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Citations sur Dans le château de Barbe-Bleue (42)

La bande magnétique, la radio, le phono, la cassette répandent une musique ininterrompue sur tous nos instants et tous nos travaux. C'est sans doute ce qui explique le succès commercial de Vivaldi et des compositeurs mineurs du dix-huitième siècle.
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C'est au début et au milieu du dix-neuvième siècle que s'instaurèrent simultanément l'asservissement des ouvriers, hommes et femmes, par le travail à la chaîne, et le décalage de la sensibilité de l'homme moyen par rapport à l'attirail d'une technologie envahissant jusqu'à la vie quotidienne. L'usine, la place boursière servaient d'exutoire au corps social et on y approuvait les ambitions autres que celles de l'action révolutionnaire ou de la lutte armée. Des expressions telles que "Napoléon de la finance", "capitaine d'industrie", soulignent au niveau sémantique un tel infléchissement.
L'énorme extension prise par le système industriel et monétaire favorisa l'avènement de la ville moderne, que Verhaeren appellera plus tard "la ville tentaculaire", mégalopolis dont la prolifération galopante menace de nos jours le plus clair de notre vie. C'est ainsi que se délimite un nouveau conflit, fort grave, celui qui oppose l'individu à l'océan de pierre, qui peut, à tout moment, l'engloutir. L'enfer urbain et ses hordes sans visage hantent l'imagination du dix-neuvième siècle.
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Pourquoi s'évertuer à élaborer et transmettre une culture qui a fait si peu pour endiguer l'inhumain, qui abritait des ambiguïtés profondes, celles-ci n'étant pas toujours hostiles à la barbarie? Et encore : si l'on admet que la culture donnait accès à ce qu'il y a de meilleur en l'homme, à l'élévation de l'esprit, ne la payait-on pas trop cher? En inégalité sociale et spirituelle. Ou en déséquilibre ontologique (car les facteurs économiques ne sont plus seuls en jeu) entre les lieux privilégiés de la réussite intellectuelle et artistique et le monde dédaigné de la pauvreté et du sous-développement? Est-il fortuit que tant de triomphes ostentatoires de la civilisation, l'Athènes de Périclès, la Florence des Médicis, l'Angleterre élizabéthaine, le Versailles du grand siècle et la Vienne de Mozart aient eu partie liée avec l'absolutisme, un système rigide de castes et la présence de masses asservies? Grand art, musique, poésie, la science de Bacon et celle de Laplace florissent sous des systèmes sociaux plus ou moins teintés de totalitarisme. Est-ce par hasard? A quel niveau situer les similarités, elles-mêmes instituées par l'enseignement, entre le pouvoir et la culture classique? La notion de culture n'est-elle pas, après tout, synonyme d'élite? Quelle part de sa vitalité dérive de la violence disciplinée, contenue, qui transparaît cependant dans les rites des sociétés traditionnelles ou répressives? De là le jugement de Pisarev, repris par Orwell, qui fait des arts et des lettres les instruments du régime en place et de la classe dominante.
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Ce n'est pas le passé lui-même qui nous domine, sauf, peut-être, par le biais des déterminations biologiques. Ce sont les images du passé. Celles-ci sont, souvent, tout aussi puissamment structurées et contraignantes que les mythes. Images et constructions symboliques du passé se gravent dans notre sensibilité.
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Il tombe sous le sens que la science et la technologie ont provoqué d'irréparables dégradation de l'environnement, un déséquilibre économique et un relâchement moral. ... soif démesurée de confort et de consommation. ... Nous ouvrons les portes en enfilade du château de Barbe-Bleue parce qu'elles sont là, ... Le vrai problème est de savoir s'il faut résister à faire certaines recherches, si l'esprit humain, à leur stade actuel de développement, pourront supporter les vérités à venir... il est possible que la prochaine porte donne sur des réalités par essence contraire à notre équilibre mental et à nos maigres réserves morales. (p. 151-152)
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Grand art, musique, poésie, la science de Bacon et celle de Laplace florissent sous des systèmes sociaux plus ou moins teintés de totalitarisme. Est-ce par hasard ? A quel niveau situer les similarités elles-mêmes instituées par l’enseignement, entre le pouvoir et la culture classique ? La notion de culture n’est-elle pas, après tout, synonyme d’élite ? Quelle part de sa vitalité dérive de la violence disciplinée, contenue, qui transparaît cependant dans les rites des sociétés traditionnelles ou répressives ? De là le jugement de Pisarev, repris par Orwell, qui fait des arts et des lettres les instruments du régime en place et de la classe dominante.
