AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur Le lac du ciel : De Sin-Kiang au Tibet (8)

Un vieil homme à barbe blanche qui a installé son lit en travers du trottoir m'invite à m'y asseoir. Nous bavardons un moment en chinois tout en buvant du thé vert. La conversation passe aux signes qui surmontent les portes des boutiques autour de nous. Les caractères ne sont pas seulement chinois, mais arabes et romains.

"C'est de l'ouïgour, dit le vieil homme.
- Mais je croyais que l'ouïgour s'écrivait en caractères arabes.
- Autrefois. Quand j'apprenais à lire et à écrire. Je ne peux pas lire ce qui est écrit en caractères romains." Il s'interrompt. "Mais on a changé l'écriture. Et mon fils a appris l'alphabet romain."

Je sirote mon thé pensivement. "ça doit être triste de savoir que votre façon d'écrire est en train de disparaître.
- Oui. Mais elle ne disparaît pas. Ils ont encore changé l'écriture. Et mon petit-fils apprend les caractères arabes à l'école.
- Mais pourquoi ont-ils changé la première fois ?
- Je crois que le gouvernement avait peur que trop de gens ne lisent les publications russes en ouïgour ... elles sont en caractères arabes. Alors, en passant à l'alphabet romain, le gouvernement chinois était sûr que la nouvelle génération ne comprendrait pas les livres que les Russes publient pour leur population ouïgour.
- Et pourquoi sont-ils revenus aux caractères arabes ?
- Je ne sais pas, dit le vieil homme. C'est la nouvelle politique des minorités." Il réfléchit. "L'alphabet romain n'a pas marché. Les gens ne s'y sont pas faits.
- Mais il y a des gens qui ont appris l'alphabet romain, non ?" Je pense à Akbar, qui savait tout juste signer son nom en arabe. Une pensée horrible me traverse. "Vous pouvez échanger des mots ou des lettres avec votre petit-fils, mais votre fils ne peut écrire ni à l'un ni à l'autre?
- Exactement. C'est exactement ça", dit le vieux, tout content.
Commenter  J’apprécie          80
La dernière fois que j'ai été chez moi, en Inde, c'était il y a trois ans. Et ce voyage que je fais au Népal est le premier. Mais les vallées d'ici ressemblent par bien des traits à d'autres vallées au pied de l'Himalaya : Dehra Dun, par exemple, où j'ai fait mes études secondaires. Ces choses me touchent aujourd'hui plus fort que je m'en serais jamais douté : de petites fleurs bleues, sur les haies, d'un genre que je reconnais sans pouvoir le nommer ; des buissons de lantanas ; des forêts de sâls ; des buffles ; des camions généreusement ornés de symboles religieux et désespérément surchargés de biens de ce monde ; des tresses de piment étalées sur le sol ou sur les toits pour sécher ; des policiers en kaki ; des villages délabrés massés autour des temples ; les vêtements rutilants et les traits familiers des gens ; une femme qui vend des concombres et du chutney aux passagers d'un car à l'arrêt. J'aime aussi le grognement et les quintes de toux caractéristiques du car qui monte et descend tant bien que mal les flancs des montagnes au long de son voyage de cinq heures jusqu'à Katmandou.
Commenter  J’apprécie          50
La pluie a cessé ; en nous élevant dans la chaîne transhimalayenne, nous pénétrons dans un paysage impressionnant : gorges, escarpements, rivière tumultueuse. Toute la vallée, beaucoup plus étroite qu'avant, est verte d'herbe et de qingké, l'orge robuste des hauteurs qui pousse dans la région. Il y a même ici et là des bouquets d'arbres ; et au loin, des glaciers étincelants. Le nombre des habitations augmente au fur et à mesure que la vallée s'élargit. Quand je regarde de nouveau dehors, nous sommes déjà dans la grande vallée du fleuve Lhassa - avec des champs de blé et d'orge, de grands arbres, des bâtisses en ciment et, au loin, plan vertical qui domine tout, le palais du Potala, monolithe d'une immense grandeur, blanc et rose pâle et rouge et or.
Commenter  J’apprécie          50
Le paysage m'est à présent de plus en plus familier : des rizières, des terrasses, des bananiers, des flamboyants, des tchampas [frangipaniers]. Je vois un morceau de papier indigo voleter sur le côté du chemin. C'est l'emballage d'un paquet d'allumettes comme on en utilise au Népal et en Inde. Deux femmes dans des saris de couleurs vives traversent des champs émeraude. Lorsque nous entrons dans Bahrbisé, je remarque les boutiques remplies d'étoffes éclatantes et de bracelets de verroterie. Jusqu'au poste de police (avec sa devise peinte en lettres flamboyantes "Vérité, Service, Protection") qui a, sur le devant, un éléphant d'argile décoré d'un bol de plantes grasses. L'une des choses qui m'ont le plus manqué cette année, c'est les couleurs.
Commenter  J’apprécie          30
Des yacks noirs, des moutons blancs se répandent sur le vert. Des hommes à cheval guident et transportent de minces bûches à travers la plaine. Mais d'où viennent les bûches dans cette région sans arbres ? Près de Naqou, sur le bord de la route, la carcasse écorchée, rouge, énorme, d'un yack, que des hommes armés de couteaux découpent en morceaux. Les yacks comptent pour beaucoup dans cette économie : les transports, le lait, la viande, la fourrure, les sabots, la bouse, les os, la peau, la queue, on utilise tout. Quelle machine fabuleuse qui peut changer l'herbe en vêtements, en beurre, en combustible et en cuir de tente !
Commenter  J’apprécie          30
J'ai parfois l'impression de vagabonder autour du monde dans le seul but d'accumuler le matériau de futures nostalgies.
Commenter  J’apprécie          30
Les mouches ont pénétré dans le car, et leur bourdonnement ajoute encore à l'impression de chaleur écrasante. Nous roulons d'abord à travers la ville: quelques bâtiments à deux étages en béton sinistre abritant des bureaux gouvernementaux ou de grandes boutiques, magasins d'alimentation ou de vêtements, quincailleries.
Commenter  J’apprécie          20
J'ai parfois l'impression de vagabonder autour du monde dans le seul but d'accumuler le matériau de futures nostalgies.
Commenter  J’apprécie          10




    Lecteurs (25) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Le textile en s'amusant

    Savez-vous quelle est la plus ancienne fibre textile dérivée du pétrole ? Indice : cette matière a rapidement pris sa place dans l'histoire du vêtement féminin.

    le nylon
    le feutre
    le ramie

    10 questions
    150 lecteurs ont répondu
    Thèmes : textile , Textiles et tissus , industrie , plantations de coton , culture générale , vêtements , habillement , détente , maillot de bain , laine , humour , Chanvre , confection , Fibres textiles , laine , grande-bretagne , histoire , indeCréer un quiz sur ce livre

    {* *}