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3,84

sur 1520 notes
L'idée de départ est excellente: il est toujours amusant de suivre la création littéraire d'un personnage détestable et borderline et pour le coup, on est servi! Cet handicapé du sentiment, ce Karoo alcoolique, narcissique, égocentrique et manipulateur est une bonne surprise. Son énergie à se retrouver dans des situations improbables et scabreuses est jubilatoire. Il est malsain, cynique et pathétique à la fois. Pas du tout sympathique le zèbre!

Je suis restée accrochée un tiers du livre, et ai fini péniblement...
En dépit d'une analyse psychologique assez fine, d'une bonne dose d'humour, d'une histoire tordue d'amours croisés assez bien trouvée, d'une charge féroce de l'industrie cinématographique, le gâteau s'est dégonflé en cours de cuisson. L'originalité ne sauve pas l'ennui qui s'installe insidieusement...

Car il y a un autre gros "mais"!
Le style est lourd, très lourd, descriptif à l'excès dans les faits, gestes et situations. C'est d'autant plus frappant à l'écoute du livre audio. Ca donne une sensation de vide, de rien, de creux et des chapitres sans intérêt.
J'ai donc eu une lecture en montagnes russes: des laborieuses montées interminables où j'ai bien cru dévisser et des envolées inattendues qui autorisaient l'optimisme.

J'ai persévéré, portée par la bonne côte d'estime des babeliotes mais ... Un peu perdu mon temps, ma fois!
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Ah! cette peur qu'ont tous les lecteurs boulimiques de passer à côté de chefs d'œuvre, cette rage de ne pouvoir absorber qu'une infime partie de ce qui a, est et sera écrit. Mais le roman définitif a été publié qui rend désormais inutile toute lecture future.
Donc Karoo le livre ultime. Par lequel tout est dit. Roman du langage qui affirme que tout a déjà été écrit et que cela l'a été en pure perte.
Je serais prof de linguistique je mettrais ce bouquin au programme. L'essentiel y est consacré à la fonction la plus triviale de la communication: en gros, je cause, tu causes et rien de ce que nous disons n'a d'importance. Avec sa femme, ses collègues, sa mère, Karoo n'a pas d'autres échanges que cette parole apte à maintenir tout rapport humain dans la superficialité et le refus de l'intimité. Mais la fonction la plus haute de la communication est aussi au cœur de l'histoire: celle qui consiste à transformer le langage en art - et, faute d'en être capable, Karoo l'écrivaillon se réfugie dans le cynisme verbeux.
Tesich aussi d'ailleurs. Comme son héros il travaille à partir d'œuvres dont il n'est pas l'auteur, qu'il glose et paraphrase. Le bouquin est gorgé de références, pas une page sans qu'on se dise "Ah ouais Shakespeare /Waught /Maupassant / Proust / Orwell*..." (*Rayez les mentions inutiles pour ce paragraphe).
Plus la peine donc de surcharger sa bibliothèque. "Presque tout avait déjà été utilisé, c'était le prix de la traversée de cette partie du XX* siècle. "
Je ne sais pas si Tesich connaissait le célèbre passage de Sartre sur le garçon de café qui joue le rôle d'un garçon de café (car chacun d'entre nous a besoin de se montrer tel que les autres veulent le voir) mais peu importe; toujours est-il qu'il donne l'impression qu'aucun livre ne saurait désormais être davantage que la réorganisation d'ouvrages antérieurs (Comme Karoo fait son film en déconstruisant et remontant le chef d'œuvre qu'on lui a confié.)
Tout a déjà été dit et aucun roman ne pourra en dire plus que ce qui se trouve déjà chez Homère ou Sophocle.
Ou dans la Bible. Karoo est Saul, un Saul qui voudrait bien devenir Paul mais qui en fait de conversion sur le chemin de Damas n'obtiendra que la mort sur la route de Pittsburgh. A la toute fin, il découvrira que Dieu n'est que l'autre nom du néant. Mais la même image s'était présentée à Karoo lors de sa dernière rencontre avec Cromwell. "Saul comprit finalement avec qui ill traitait en la personne de Jay Cromwell. Le Néant. Le Néant lui-même. " En fait, comme le confirment ses initiales, Jay Cromwell est un avatar de Jésus Christ.
Dans ce monde sans transcendance, l'art n'a aucun intérêt.
Il ne sert à rien. Il ne donne pas de modèle à suivre: Leila a beau vouloir lire madame Bovary ou Anna Karenine, elle trompera quand même l'homme avec qui elle vit. Il ne donne pas davantage de mode d'emploi puisque Karoo sera incapable d'être le deus ex machina des gens qu'il aime. Il n'anoblit pas non plus ceux qui le pratiquent et le vieil homme mettra Karoo a la porte tandis que Cromwell n'aurait pas été plus ignoble s'il avait été inculte. Et surtout, surtout, il ne console pas: le chef d'œuvre de Houseman ne rend pas plus facile la perte de Leïla.
Toute vie commence par l'épopée avant de devenir tragique et de finir en farce. Alors vautrons-nous dans la farce nous dit Tesich, Elle est le seul et imparfait rempart contre le chagrin.

