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Critique de ninachevalier



Si une hirondelle ne fait pas le printemps, le JOURNAL 2019 d'Albert Strickler annonce toujours ce moment privilégié où nous, lecteurs, avons rendez-vous avec le gazouilleur de mots et ses « riens somptueux ».

Laissons-nous embarquer à la proue de son ferry, « Tourneciel » pour voir s'écouler l'année 2019 et se dérouler les paysages au fil des saisons.

Ce qui frappe, c'est le dilemme qui a taraudé le diariste au sujet des citations. Car si certains en sont friands, d'autres lui reprochent cet abus, son abondante générosité. Pourtant les citations, pour Sylvain Tesson, révèlent l'âme de celui qui les brandit.

Grand lecteur, nombreux sont les écrivains/écrivaines à qui il rend hommage :Gilles Baudry omniprésent, mais aussi Christian Bobin, Nicolas Dieterlé dont il loue «  son compagnonnage précieux et ressourçant ».

Parmi ses balises féminines, citons Emily Dickinson et Marina Tsvétaïeva.
Le lecteur a de quoi composer sa « play livres » avec la pléthore d'ouvrages cités.

Guidé par « la lampe frontale de la poésie », c'est un enchantement au détour d'une page de trouver ce « komboloï de grâce », célébrant la nature, avec la série « Insomnie au muguet ». D'aucuns ont raison de suggérer la publication d'un recueil reprenant les poèmes qui ponctuent le journal !

Le narrateur partage ses sources de joie, les « pédiluves » qu'il privilégie pour aborder une journée mais aussi ses préoccupations matérielles (la terrasse , panne d'Orange…) et ses soucis de santé qui parfois le terrassent.
C'est toujours de façon très imagée qu'il rend compte de la réalité.
Quand « son ferry fait naufrage à quai, il écope comme il peut, et devient Sisyphe à la cuillère à soupe. »

Une vague d'indicible nostalgie traverse l'ouvrage quand l'auteur évoque ses oasis spirituelles, son premier bettelmann, pain perdu de l'enfance, une glace de Berthillon ou quand il boit « à la fontaine des souvenirs » : festival d'Aix, de Bayreuth , retour à Vézelay, en Bretagne ….


Tous les sens sont comblés : il sait humer « les fragrances de chlorophylle, les effluves d'humus, l'odorante énigme d'une rose... ». Il a l'oreille rivée aux chants du coucou, du merle avec qui il converse. Sensible à la nature, il s'abîme dans la contemplation des chauves-souris, des oiseaux, des fleurs, des arbres.
Celui qui est célébré, et dont les fleurs-étoiles sont immortalisées sur la couverture, n'a pas résisté à la tempête de septembre, le vénérable châtaignier « moribond ». Un choc et beaucoup de dégâts.
« Arrachés par la rage du vent/les étoiles de mer du châtaignier/tombent dans l'herbe en y formant/ La constellation éphémère d'un labyrinthe/qui a la tendresse pour unique issue. » Voici l'origine du titre de ce Journal.


Ce journal intime 2019 n'est pas un déroulé de toutes les horreurs dont l'actualité nous abreuve, même si quelques faits/drames sont évoqués, car impossible de faire l'impasse sur l'incendie de Notre-Dame du 15 avril, (citant des extraits de l'opus de Sylvain Tesson), mais il est le bilan de ce qui a nourri Albert Strickler, à savoir ses lectures, ses coups de coeur musicaux, les oeuvres d'art qui l'ont marqué, ses rencontres et retrouvailles familiales.

Le lecteur rencontre en lui « le berger des nuages, l'oiseleur des riens somptueux », mais aussi l'homme hyperactif, amateur de café, doté d'une patience d'orpailleur.
Si « vivre est un envoûtement exquis » pour Emily Dickinson, lire le diariste et poète Albert Strickler relève de l'émerveillement et de l'enrichissement.
De quoi donner envie qu'un autre journal succède à La constellation du labyrinthe.

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