L'âge de bronze, tome 1 : Un Millier de navires

J'aime quand la mythologie devient du fantastique, s'apparente aux contes, ou alors quand les personnages deviennent introspectifs, quand elle n'est pas qu'une suite d'évènements, de faits, et surtout quand elle n'est que le support pour amener autre chose, parce qu'en fait, savoir qui couche avec qui, qui veut tuer qui, tout ça ne m'intéresse guère.
Ce récit se veut au départ submersif, les personnages sont ordinaires, sympathiques et sans comprendre pourquoi, la narration devient théâtrale. Je n'ai jamais réussi à m'immerger dans l'aventure, arriver au bout fut laborieux. Et puis les histoires de prédestinations décidées par des Dieux, comme celle de la femme qui trompe son mari avec un beau jeune homme parce que ce sont les Dieux qui le veulent, où toute action est dirigée par d'hypothétiques Dieux qui de là-haut surveillent nos faits et gestes, je trouve cela tellement ridicule qu'un récit basé là dessus ne peut m'accrocher. Je crois bien que mon cas est définitivement perdu pour la mythologie.
Je ne suis pas non plus enthousiasmé par le dessin que je trouve froid, la lumière est toujours égale, le style impersonnel, tous les personnages se ressemblent. C'est bien fait, je le reconnais, mais le seul sentiment que j'en retiens c'est l'ennui.
Je ne lirai certainement pas la suite, vous vous en doutez.

Pas convaincue... Ou plutôt, impressionnée par la qualité (tant graphique que scénaristique) de ce premier opus, qui peine cependant à me séduire... Je ne peux qu'applaudir l'audace et la rigueur d'Eric Shanower, qui s'attaque à l'un des épisodes antiques les plus célèbres et, à ce titre, vu, revu et corrigé de nombreuses fois. En se lançant dans cette aventure, son but est simple : relater le plus fidèlement possible l'histoire de la guerre de Troie, depuis l'adolescence de Pâris, bien avant l'enlèvement d'Hélène. Pour ce faire, l'auteur a mené un extraordinaire travail de lecture et de recherche ; par bien des aspects, ce premier tome s'apparente à une véritable investigation.

En ouvrant cette bande dessinée, j'ai d'abord été frappée par la netteté des illustrations, ce trait d'une précision chirurgicale et ce noir et blanc très tranché. Eric Shanower apporte beaucoup de soin aux postures et aux gestes de ses personnages, ce qui évite au récit d'être trop statique malgré le découpage extrêmement classique. Cependant, quelques 207 pages plus tard (et quelles pages !), je n'ai pu m'empêcher de ressentir une certaine impression de rigidité. Ce style graphique particulièrement réaliste et documenté n'est abandonné qu'une seule fois, lorsque le Roi Priam relate un épisode passé : le trait se fait davantage cartoon, ce qui n'est pas déplaisant quoiqu'un peu surprenant.

Eric Shanower a donc délibérément opté pour un récit qui se veut le plus réaliste possible : les vêtements, l'architecture et même le physique des personnages sont le fruit d'un travail documentaire colossal. Dans cette optique, l'auteur a choisi de ne pas représenter les dieux ; il fait ainsi la part belle aux songes et rêveries prémonitoires qui infléchissent la vie et le destin des personnages. La narration reste fluide malgré le nombre important de personnages et les multiples rebondissements, ce qui est déjà un exploit en soi étant donné la complexité de la mythologie grecque ! Les choix scénaristiques et les épreuves auxquelles Eric Shanowers a été confronté lors de l'écriture de cet opus sont relatés en fin d'ouvrage, dans une intéressante postface qui offre en outre un arbre généalogique bienvenu.

En bref, bien que fortement impressionnée par l'ampleur du travail d'Eric Shanower, je suis restée finalement assez extérieure à ce récit très dense qui n'a pas réussi à susciter en moi la même passion que lorsque j'ai découvert l'Iliade d'Homère, qui ne relate pourtant qu'une infime partie de la guerre de Troie... Je ne pense pas continuer la série mais cette lecture m'a donné envie de me replonger dans les récits mythologiques dont j'étais tant friande plus jeune.
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