hauteur.

Avec "L'affaire Collini", von Schirach a sans doute eu fort à faire avec ses propres conflits intérieurs, puisque comme chacun sait il est un avocat réputé mais aussi le petit fils d'un haut dignitaire nazi, qui fut en charge notamment du formatage de la jeunesse hitlérienne...

L'attitude de l'inculpé qu'il met ici ici en scène nous est expliquée avec autant d'habileté que de sobriété.
De Fabrizio Collini, cet homme tout juste retraité, italien ayant émigré après guerre pour devenir en Allemagne chez Mercedes un ouvrier modèle, de cet homme fermé dans un mutisme résolu après s'être rendu coupable d'un meurtre prémédité et sauvagement perpétré sur un industriel célèbre, de cet homme c'est un jeune avocat fringant et fraîchement diplômé, Caspar Leinen, qui va faire son premier vrai "client".
Et nous, avec ce jeune avocat on plonge dans le passé de nos pères, ou de nos aïeux, ou de leurs ennemis jurés du temps de leur jeunesse ardente, c'est selon... Avec lui on découvre comment fait le pouvoir (voire même peut-être comment font sans doute, partout dans le monde, les pouvoirs en place) pour balayer la poussière embarrassante sous le tapis du temps. Avec des lois pour oublier, des lois pour endormir...

Dans sa langue simple et belle, sans effet de manche, von Schirach nous fait entrer dans l'histoire en nous ouvrant la porte des coulisses. Il nous épargne, autant que possible, la technique des juristes et leurs formules cabalistiques. Il nous fait devenir plus humains, en nous donnant à comprendre mieux le silence des coupables comme celui des vraies victimes, voire celui de ceux qui les vengent...

Le moins qu'on puisse dire est qu'il s'en tire avec les honneurs. Respect, Maître !
Commenter  J’apprécie          20
Roman très intéressant sur la découverte de crimes nazis oubliés lors d'un procès. Apprentissage d'un jeune avocat commis d'office qui viendra provoquer des remises en question profonde des jugements anciennement perpétrés durant la Guerre. Se lit comme un polar. du très bon !
Commenter  J’apprécie          20




Lecteurs (380) Voir plus



Quiz Voir plus

Quiz: l'Allemagne et la Littérature

Les deux frères Jacob et Whilhelm sont les auteurs de contes célèbres, quel est leur nom ?

Hoffmann
Gordon
Grimm
Marx

10 questions
416 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature allemande , guerre mondiale , allemagneCréer un quiz sur ce livre

{* *}