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Citations sur Le Grand Roman indien (11)

Tu sais bien Ganapathi, comment dans notre pays, pas un mariage n'est arrangé, pas un voyage en avion organisé, pas un projet inauguré, avant que les thèmes astraux n'aient été établis et consultés. Un Indien sans horoscope est comme un Américain sans carte de crédit [...]
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Il est difficile pour toi, qui vis aujourd'hui au milieu de l'évidence du dénuement et qui le prends pour naturel de concevoir une Inde autre que pauvre, injuste et misérable. Mais c'est pourtant ce qu'était l'Inde avant l'arrivée des Anglais, ou alors pourquoi seraient-ils venus ? Crois-tu que les marchands, les aventuriers et les commerçants de la Compagnie Orientale des Indes avant l'arrivée fait voile vers un pays de disette et de misère ? Non, Ganapathi, ils sont venus dans une Inde fabuleusement riche et prospère, ils sont venus en quête de fortune et de profit, et ils prirent ce qu'ils purent prendre, laissant les Indiens se vautrer dans leurs restes. Ganga savait, en pataugeant dans la gadoue et la merde des taudis ouvriers, que tout cela n'existait pas avant l'arrivée des Anglais et représentait une négation de cette idée de Vérité en laquelle il croyait si passionnément.
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Alors tu crois que je ne serai pas à la hauteur, hein ? m'écriai-je. Nom d'un chien, ce que je vais dicter, ce sont les souvenirs de ma vie et de mon temps. Brahm, dans mon épopée je parlerai du passé, du présent et de l'avenir, de l'existence et du trépas, de la floraison et du dépérissement, de la mort et de résurréction, de ce qui est, de ce qui fut, de ce qui aurait dû être. Page 18
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Ainsi c'était fini, et nous avions gagné. L'Inde avait conquis la Grande-Bretagne; les coolies en khadi de Gangaji, ses hordes de tisserands avaient triomphé des brigades de galons et d'épaulettes du plus grand empire que le monde ait connu. Tu ne peux pas imaginer, Ganapathi, tu ne peux pas imaginer l'excitation, l'exaltation, l'exultation de cet instant, à minuit, quand furent hissées les trois couleurs nationales et que le Dhritarashtra, sa voix brisée par l'émotion, annonça à la nation dans la plus durable de ses métaphores visuelles : " Au coeur de la nuit, à l'heure où le monde dort, l'Inde s'éveille à l'aube de la liberté."
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Pas plus que nous n'aurions soupçonné ce que le processus pratique de la Partition allait entraîner. La nomination, par exemple, d'un géographe politique qui n'avait jamais de sa vie mis les pieds sur aucun des territoires à attribuer soit à l'Inde, soit au nouvel Etat du Karnistan. "C'est très facile annonça l'universitaire binoclard en brandissant une baguette devant une carte à petite échelle. [...] "Félicitations mister Nichols !"Un vieux fonctionnaire se leva d'un bond. "Je vis et je travaille dans ce district depuis dix ans et je dois vous tirer mon chapeau. Vous venez de réussir à faire passer votre frontière internationale au beau milieu du marché, à donner les rizières au Karnistan et les entrepôts à l'Inde, la plus grande porcherie de la zilla à l'Etat islamique et la madras du Saint Prophète au pays que les musulmans quittent. Oh, et si j'interprète correctement ce gribouilis-là, ajouta t-il en prenant sa baguette à l'expert bouche bée, l'instituteur aura besoin d'un passeport pour aller au petit coin à la récréation. Bravo mister Nichols, j'espère que le reste de votre travail se révélera aussi ... facile !"
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On les laissa enfin seuls devant une porte aux sculptures compliquées d'où émanait une vague odeur de santal.
"La chambre du maharadjah, chuchota le colonel.
- Pourquoi chuchotez-vous ? demanda Vidur
- Pour ne pas réveiller le maharadjah, chuchota le colonel.
- Nous sommes ici, fit remarquer Vidur, pour réveiller le maharadjah."
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J'ignore s'ils émurent Priya Duryodhani, ces millions d'hommes en haillons, de femmes ravagées et de nuées de gosses qui, avec une dignité tragique, se frayèrent à coup de souffrance, un chemin dans la conscience du monde. J'ignore si elle se désola ou enragea de les voir se blottir sous des arbres, des tentes, dans des tuyaux géants désaffectés, de l'implacable mousson et de l'implacable humanitarisme des objectifs à foyer variable occidentaux. J'ignore si elle enragea devant la pluie de platitudes et d'offres de charité dont l'univers la gratifia tandis que les réfugiés continuaient à se déverser des blessures sanglantes infligées par l'armée karnistanaise. J'ignore si ce fut par amertume ou mépris qu'elle refusa ces sparadraps et tranquillisants que le monde s'avéra plus disposé à donner que le garrot qu'elle recherchait, la forte pression internationale qui seule aurait pu forcer Jarasandha Khan à retirer ses baïonnettes de la tendre chair gélabine dans laquelle elles s'étaient si grotesquement enfoncées. J'ignore, Ganapathi, ce qu'elle ressentit. Mais nous savons tous ce qu'elle fit.
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Le soleil avait entamé sa descente précipitée dans l'inconnu et l'horizon s'embrasait d'orange, tel du safran éparpillé sur une mer houleuse. Dans l'obscurité montante les insectes ressuscitaient, bourdonnaient, pépiaient, mordaient dans la pâleur marbrée de la chair coloniale. C'était l'heure où les esprits anglais se prenaient à songer à boire. Le crépuscule ne dure jamais en Inde, mais sa venue équivalait à celle de l'ouverture des pubs que nos maîtres avaient laissés derrière eux. La nuit tombait et le moral remontait; l'odeur âpre du tonique à la quinine inventé par des planteurs solitaires pour noyer et justifier leurs gins solitaires se mêlait à la senteur des frangipaniers de leurs jardins feuillus et ravagés d'insectes, et le cliquetis apaisant de la glace contre le verre n'était troublé, de temps à autre, que par la claque d'une paume frustrée sur un bout de peau rougissant, tout juste évacué par un moustique anglophage.
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Cela commença comme à l'accoutumée - car les Anglais n'ont jamais rien appris de l'Histoire - par un impôt. Pourquoi ces canailles de Peaux-Roses s'amusèrent-elles à taxer les Indiens, je ne le comprendrais jamais, car elles avaient déjà volé tout ce qu'il leur fallait depuis des siècles, depuis les incrustations précieuses du Taj Mahal jusqu'au Kohinoor sur la couronne de leur reine, et on aurait pu penser qu'elles auraient pu se passer d'ôter avec autant de soin sa maigre pitance au travailleur indien. Mais il y a toujours eu un aspect pervers et précis dans l'oppression britannique : l'édifice légal du Raj fut bâti sur la prémisse que tout ce qui résultait du remplissage de formulaires en quatre exemplaires ne pouvait absolument pas constituer une injustice.
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La jeep descendit la piste en cahotant, éparpillant enfants piailleurs et poules caquetantes dans toutes les directions comme des graines semées par un fermier pompette.
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