Bref ce roman est un tour de force mais il constate à défaut de la célébrer la mort de l'art. La mort de l'art et du sacré. Commencé dans l'alcool, il finit dans le sang: transsubstantiation sacrilège d'une société sans valeur que l'inceste lui-même ne fait plus frémir.

Alors pourquoi ne pas mettre une étoile supplémentaire à ce roman? Parce qu'il souligne et surligne tous ses effets et qu'on a trop souvent l'impression d'avoir pour le même prix le texte, le sous-texte et les notes explicatives en bas de page.
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Steve Tesich nous livre ici son deuxième et ultime roman, chant du cygne d'un génial auteur, scenariste et dramaturge.
Après l'adolescence abordée dans le magnifique "Price" (voir critique) c'est à un adulte cynique, désabusé et en roue libre que l'auteur nous confronte. Incapable d'échapper à ses démons (même l'ivresse se refuse à lui), il va tenter un dernier barroud d'honneur pour essayer de trouver sa rédemption. La suite est une chute vertigineuse qui nous plonge dans les méandres d'un esprit torturé. "karoo" est une lecture très éprouvante. Vous qui entrez, laissez toute espérance... Steve Tesich se suicidera quelques jours après après avoir achevé Karoo. Ce fut une grande perte mais malheureusement pas tout à fait une surprise...
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« La première chose qu'Oedipe, roi de Thèbes, fit lorsqu'il vit enfin clairement les choses fut de se crever les yeux. »

