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Citations sur Le forcat innocent / Les amis inconnus (66)

Ecoute, apprendras-tu à m'écouter de loin,
Il s'agit de pencher le coeur plus que l'oreille,
Tu trouveras en toi des ponts et des chemins
Pour venir jusqu'à moi qui regarde et qui veille.

Qu'importe en sa longueur l'Océan Atlantique,
Les champs , les bois, les monts qui sont entre nous deux ?

L'un après l'autre un jour il faudra qu'ils abdiquent
Lorsque de ce côté tu tourneras les yeux.
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SOLITUDE
     
Homme égaré dans les siècles,
Ne trouveras-tu jamais un contemporain ?
Et celui-là qui s'avance derrière de hauts cactus
Il n'a pas l'âge de ton sang qui dévale de ses montagnes,
Il ne connaît pas les rivières où se trempe ton regard
Et comment savoir le chiffre de sa tête recéleuse ?
Ah ! Tu aurais tant aimé les hommes de ton époque
Et tenir dans tes bras un enfant rieur de ce temps-là !
Mais sur ce versant de l'Espace
Tous les visages t'échappent comme l'eau et le sable
Tu ignores ce que connaissent même les insectes, les gouttes d'eau,
Ils trouvent incontinent à qui parler ou murmurer,
Mais à défaut d'un visage
Les étoiles comprennent ta langue
Et d'instant en instant, familières des distances,
Elles secondent ta pensée, lui fournissent des paroles,
Il suffit de prêter l'oreille lorsque se ferment les yeux.
Oh ! je sais, je sais bien que tu aurais préféré
Être compris par le jour que l'on nomme aujourd'hui
A cause de sa franchise et de son air ressemblant
Et par ceux-là qui se disent sur la Terre tes semblables
Parce qu'ils n'ont pour s'exprimer du fond de leurs années-lumières
Que le scintillement d'un coeur
Obscur pour les autres hommes.
     
     
'Lumière humaine', LES AMIS INCONNUS, 1934.
pp. 167-168 (pour l'édition de 1982).
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Un poète

Je ne vais pas toujours seul au fond de moi-même
Et j'entraîne avec moi plus d'un être vivant.
Ceux qui seront entrés dans mes froides cavernes
Sont-ils sûrs d'en sortir même pour un moment ?
J'entasse dans ma nuit, comme un vaisseau qui sombre,
Pèle-mêle, les passagers et les marins,
Et j'éteins la lumière aux yeux, dans les cabines,
Je me fais des amis des grandes profondeurs.

1990 - [Poésie/Gallimard n° 41, p. 173]
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L'ENFANT NEE DEPUIS PEU

Elle pense:

"Si sévères et si grandes
Ces personnes qui regardent
Et leurs figures dressées
Comme de hautes montagnes.
Suis-je un lac, une rivière,
Suis-je un miroir enchanté?
Pourquoi me regardent-ils?
Je n'ai rien à leur donner.
Qu'ils s'en aillent, qu'ils s'en aillent
Au pays de leurs yeux froids,
Au pays de leurs sourcils
Qui ne savent rien de moi.
J'ai encore fort affaire
Dessous mes closes paupières.
Il me faut prendre congé
De couleurs à oublier,
De millions de lumières
Et de plus d'obscurité
Qui sont de l'autre côté.
Il me faut mettre de l'ordre
Parmi toutes ces étoiles
Que je vais abandonner.
Au fond d'un sommeil sans bornes,
Il me faut me dépêcher."
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Reste immobile, et sache attendre que ton cœur
Se détache de toi comme une lourde pierre.
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EN PAYS ÉTRANGER

Ces visages sont-ils venus de ma mémoire,
Et ces gens ont-ils touché terre ou le ciel ?
Cet homme est-il vivant comme il semble le croire,
Avec sa voix, avec cette fumée aux lèvres ?
Chaises, tables, bois dur, vous que je peux toucher
Dans ce pays neigeux dont je ne sais la langue,
Poêle, et cette chaleur qui chuchote à mes mains,
Quel est cet homme devant vous qui me ressemble
Jusque dans mon passé, sachant ce que je pense,
Touchant si je vous touche et comblant mon silence,
Et qui soudain se lève, ouvre la porte, passe
En laissant tout ce vide où je n'ai plus de place ?

(extrait de "Le Forçat innocent") - p.78
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Hier encore j’eusse dit : « Mes mains »
Et aussi : « Mes jours et mes nuits ».
Aujourd’hui je ne sais que dire,
Tous les mots sont restés au loin,
Saisis par leur propre délire.
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Il vous naît un ami, et voilà qu'il vous cherche
Il ne connaîtra pas votre nom ni vos yeux
Mais il faudra qu'il soit touché comme les autres
Et loge dans son coeur d'étranges battements
Qui lui viennent de jours qu'il n'aura pas vécus.
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Soyons seuls un moment
Dans un monde d'aveugles.
Milliards de paupières
Autour de nous fermées.
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La lampe rêvait tout haut qu'elle était l'obscurité
Et répandait alentour des ténèbres nuancées,
Le papier se brunissait sous son regard apaisé,
Les murs veillaient assourdis l'intimité sans limites.
S'il vous arrivait d'ouvrir des livres sur des rayons
Voilà qu'ils apparaissaient avec leur texte changé,
Et l'on voyait çà et là luire des mots chuchotants.
Vous déceliez votre nom en désarroi dans le texte
Et cependant que tombait une petite pluie d'ombres
Métamorphosant les mots sous un acide inconnu,
Un dormeur rêvait tout bas près de sa lampe allumée.

(extrait de "Les amis inconnus") - p.178
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