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Critique de Eve-Yeshe


Le récit commence dans une église, avec un homme qui a perdu la mémoire : il n'a plus de repère, tout le monde semble bien le connaître alors qu'il ne reconnaît personne. Sur une tombe, au cimetière, une inscription l'intrigue : « ton absence n'est que ténèbres ». Il rencontre une femme, Soley, qui a semble-t-il compté dans sa vie et en la suivant, l'histoire va se tisser…

Le narrateur, notre homme, essaie d'écrire sur des feuilles volantes, tout ce qu'il peut glaner, ça et là, pour sortir des ténèbres de sa mémoire, ce qui nous entraîne dans des rencontres étranges qui s'étalent sur plusieurs générations, des personnages dont on va faire la connaissance au rythme que nous impose l'auteur, quitte à nous perdre au passage.

Tout d'abord, fin XIXe avec la rencontre entre Petur, pasteur marié et Gudridur qui vient d'écrire un article sur le ver de terre indispensable à l'équilibre du sol va faire chavirer leur vie à tous les deux : Petur a plongé dans une sombre mélancolie quand Eva, sa fille, est décédée : il l'avait emmenée avec lui en forêt sous la pluie et elle n'avait pas pu se remettre du « refroidissement » d'où la culpabilité du pasteur. Il écrit sa souffrance sous forme de lettres à Hölderlin

Petur écrit à un poète allemand enterré depuis plusieurs décennies, un poète qui était déjà mort à sa naissance

On revisite un peu l'histoire et la géographie, de l'Islande, les dures conditions de vie dans les fermes, les femmes qui ne se plaignent pas, les pêcheurs qui partent durant des mois, l'argent difficile à gagner, l'alcool, l'exil au Canada de certains.

J'ai eu un peu de mal à entrer dans l'histoire, car il y a énormément de personnages, de noms à mémoriser, trouver des points de repères pour assimiler, les prénoms masculins, et les noms féminins (je n'ai pas de problèmes avec les patronymes, mais les prénoms c'est plus compliqué) : Jon,Petur, Hulda, Gudridur Eirikur, Pall, Halldor, Skuli, et pardon d'avance à ceux que j'oublie.

En fait, j'ai décidé de me laisser porter par la réflexion de Jon Kalman Stefansson, sans chercher à mémoriser à tout prix et ensuite la magie a opéré comme avec ses précédents romans.

L'auteur nous livre une réflexion sur le temps qui passe, la mémoire individuelle et collective, les secrets de famille et les dégâts qu'ils engendrent, la répétition des scenarii de vie… Jon Kalman Stefansson aborde aussi avec brio, le passé, comment il nous aide à nous construire, et son poids sur le présent, les relations de cause à effet, le destin et tout simplement, la vie, la mort, la place qu'occupent les défunts dans nos vies…

Est-ce l'existence qui façonne le destin ou le destin qui façonne l'existence : Dieu a-t-il créé le monde ou est-ce le monde qui a inventé Dieu ?

Certains n'ont pas eu vraiment le choix, comme Pal qui a fait des études supérieures, une thèse sur Kierkegaard et doit retourner à la ferme. J'ai appris au passage que Kierkegaard signifiait cimetière !

Soren Kierkegaard. D'ailleurs, Kierkegaard signifie cimetière… quel fardeau ! Un nom empli de morts, de croix, de défunts. Ce n'est pas étonnant qu'il ait parfois été un peu éteint.

La manière de raconter, avec des allers et retours sans cesse entre présent et passé, qui m'avait un peu désorientée dans ses précédents romans, ne pas gênée, au contraire, cela permettait d'assimiler tous les messages de l'auteur. L'écriture est belle, pleine d'images et la magie de l'Islande a parfaitement fonctionné cette fois-ci encore.

Autre effet de style : Jon Kalman Stefansson se répète souvent dans sa narration, les mêmes phrases reviennent, à la virgule près, comme si la répétition venait au secours de la mémoire défaillante

Le texte est, d'autre part, ponctué de phrases de chansons de Bob Dylan, Léonard Cohen les Beatles, Elvis Presley Ella Fitzgerald, en passant par Bach et Satie par exemple et l'auteur nous propose à la fin d'une compilation dont je vais m'inspirer pour une play-list.

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Grasset qui m'ont permis de découvrir ce roman et de retrouver la plume de son auteur, ce qui est toujours un plaisir.

#Tonabsencenestqueténèbres #NetGalleyFrance !

Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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