Karoo est script doctor, il "arrange" les scénarios dans l'industrie cinématographique américaine, et s'il est plutôt très bon dans son domaine professionnel, c'est un être humain minable. Il est veule, tordu, mou, menteur pathologique, il se laisse aller dans tous les sens du terme. Un jour, il tombera sur le film qui remettra en perspective sa vie entière...
La 4° de couv nous attire en évoquant Roth, Easton Ellis, Richard Russo et Saul Bellow, et si ce n'est pas entièrement faux, c'est en tous les cas réducteur, tant Steve Tesich a un ton et un univers absolument unique. Sa plume m'a captivée totalement, elle est d'une acuité, d'une précision et d'un tranchant parfaitement sidérants.
Ce roman comporte nombre de moments très forts, la façon dont Karoo nous explique sa mise à distance permanente, la manière dont on croit avoir compris avant lui ce qui se passe - alors qu'il sait, évidemment, et qu'il essaie de toutes ses forces de ne pas donner de réalité à ce qu'il sait ne pas pouvoir supporter, le drame qui arrive, le moment où il observe sa mère âgée, la dernière page et sa sentence inexorable (et que je crois fausse, ouf)...
Mais si j'ai lu ces 607 pages avec une grande attention et un appétit de plus en plus vorace - tout en ne m'attachant jamais au personnage -, ce sont les pages 192, 193 et 194 qui ont tout fait basculer : Karoo y raconte un film, et c'est tout simplement merveilleux. Alors qu'il avait jusqu'alors passé son temps à nous montrer quel connard pathétique il était, il nous fait, en trois pages, comprendre sa profondeur, sa sensibilité et quel homme digne il pourrait être.
Avec des mots très simples, avec humilité même, il produit "le billet parfait" (s'il s'agissait d'un billet de blog) - celui qui nous donne l'impression de voir exactement ce dont il veut parler, super envie de voir le film - et surtout il nous montre ce qui le touche infiniment dedans, en élevant son regard et son propos, en dégageant un sens universel d'une situation concrète et qui n'est ni la nôtre, ni la sienne.
Et c'est justement ce film, ce chef-d'oeuvre, qu'il est chargé de "réparer"; il déteste le type qui l'en charge, il adore le film en l'état, il va pourtant tout changer, et c'est l'histoire de sa vie. de mauvais choix en silences impardonnables, il continuera vaille que vaille à assurer le show, doutant en permanence qu'il y ait quoi que ce soit de vrai au fond de ses entrailles puantes (qui finiront elles aussi par le trahir, Karoo ou l'homme faux de A à Z...).
Karoo est un tordu. Mais Steve Tesich était un Grand. (Editions Monsieur Toussaint Louverture, 2012, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Anne Wicke), 607 pages à lire absolument.
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Il est de mauvaise foi, menteur, grand alcoolique, fumeur et pourtant attachant. Peut-être parce que Karoo représente le négatif que l'on a tous en soi. Riche consultant dans le cinéma, 50 ans, séparé, un fils adopté. Sa vie va basculer en visionnant un film lorsqu'il reconnaît le rire de l'actrice qui joue une serveuse. de New-York, il partira à Los Angeles, en passant par l'Espagne. Une histoire bien tordue et bien menée. C'est l'humour noir à la Fanté, Bukowski, Harrison, comme j'aime. Lu grâce à la critique de SeriallectriceSV.
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Dans le résumé de la quatrième de couverture, on dit que ce roman relève de ceux de Roth, Easton Ellis, de Richard Russo et de Saul Bellow; j'ajouterais aussi de Michel Houellebecq.
Saul Karoo, cinquantenaire, divorcé, retouche des scénarios de film écrits par d'autres, sous la gouverne d'un producteur hollywoodien sans scrupules. Désabusé, vaguement alcoolo, il traîne son cynisme partout où il va, et prend un malin plaisir à tout analyser et disséquer chaque événement de son existence. Et, par déformation professionnelle ou pour se dédouaner de son ineptie parentale et maritale, il entreprend même de réécrire sa propre histoire familiale, non sans pleurs et grincements de dents...
J'ai franchement apprécié la première moitié du roman, particulièrement son début fulgurant amenant des situations du plus haut comique. Des dialogues cinglants, un peu à côté de la plaque, m'ont fait éclater de rire plusieurs fois. Cette verve s'est peu à peu tarie dans la deuxième moitié, mais, heureusement, la fin est rachetée par l'apparition d'Ulysse, le héros homérique, qui conclut une intrigue pour le moins embarrassante.
Si vous aimez les auteurs précédemment mentionnés, c'est une lecture que je vous recommande vivement.
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Karoo est un bijou de 600 pages à découvrir absolument. Saul Karoo, le protagoniste qui donne son nom au livre, est un scénariste talentueux qu'un producteur peu scrupuleux (on ne peut s'empêcher de penser à Harvey Weinstein) utilise afin de détricoter les films qu'il juge inaboutis, c'est-à-dire, sans avenir commercial. le chef d'oeuvre d'un vieux cinéaste tombe entre les mains de Saul. Coïncidence, le (petit) rôle de la serveuse romantique y est joué par la mère du garçon que Saul avait adopté (elle avait 14 ans à l'époque…). Saul Karoo récupère les scènes coupées où elle apparaît et, pour la mettre en valeur, transforme un mélodrame puissant en une comédie légère. À cet égard, le récit de son travail de déconstruction est fascinant (pages 300 à 305). Saul Karoo fait et défait les histoires, au point de ne plus savoir ce qui relève de la fiction ou de sa réalité. Miné par des soucis de santé peu ordinaires (dont son hilarante impossibilité à s'enivrer), martyrisé par son ex-femme qui lui reproche, entre autres, de se désintéresser de son fils adoptif, Saul se meut en démiurge et en pygmalion. Il y a du Faust dans cette histoire car influencer la vie de son prochain au point de vouloir la changer fait de lui un mauvais génie. Malgré lui. Ses intentions sont bonnes, et l'enfer en est pavé, au bout de sa quête de rédemption. Saul Karoo est un personnage attachant, un loser magnifique doublé d'un manipulateur qui s'ignore, dans l'incapacité de vaincre une culpabilité qui le suit comme son ombre. Karoo est un roman virtuose, moderne, cynique, subtile dans son utilisation à peine dissimulée des plus grands mythes de notre histoire, dont celui d'Ulysse qui ponctue merveilleusement le récit.