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L'humoriste viennois Karl Kraus remarquait un jour : "Quand il s'agit d'Hitler, rien ne me vient", "es fällt mir nichts ein". Comment aborder, sans un opiniâtre sentiment de fatuité et même d'indécence, le thème de la suprême inhumanité? Reste-t-il quelque chose à dire sur les motifs et les aspects de la débâcle de l'ordre européen eu cours de la "guerre de Trente Ans" de 1915 à 1945? Ce qu'on a écrit à ce sujet dépasse déjà, par le volume et le caractère de spécialisation des ouvrages, les capacités de lecture d'un seul homme.
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Le déclin catastrophique du «par cœur» dans notre système d’éducation moderne, ses conséquences chez les adultes, sont un des symptômes déterminants, encore que mal élucidés, d’une après-culture.
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Quels que soient l’intensité des griefs et le degré de macération de la discussion, la suprématie occidentale pendant deux millénaires et demi n’en demeure pas moins irrécusable. […] c’est un truisme, ou du moins ce devrait en être un, que le monde de Platon n’est pas celui des Chamans, que la physique de Galilée et de Newton ont rendu intelligible une grande partie de la réalité qui nous entoure, que les œuvres de Mozart vont plus loin que les battements de tambour et les clochettes javanaises, si émouvants et chargés de vieux rêves qu’ils puissent être. A cela s’ajoute que l’attitude même de remords et d’auto-accusation adoptée maintenant par de larges secteurs de la conscience occidentale est un autre phénomène culturel bien spécifique. Est-il d’autres races qui se soient tournées, dans un esprit de pénitence, vers leurs anciens esclaves ? D’autres civilisations qui aient désavoué, au nom de la morale, l’éclat de leur passé ? L’examen de conscience fondé sur des impératifs ethniques est, encore une fois, un acte proprement occidental et dans la lignée de Voltaire.
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Il n’est pas exclu que l’augmentation spectaculaire de la densité de population dans le nouveau milieu industriel urbain ait son rôle à jouer. Nous passons une grande partie de notre vie dans le coude à coude menaçant de la foule. L’espace vital, le besoin de s’isoler subissent la pression gigantesque du nombre. Il en résulte une tendance contraire à « dégager ». D’une part, la masse palpable de l’uniformité, les colonies d’insectes qui envahissent villes et plages rabaissent toute notion de valeur individuelle. Elles tuent le mystère irremplaçable de la présence. D’autre part, sentant notre identité mise en cause par le suffocant magma de l’anonyme, nous sommes saisis d’accès meurtriers, du désir aveugle de foncer pour faire de la place. Elias Canetti avance l’hypothèse curieuse que la réussite de l’holocauste fut liée à l’écroulement monétaire des années vingt. Les chiffres élevés ne conservaient plus qu’un fantôme de signification vaguement sinistre. Quand on a vu le pain ou les tickets d’autobus se vendre cent mille, un million puis un billion de marks, on perd tout sens de la démesure elle-même. Ces mêmes chiffres enveloppaient d’irréel la disparition et la liquidation de nations entières. Il est prouvé que les êtres humains sont mal faits pour vivre dans l’étouffante densité de la ruche industrielle urbaine. Au bout d’un siècle, l’accroissement du bruit, l’accélération des mouvements et des cadences de travail, la puissance multipliée de l’éclairage artificiel ont peut-être atteint un seuil pathologique et déclenché des instincts de dévastation.
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