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Critique de BazaR


J'ai profité de la LC organisée par Millencolin – merci à lui – pour lire ce roman dont le sujet m'avait tapé dans l'oeil du fait de sa ressemblance de décor avec Un Monde d'Azur de Jack Vance.
J'ai rapidement abandonné cet angle d'attaque. Si l'abondance océanique, la présence d'îles, la carence en métal et la recherche de l'électricité constituent des points communs, ils n'ont pas le même poids. Bob Montagne d'Argent ne veut pas nous emmener au même endroit que Jack.

Signe des temps dans l'édition, Robert a un peu plus d'espace pour s'exprimer que Jack n'en avait 25 ans plus tôt. Eh bien pendant toute la première partie – qui se passe sur l'île de Sorve – j'ai vraiment songé qu'il meublait. Je me suis demandé à plusieurs reprises à quoi servait d'insister sur une scène : la beuverie de Lawler et Delagard, la consultation de Sundira, trop de détails qui ne font pas avancer l'histoire. Assurément, ces détails participent à la caractérisation des personnages. Mais même sous cet angle, l'auteur s'attache à certains personnages seulement, et pas forcément les plus riches de potentiel, et en laisse d'autres en plan, nous donnant seulement le goût d'en savoir plus sur eux.

Puis le voyage sur les eaux commence en même temps que la deuxième partie. Dans un certain sens, cela s'anime. Par certains côtés, on n'est pas loin du documentaire sur une expédition du commandant Cousteau. Je tire mon chapeau à Bob pour son inventivité en ce qui concerne les espèces animales et végétales qui croisent le chemin des héros. Certaines ont laissé leurs marques dans la mémoire de mes co-lecteurs, dont une en particulier qui offre à l'auteur l'occasion de nous rappeler qu'il a écrit des tas de romans érotiques.
J'ai poursuivi le voyage en voyageant moi-même physiquement, et curieusement le fait d'accompagner le mouvement à donné plus d'éclat à ce que je lisais. J'accordais plus de valeur aux descriptions et aux nombreux dialogues et introspections. Il m'est arrivé de ne pas être d'accord avec le traitement réalisé sur les personnages. Je pense en particulier que des hommes et des femmes lancés dans une telle expédition devraient être arc-boutés sur un seul objectif : la survie. Or on les voit parfois philosopher alors même qu'ils sont en manque d'eau potable. La licence poétique a une limite. En revanche les dissensions et les heurts dans un tel milieu en vase clos ne pouvaient qu'apparaître. J'ai trouvé l'équipage un peu trop grégaire et suiviste ; ce ne sont pourtant pas des militaires, et pourtant le chef Delagard ressemble souvent à William Bligh du Bounty.

La troisième partie m'a bien plu. Elle nous offre une explication sur la nature de cette planète Hydros où les humains sont venus s'échouer par le passé à leur corps défendant ; une explication que j'avais envisagé comme hypothèse vraisemblable en cours de lecture et que j'ai été ravi de voir confirmée car j'apprécie beaucoup ce thème. La résistance des héros – du narrateur Lawler en particulier – face à ce qu'ils découvrent évoque le combat du libre arbitre contre le bien collectif ; difficile de trancher absolument pour l'un ou l'autre camp.
Mais c'est un élément plus secondaire qui a fixé mon attention : le père Quillan – qui me sortait par les yeux avec son interprétation du moindre acte comme étant en relation avec Dieu – s'est racheté lorsqu'il a évoqué sa nouvelle croyance de l'existence de Dieu localisée dans les fissures logiques dévoilées dans le formalisme mathématique par le théorème de Gödel. J'ai eu l'impression de m'écouter. Car je me suis convaincu il y a un bout de temps que, si l'on devait absolument envisager l'existence d'un Créateur, il ne pouvait demeurer que dans les limites que la logique a découvert en elle-même, et aussi dans le désespérant chaos déterministe et dans l'étrange phénomène d'intrication quantique. Et voilà que c'est écrit noir sur blanc, dans un roman. Dingue !
Cela dit c'est un détail microscopique dans l'ensemble du récit.

En conclusion, le voyage fut moins mouvementé, plus descriptif, que ce que j'avais espéré. Mais il a dévoilé ses propres trésors et je ne regrette pas d'avoir embarqué.
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