Popineau rentra de la douche, s'assit sur son lit, ne dit rien. Kaczmarek regarda le gros. Pour s'excuser, expliquer qu'ici c'était chacun pour sa peau, il trouva pas les mots. Les sentiments gelaient dans sa bouche, ne pouvaient quitter ses lèvres.
« La prison tape sur le système. Elle est stressante, inquiétante et destructurante, ne facilite donc en rien l’émergence de la vie. » (p.112)
Tu sais Jean, les êtres qu'on nous amène ici, on pourrait directement les conduire à la bibliothèque, ce sont tous des romans. Et s'ils ne le sont pas encore, ils le deviendront ici.
Page 9. Ni les détenus ni les surveillants choisissent d'aller en prison.
Ni les détenus ni les surveillants choisissent d’aller en prison. Depuis que je travaille ici, je n’ai pas rencontré un mec qui y soit entré par vocation. On ne peut pas y rentrer par vocation, c’est impossible.
Donc, un vendredi de début juin, j’étais tourneur-fraiseur et, le lundi matin suivant, j’entrais à la maison d’arrêt avec un cœur gros comme ça qui battait comme je ne sais quoi.
En cellule, elle faisait couler le robinet à l'intérieur de ses paumes jointes puis allait à la fenêtre pour voir entre les barreaux, dans le reflet de l'eau, passer les nuages...
« La détention, c’est tout un arrangement. » (p. 42)
Ni les détenus, ni les surveillants choisissent d'aller en prison. Depuis que je travaille ici, je n'ai pas rencontré un mec qui y soit rentré par vocation. On ne peut pas y entrer par vocation, c'est impossible.
A l'intérieur, tamponné en rouge, le mot CENSURE indiquait que la lettre était passée par le contrôle. Aucune ligne de la missive n'avait été barrée ou recouverte de Tipex par le surveillant préposé, mais là... « CENSURE », ce tampon administratif et capital, baveux, cette imbécile tache rouge en travers, n'importe où sur les mots si joliment écrits, agaçait Kaczmarek.
Il voulait encore rester un peu ici, dans cette île d’amour pour lui, continuer d’y avoir ses rendez-vous à la fenêtre. Et tant pis s’il n’avait jamais vu l’aimée, ne savait rien d’elle, ne la verrait jamais, mais c’est si bon d’avoir une femme à qui dire bonjour le matin… Et la réponse de sa voix venant du bâtiment d’en face. L’homme est rassuré quand il entend l’écho.
Encore quelques mois, quelques semaines, parce que ensuite…
L’hiver dernier, Corinne et Jacky s’étaient souvent écrit « Je t’aime » dans la vapeur des vitres bleues et blêmes.