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Une claque magistrale contre l'industrie des studios qui font et défont les étres humains au gré des modes et du rapport à l'argent . C'est disons le tout de suite un livre virtuose , une plongée en apnée dans un univers fou avec un anti héros luiméme fou . le genre de livre que l'on ne peut décrire tellement chaque lecteur aura sa vision radicalement différente de l'autre . Il y a ici une maestria incroyable , tout les éléments pour faire un livre culte , ni plus , ni moins . Magistral. Un seul défaut au final , le nombre horripilant de fois ou l'on retrouve la phrase " J'allume une cigarette " ...
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Ce livre est plus qu'un roman, c'est aussi une leçon de vie. Au départ, une longue présentation un peu humoristique du personnage principal. On trouve Karoo menteur, cynique, égocentrique, lâche , faible, sans moralité, hypochondriaque, qui n'a pas fini de grandir. La suite nous le rendra plus sympathique, son fond est bon mais la finition tellement brute qu'il peut être insupportable. Impossible pour lui de s'investir émotionnellement dans une relation amoureuse ou même avec son fils. Au fil du livre, une rencontre le fera bien évoluer vers des sentiments profonds, des valeurs humaines et il voudra faire plaisir par amour. Il devient sensible, attentif, se rapproche de son fils. Il vivra une désillusion mais aussi un événement qui changera le cours de toute l'histoire. L'auteur nous fait passer par de grandes émotions, amène aussi des moments de tensions. Les personnages sont bien campés, le récit est dense, triste et parfois drôle, c'est bien écrit.. L'histoire est originale. Il est très difficile de laisser le livre de côté. J'ai beaucoup aimé, c'est le genre de livre qui nous reste en mémoire. Un très très bon roman.
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Avec sa belle couverture dorée et son titre aux sonorités étranges, on peut dire que Karoo m'a d'emblée attirée comme un énorme oeuf de Pâques Kinder après trois semaines de diète. Ce roman posthume (l'auteur est mort avant d'avoir apprécié le succès de son livre), avait tout pour me séduire : les élucubrations tragico-comiques d'un vieux looser aux prises avec la diabolique et sans pitié industrie du cinéma hollywoodien. Saul Karoo est un ghost writer, un homme de l'ombre dont le métier consiste à réécrire des scénarios pour les rendre bankable, en épurant au maximum l'intrigue, parsemant le texte des grosses ficelles qui assureront le succès immédiat du film, quitte à corrompre et dénaturer le propos de départ. Quinquagénaire ventripotent, alcoolique - son drame est de ne plus jamais être ivre -, fumeur impénitent, ours mal léché à la libido débridée, incapable d'affection pour son fils adopté, entretenant une relation plus qu'ambiguë avec son ex-femme (entre haine et mépris mais pourtant incapable de prononcer leur divorce), c'est l'incarnation du looser pathétique, conscient de la vacuité de sa vie, de son milieu social qu'il dénigre et de son absence de talent, sa cachant derrière celui des autres. En constante représentation, c'est aussi un homme touchant bien qu'antipathique, un harpagon attachant. Sorte de compagnons de route, nous suivons la repentance de notre antihéros qui tombe amoureux d'une jeune actrice sans talent, accessoirement la mère biologique de son fils adoptif. Comme illuminé par l'idée de se repentir et de "renaître", Saul Karoo va tenter de rattraper des années de mauvaise conduite avec son fils en ressoudant leur lien tout en réunissant le fils et la mère séparés à la naissance.
Drôle, sarcastique, satirique, décortiquant avec dérision la société américaine, le milieu requin du cinéma, vilipendant sans vergogne les pseudos intellectuels new yorkais, Steve Tesich - lui-même scénariste pour Hollywood - nous livre un roman acerbe, qui après avoir démarré sur les chapeaux de roue, continue son rythme de croisière, n'épargnant personne sans jamais tomber dans le règlement de compte de mauvais goût. Son écriture est sèche, sans équivoque, elle épingle là où il faut avec humour et finesse, ce qui m'a fait passer un agréable moment de lecture sans langue de bois.
Petit bémol cependant pour le dernier tiers du roman qui selon moi s'essouffle un peu, le personnage de Saul Karoo devenant un brin bavard ce qui m'a légèrement lassée et perdue quant au propos du livre et de sa conclusion. Mais rassurez-vous, cela n'enlève rien au talent de Steve Tesich et mon impression générale reste bien plus que positive, le premier tiers du livre valant à lui seul le détour.
Lien : http://livreetcompagnie.over..
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