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Citations sur Cobra (10)

La tequila est en effet une admirable liqueur. Ambrée, adhérant au verre comme une huile précieuse, elle sent autant qu’une eau-de-vie peut sentir : une odeur de vieux tonneau, de terre asséchée, de fer rouillé, de pomme de terre flétrie, de fleur délicate, de fruit fier. Dès la première gorgée, sa saveur, aussi chaude que le laisse présager sa couleur, vous réchauffe le cœur.
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Il m’a semblé que Paul mettait un temps infini à mourir.
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À mes pieds, le corps tordu de Paul en pyjama me rappelle que je suis un cobra. Je dors sous une inflorescence d’agave. Je dors sous le soleil de Tequila. Sous le soleil du Nouveau Monde. Les cobras, ou najas, viennent d’Afrique ou d’Asie. Et alors ? Qu’est-ce que ça peut faire ? Je dors où il me plaît de dormir. À me voir dormir ainsi, on me croirait dans le coma. Mais le coma du cobra n’a rien à voir avec la perte des sens et de la conscience. Mon coma n’est qu’une longue attente et la haine est mon venin. Je peux l’inoculer ou le cracher et vous brûler les yeux.

Viva el cobra !
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Mais ce bref moment d’émotion ne m’empêchera pas de liquider les autres. Un à un. Ils se défendront et pour moi, bien sûr, ce sera de plus en plus difficile. Mais j’irai jusqu’au bout. À l’image de celle du peuple de Tequila, ma patience est mexicaine, presque infinie. Ma force, inconcevable, même pour moi-même. Et mon imagination, redoutable. Dans l’enfance, quand j’étais trop jeune pour lui tenir tête et la domestiquer, elle me torturait. Désormais apprivoisée, elle ne manque jamais de me montrer l’issue.
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Je savais que Paul allait vomir, qu’il allait s’oublier sur le parquet de ce grand appartement confortable tant convoité puis tant aimé. Je savais qu’aucun de ces détails triviaux n’échapperait à sa conscience intacte. Il est clair que j’ai imaginé un instant être à sa place. Curieusement, j’ai éprouvé de l’empathie. Ce n’était pas prévu. Paul était un pourri complet mais un être humain. Moi, malgré ce qui m’est arrivé, je suis donc encore un être humain. Alors de carcasse à carcasse, d’être pensant à être expirant, j’ai éprouvé de l’empathie. Une larme.
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Il m’a semblé que Paul mettait un temps infini à mourir. Il n’arrivait plus à parler, appelait au secours par tous les pores de sa peau mais nos regards se croisaient et se quittaient et se croisaient. J’ai pu ainsi mesurer l’ampleur de son étonnement et celle de son agonie. Son visage métamorphosé, d’une laideur repoussante, était livide. Ses pupilles dilatées à l’extrême, ses globes oculaires prêts à quitter leurs orbites. Les dents comme soudées laissaient tout de même passer la salive en quelques jets maigres mais impétueux s’échappant de la bouche tétanisée. Les lèvres devenues deux traits gris formaient le plus incroyable sourire. Derrière ce masque convulsif, la terreur originelle poussait avec toute sa violence concentrée. Saisissant.
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Paul n’a donc rien senti venir. En revanche, il a senti sa douleur. Intense, extrême. Mille morts concentrées en une seule. Là, les métaphores ne manquent pas. Un bombardement au napalm circonscrit dans un petit pays de veines et de muqueuses. Un raz de marée contrit dans le périmètre d’un corps trop humain. Un corps qui se tord, se noue sous la montée en puissance des convulsions. Un corps qui s’arcboute, pitoyable pont de chair, figure grotesque. Lorsque les muscles finissent par s’arracher de leurs ligaments et tendons, la souffrance devient inimaginable, même un écorché vif serait d’accord là-dessus. Et vous ne perdez pas la tête avec ça. Tout est clair. Vous vous voyez partir. C’est atroce.

D’autant que les vagues de douleur se calment, cessent tout à fait et reviennent. Il suffit d’un léger stimulus pour que l’horreur redémarre : claquement de mains, petit coup de pied. Et c’est encore pire qu’avant. Le temps fait ce qu’il veut de vous, il vous dilate, vous existez partout à la fois, vos nerfs hurlent en cohortes de suppliciés. Quand le temps vous lâche enfin, vous mourez d’épuisement, aidé un peu par l’arrêt respiratoire dû aux spasmes et par le dysfonctionnement des muscles intercostaux et du diaphragme.
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Paradoxe cruel mais poétique, c’est avec cette eau-de-vie que j’ai décidé de tuer Paul. Et bien sûr avec l’adjonction en toute dernière minute d’un alcaloïde tiré de la graine du vomiquier. Nux vomica. Sous l’odeur de tonneau, de terre asséchée, de fer rouillé, de vieille pomme de terre, de je ne sais plus quoi encore, Paul n’a pas décelé l’amertume de la strychnine. Il aurait pu, ce con, après tout. Il a été chercheur à l’Institut Pasteur, non ? Eh bien, il n’a rien senti. Il faut préciser qu’auparavant j’avais pris soin de lui faire avaler des kumquats confits.
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Trois syllabes et vous débarquez dans une ville qui serait restée confidentielle si un jour un de ses habitants n’avait eu l’idée de distiller le fruit de l’agave. Depuis, là-bas, c’est un cadeau qu’on sait attendre. L’agave fleurit une fois, une seule, et il faut s’armer d’une infinie patience sous le soleil de Tequila. Dix, vingt, trente ans d’état végétatif et, d’un seul coup, la tige s’envole à dix mètres, quelquefois au-delà. À peine née, la fleur devient arbre. C’est alors qu’on est récompensé, le mot « agave » ne vient pas pour rien du grec agauê qui signifie « admirable ». La tequila est en effet une admirable liqueur. Ambrée, adhérant au verre comme une huile précieuse, elle sent autant qu’une eau-de-vie peut sentir : une odeur de vieux tonneau, de terre asséchée, de fer rouillé, de pomme de terre flétrie, de fleur délicate, de fruit fier. Dès la première gorgée, sa saveur, aussi chaude que le laisse présager sa couleur, vous réchauffe le cœur.
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Tequila. Tequila. Tequila.

On peut se faire plaisir en répétant ce nom-là. Il sonne si bien, il charrie tant d’images. Trois syllabes et vous partez vers le Nouveau Monde. Vers le Mexique. Volcans, hauts plateaux, maïs, café, palmiers, cuivres tonitruants des orchestres près des haciendas fleuries, mantilles, sombreros et tout le bazar. Exotisme facile.

Tequila. Tequila. Ce n’est pas ça, pas ça du tout, parce que, en fait, c’est bien plus précis.
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