Il faut être fou pour approcher ceux qui nous dévissent les veines, ouvrent nos plexus, renversent nos nuques, je le maintiens. Ils peuvent faire pire que de n'être pas conformes à nos vœux : ils peuvent l'être. Ils peuvent y correspondre très exactement. Justifier l'addiction, l'obsession, et la durable aliénation qui nous fait vouloir, alors, être validés par ceux que nous avons estampillés, de la tête aux pieds, de nos imprimaturs. Il ne manquerait plus qu'une pierre à ce pont du diable : qu'ils nous disent "sauve-moi", et qu'ils le pensent.
Et là, enfin, je savais ce que ressentaient les filles de mon âge, dans les griffes de l'innamoramento. Dans cette nasse indescriptible où chaque pas te sert les violons et les cordes, les à-pics et les précipices, et ce désir crucifiant d'avancer d'un pas de plus, comme si c'était la première fois. La première fois, à chaque fois.
"Le monde est hanté de questions.
D'oiseaux de mer et de signaux.
S'ils passent vos barrières (les uns, les autres...) c'est qu'ils ont le don de vous prendre par surprise."
Le Dernier des Dark Boys
Rien ne parle mieux de notre identité, en un sens, que ce que nous désirons. Ce qui décide de nos esclavages personnels, c'est à la fois la partie la plus primale et la plus sophistiquée de nos êtres.