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Critique de Lamifranz


Si les sondages avaient existé en 1842 -1843, lors de la parution des « Mystères de Paris » d'abord en feuilleton dans « Le Journal des débats » puis en volumes (le pluriel est de rigueur), il est probable que le top 50 de l'époque aurait été pulvérisé : le succès a été phénoménal tout au long du XIXème siècle, et dans une bonne partie du XXème, avant d'être sanctuarisé comme oeuvre littéraire majeure (toujours pas par la Pléiade, par exemple, mais il est vrai qu'il est en bonne compagnie dans le Purgatoire avec Thomas Mann, John Steinbeck – il paraît qu'il arrive… à pas mesurés ! -, John Dos Passos, le Pirandello des nouvelles, etc.).
« Les Mystères de Paris » tous les grands auteurs romantiques l'ont lu… et adoré. Ce n'est pas étonnant, rien de plus romantique que ce roman : priorité aux sentiments, personnages manichéens et attachants, décors fantastiques qui font réellement partie de l'histoire… Ce que l'auteur apporte de nouveau, c'est cette dimension sociale et politique (que reprendront entre autres Victor Hugo et surtout George Sand – et après eux Emile Zola, bien entendu). L'autre innovation qui accompagne ce roman, c'est bien sûr le format du roman -feuilleton : il permet d'apporter l'oeuvre au plus bas des couches sociales, comme au plus haut des classes nobles, accentuant ainsi une « conscience » politique, qui jusque-là se cantonnait aux lecteurs aisés qui pouvaient acheter les livres.
Raconter toutes les péripéties qui couvrent ces 1360 pages (dans cette excellente édition Bouquins, préfacée par Armand Lanoux et annotée par Francis Lacassin) constituent une gageure que je ne pourrai honorer dans le cadre de cette humble chronique. Sachez simplement que l'histoire est « mystérieuse » et qu'elle se passe à « Paris ». Paris est le principal personnage du roman : avec ses maisons bourgeoises et ses bas-fonds, ses couloirs sordides, ses égouts, ses tripots mal famés. Paris, « ville-foule, ville-château, mais aussi ville-cancer qui attire et qui dévore, use, corrompt, ouvrant à la fois toutes les avenues du pouvoir et tous les chemins de la perdition » (Jean-Louis Bory). Il aurait pu ajouter, pour faire bonne mesure : … et tous les chemins de l'amour. L'autre grand personnage c'est Rodolphe : une espèce de demi-dieu, il a toutes les qualités, il est surtout généreux, au point de cacher sa véritable identité (il est grand-duc de Gérolstein) pour venir en aide aux pauvres gens. Autour de lui évolue une nuée de personnages sympathiques (Fleur de Marie, le Chourineur), pas sympathiques (le Maître d'école, la Chouette), pittoresques (les Pipelet) et beaucoup d'autres. Côté nobles et bourgeois, l'intérêt pour les classes inférieures n'est pas à l'ordre du jour.
« Les mystères de Paris » représentent donc un moment-phare dans l'histoire de la littérature, et plus encore dans l'histoire du roman. le plus curieux dans l'histoire, c'est que l'auteur en a été le premier surpris : en écrivant le premier chapitre, pour répondre à une commande, il pensait faire un ou deux volumes. Il n'avait pas vraiment de conscience politique ou sociale. Au contraire c'était un bourgeois dandy, qui n'avait pas d'autre ambition que « paraître ». le succès inattendu l'a obligé à orienter un peu son oeuvre, pour en faire finalement le chef-d'oeuvre que l'on sait.
Certes c'est une mythologie bien typée, celle des bas-fonds, des malfrats, des apaches… Mais elle a fait école : Beaucoup d'écrivains se sont engouffrés dans ce créneau : on a eu ainsi les « Mystères de Londres » (Paul Féval), les « Mystères de Marseille » (Emile Zola), les mystères d'un peu partout dans le monde, si ça se trouve il y a peut-être les « Mystères près-de-chez-vous » (s'ils n'existent pas encore, lancez-vous, écrivez-les !)



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