Les gens qui ont avec la souffrance d’autrui des rapports de service, d’affaires, par exemple les juges, la police, les médecins, avec le temps et par la force de l’habitude s’endurcissent a un point tel que, le voudraient-ils, ils ne pourraient avoir avec leur clientèle d’autres rapports que formels; de ce point de vue ils ne diffèrent aucunement du paysan qui égorge dans son arrière-cour béliers et veaux sans remarquer le sang. (Salle 6)
Une doctrine qui enseigne l'indifférence à la richesse, aux commodités de la vie, le mépris de la douleur et de la mort, est absolument incompréhensible pour l'immense majorité des gens, parce que ces gens n'ont jamais connus ni richesse ni commodités; et mépriser la douleur signifierait pour eux mépriser la vie elle-même, parce que l'être, pour l'homme, c'est ressentir la faim, le froid, les affronts, les pertes et la peur d'Hamlet devant la mort. C'est dans ces sensations que réside toute la vie : on peut la trouver écrasante, la haïr, on ne peut la mépriser. Oui dans ces conditions, je le répète, la doctrine stoïcienne ne peut avoir d'avenir, et ce qui a fait des progrès, comme vous le savez, depuis le début de notre ère jusqu'à nos jours, c'est la lutte, la sensibilité à la douleur, l'aptitude à réagir à l'excitation...(Salle 6.)
Tous avaient un beau passé et un bien mauvais présent; du passé, tous, jusqu'au dernier, parlaient avec enthousiasme, du présent, presque avec mépris. Le russe aime évoquer ses souvenirs, mais il n'aime pas vivre; Iégor ignorait encore cela, et, avant d'avoir fini sa soupe, il était déjà profondément convaincu qu'autour de la marmite étaient assis des hommes que le sort avait outragés et traités sans justice.(La Steppe)