Citations sur Le monde comme volonté et comme représentation (287)
L’homme est un animal métaphysique. Sans doute, quand sa conscience ne fait encore que s’éveiller, il se figure être intelligible sans effort ; mais cela ne dure pas longtemps […]
[…] Par métaphysique, j'entends tout ce qui a la prétention d'être une connaissance dépassant l'expérience, c'est-à-dire les phénomènes donnés, et qui tend à expliquer par quoi la nature est conditionnée dans un sens ou dans l'autre, ou, pour parler vulgairement, à montrer ce qu'il y a derrière la nature et qui la rend possible.
Celui qui se donne la mort voudrait vivre, il n'est mécontent que des conditions dans lesquelles la vie lui est échue.
La raison révèle son caractère vraiment pratique dans les caractères très raisonnables, qu’à cause de cela on nomme dans la vie ordinaire des philosophes pratiques, et qui se distinguent par une égalité d’humeur peu commune, dans les situations désagréables aussi bien que dans les moments de joie et de bonheur, par un état d’esprit toujours équilibré, par la fermeté dans la résolution prise. En réalité c’est la prépondérance chez eux de la raison, c’est-à-dire de la connaissance abstraite plutôt qu’intuitive, c’est le talent de passer rapidement en revue, au moyen de concepts généraux, la vie tout entière dans ce qu’elle a d’essentiel, qui les ont familiarisés une fois pour toutes, avec la notion de ce qu’il y a d’illusoire dans l’impression du moment, de l’inconstance de toutes choses, de la brièveté de la vie, de la vanité des jouissances, des alternatives du bonheur et des grandes et petites perfidies du hasard.
Vouloir vivre, c'est aussi être sûr de vivre, et tant que la volonté de vivre nous anime, nous n'avons pas à nous inquiéter pour notre existence, même à l'heure de la mort.
Les temples et les églises, les pagodes et les mosquées, dans tous les pays, à toutes les époques, dans leur magnificence et leur grandeur, témoignent de ce besoin métaphysique de l'homme qui, tout-puissant et indélébile, vient aussitôt après le besoin physique.
Tout vouloir procède d’un besoin, c’est-à-dire d’une privation, c’est-à-dire d’une souffrance. La satisfaction y met fin ; mais pour un désir qui est satisfait, dix au moins sont contrariés ; de plus, le désir est long, et ses exigences tendent à l’infini ; la satisfaction est courte, et elle est parcimonieusement mesurée. Mais ce contentement suprême n’est lui-même qu’apparent ; le désir satisfait fait place aussitôt à un nouveau désir ; le premier est une déception reconnue, le second est une déception non encore reconnue.
Ce qui nous chagrine, dans un malheur, ce n’est pas tant le malheur que la pensée de telle ou telle circonstance qui, changée, eût pu nous l’épargner ; aussi, pour se calmer, ce qu’il y a de mieux, c’est de considérer l’évènement du point de vue de la nécessité ; de là, tous les évènements nous apparaissent comme les dictées d’un puissant destin, et le mal qui nous a frappé n’est plus que l’inévitable effet de la rencontre entre les évènements du dehors et notre état intérieur.
Ce que tu veux au fond de toi-même, voilà ce qu'il faut que tu sois ; ce que tu es, tu le veux.
[…] j’ai connu certaines personnes d’une supériorité intellectuelle marquée, sinon éminente ; elles présentaient en même temps de légers indices de folie. Il semblerait, d’après cela, que toute supériorité intellectuelle qui dépasse la mesure ordinaire doive être considérée comme une chose anormale qui prédispose à la folie.
A son origine, et dans son universalité, une force naturelle n’est dans son essence rien autre chose que l’objectivation, à un degré inférieur, de la volonté.